On peut lire ici le rapport intitulé "Politique en matière de drogue aux Pays-Bas : Continuité et changement" publié en 1995 par le gouvernement néerlandais, et parrainé par le ministre de la Justice, le ministre de la Santé, du Bien-être et du Sport et le secrétaire d'État à l'Intérieur.

Précisions : après plusieurs conversions ce texte a perdu sa mise en page initiale, que j’ai donc recomposée. Ceci pour dire que les paragraphes ont été établis pour une meilleure lecture. Malheureusement, les appels de note, ainsi que les données chiffrées de certains tableaux, n’ont pu être restitués correctement.

Lire également :

 

 

La politique en matière de drogue aux Pays-Bas

 

Table des matières

 

1 Introduction et exposé du problème

1.1 Évolution de la politique néerlandaise en matière de drogue

1.2 Situation actuelle et évalution

1.3 Complications et tendances nouvelles

1.4 Principes pour la politique future

1.5 Conclusions

2. La politique relative à l'usage de drogues dures

2.1 Ampleur et nature du problème

2.2 Politique relative à l'usage de XTC

2.3 Criminalité, nuisances et toxicomanes

2.4 Mesures administratives contre les nuisances

2.5 Instruments juridiques

2.6 Tourisme des drogues dures

3. La prévention, l'aide et les soins aux toxicomanes

3.1 Nécessité de réformer l'infrastructure d'aide

3.2 Réforme de l'aide et prévention

3.3 Meilleure harmonisation au sein du secteur de l'aide aux toxicomanes

3.4 Différenciation des soins en établissement

3.5 Gestion et structure financière de l'aide ambulatoire aux toxicomanes

3.6 Contrainte et dissuasion dans l'aide aux toxicomanes

3.7 Fourniture d'héroïne sur indication médicale

3.8 Garantie de qualité et évaluation

4. La politique relative aux drogues douces et aux coffee shops

4.1 Ampleur et nature de l'usage de cannabis

4.2 Étendue du marché des drogues douces aux Pays-Bas

4.3 Régulation des coffee shops

4.4 Coffee shops et criminalité organisée

4.5 Narcotourisme et coffee shops

5. L'application de la loi sur l'opium

5.1 Dépistage et poursuite du trafic de drogue

5.2 Résultats des recherches

5.3 Rôle du crime organisé

5.4 Actualisation du plan de lutte contre le crime organisé

5.5 Coopération internationale dans la lutte contre la drogue

5.6 Culture du nederwiet

Le débat sur la légalisation

Lutte contre les nuisances

Expériences de fourniture d'héroïne

Répression pénale du narcotrafic

Coffee shops

Conclusions et intentions politiques

Estimation des fonds nécessaires pour la mise en oeuvre du rapport sur la politique en matière de drogue (en florins), sur une base annuelle

Bibliographie

Annexe I

Annexe II

Annexe III

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1. Introduction et exposé du problème

 

1.1. Évolution de la politique néerlandaise en matière de drogue

 

L'usage de drogues, telles que les produits du cannabis ou chanvre et les opiacés, augmenta fortement en Europe occidentale et en Amérique du Nord au cours des années soixante et soixante- dix et nombreux furent ceux qui craignirent que cette évolution ne s'accompagnât d'une explosion des problèmes de santé publique. C'est notamment pour cela que furent définis des cadres nationaux et internationaux pour la politique de lutte contre la drogue. Depuis, le niveau de consommation des différents types de drogue et leur répartition ont connu des fluctuations considérables dans les pays concernés. Dans certains pays, la consommation locale a continué d'augmenter, dans d'autres, comme aux Pays-Bas, le volume de la consommation s'est à peu près stabilisé au niveau atteint vers 1980*.

L'usage du cannabis et des opiacés n'a pas été éradiqué; il n'a pas non plus baissé d'une manière importante. C'est là une constatation décevante pour ceux qui espéraient qu'une politique gouvernementale énergique parviendrait à bannir le recours à la drogue, et une raison de remanier en profondeur la politique. Vu l'expérience acquise sur le plan international dans la lutte contre les marchés des produits ou services illicites, on pouvait toutefois s'attendre à ce que les interventions publiques ne donnent que des résultats limités. C'est notamment pour cela qu'aux Pays-Bas la politique a toujours eu pour objectif plus modeste de garder ou de rendre maîtrisable le problème sanitaire et social que constitue l'usage des drogues dangereuses. Compte tenu de cet objectif, la politique néerlandaise a donné de bons résultats. L'usage de ces drogues ne s'est pas répandu beaucoup plus aux Pays-Bas qu'il ne l'était déjà dans les années soixante- dix et, sur le plan médical, la toxicomanie ne s'est pas aggravée. D'un point de vue de santé publique, la nicotine et l'alcool font, aux Pays-Bas comme dans le reste du monde occidental, beaucoup plus de victimes que celles de toutes les drogues couvertes par la loi portant dispositions en matière d'opium et autres stupéfiants, que nous appellerons ci-après, pour plus de concision, la loi sur l'opium (Opiumwet)*.

S'étant rallié à l'avis du Groupe de travail sur les stupéfiants (1972) *, le gouvernement de l'époque n'avait pas jugé utile de fonder sa politique sur le principe que tout usage de drogue implique en soi des risques inacceptables pour la collectivité. Ces risques dépendent entre autres des circonstances et de l'intensité de l'usage de drogues. Le gouvernement a de ce fait choisi pour objectifs principaux de sa politique la prévention et la maîtrise des risques individuels et collectifs découlant de l'usage de drogues. La politique néerlandaise en matière de drogue, ainsi formulée, est restée inchangée depuis*. Selon cette politique, les pouvoirs publics ont pour tâche d'empêcher autant que possible que les citoyens, en particulier les jeunes, ne se mettent à prendre des drogues et de proposer aux usagers à problèmes une offre d'aide médicale et/ou sociale pour soulager leur misère (harm reduction). Se basant sur des données scientifiques, le législateur néerlandais a fait la distinction entre les drogues présentant des risques inacceptables pour la santé et les produits du chanvre, dont les risques sont considérés comme moins élevés (drogues dures et drogues douces). Dans la conception néerlandaise, les intérêts à protéger par le biais du droit pénal sont essentiellement des intérêts de santé publique. C'est pourquoi la politique en matière de drogue est, aux Pays-Bas, différenciée en fonction de la gravité des dommages pour la santé dus à l'usage ou à l'abus des substances en cause.

L'usage de drogues en tant que tel n'est pas punissable aux Pays- Bas*. Le consommateur de drogues dures est considéré davantage comme un malade que comme un délinquant. Conformément à ce principe, le pays a mis en place un vaste système différencié d'équipements de prévention et de soins. Les autorités judiciaires ont toujours prôné que le traitement médical d'un toxicomane est préférable à son emprisonnement. Elles persistent dans cette voie, malgré les résultats parfois décevants du traitement et les récidives, et elles recherchent en permanence de nouveaux moyens de réaliser cet objectif. S'agissant des toxicomanes, la politique vise à la réduction des risques et des dommages et, par là, à l'insertion sociale des drogués. La prévention, les soins ambulatoires et les traitements en établissement sont confiés à du personnel spécialisé travaillant dans le cadre d'organisations gérées professionnellement. Les Pays-Bas consacrent environ 160 millions de florins aux soins aux toxicomanes (cliniques et soins ambulatoires, notamment). Ce montant est élevé par rapport à l'étranger. Les traitements ne visent pas exclusivement à obtenir de tous les drogués une abstinence complète - c'est-à-dire à sevrer durablement les anciens toxicomanes -, mais cherchent à améliorer l'état de santé et le fonctionnement social de groupes cibles clairement définis, par exemple par de bons équipements médicaux, la fourniture de méthadone, l'échange des seringues et des formes d'accueil pour le jour et la nuit.

Comme ailleurs, la politique en matière de drogue aux Pays-Bas vise, par une répression pénale sévère du trafic, à établir des barrières aussi insurmontables que possible pour l'usage des drogues dures. Aux Pays-Bas également, l'achat de drogues dures se fait dans la clandestinité et le dépistage des organisations criminelles qui sont entre autres actives dans le trafic des drogues dures et douces est, depuis de nombreuses années, la principale priorité de la police judiciaire. Les grandes quantités de drogues saisies (cf. 5.2) sont une preuve du zèle déployé par les services de recherche et de contrôle. La politique en matière de drogue suit donc dans les grandes lignes le modèle international de lutte. Conformément aux dispositions de la Convention unique des Nations Unies sur les stupéfiants, la production et le trafic de drogue sont soumis à une forte répression pénale. Chaque année, le parquet traite en moyenne 10.000 cas d'infractions à la loi sur l'opium. En termes financiers, la répression pénale du trafic de drogue coûte chaque année 270 millions de florins. Il faut ajouter à ce montant un minimum de 370 millions pour la lutte contre la délinquance des drogués (vols). La capacité des prisons néerlandaises a été portée ces dix dernières années de cinq mille à douze mille cellules. On peut dire, sans exagération, que la répression du trafic de drogue a été la cause principale de l'augmentation du nombre d'années de peines privatives de liberté infligées par les juges.

L'usage des drogues douces est considéré par les autorités néerlandaises comme comportant des risques; toutefois, puisque ces risques sont moins graves, la stratégie de maîtrise du problème est plus nuancée que celle s'appliquant aux drogues dures. Comme c'est le cas par exemple dans certains États des États-Unis, la détention d'une quantité de drogue douce pour l'usage personnel est décriminalisée, ce qui signifie qu'elle est punissable comme contravention et non comme délit. Le législateur a ainsi souligné que les poursuites pénales pour consommation de drogues douces ne doivent pas entraîner la stigmatisation ni la marginalisation sociale de l'usager.

La politique néerlandaise en matière de cannabis se fonde sur l'hypothèse que le passage éventuel des drogues douces aux drogues dures est déterminé par des causes plutôt sociales que physiologiques. Si de jeunes adultes veulent consommer des drogues douces - et l'expérience nous apprend qu'ils sont nombreux à en ressentir effectivement le besoin -, il vaut mieux, dans l'optique néerlandaise, qu'ils le fassent dans un environnement qui ne les met pas en contact avec la sous-culture criminelle entourant les drogues dures. En tolérant l'offre de doses individuelles de drogue douce, les autorités cherchent à garder séparés les marchés des consommateurs de drogues douces et de drogues dures, de façon à créer un "seuil" social, entravant le passage des unes aux autres.

Après quelque temps, ce principe a abouti dans la pratique à ce que les autorités judiciaires tolèrent que des revendeurs sérieux vendent des drogues douces dans les maisons de jeunes. Ensuite sont apparus les "coffee shops" qui vendent, sur une base commerciale, des drogues douces à des personnes majeures. Dans presque tous les pays confrontés aux problèmes liés à la drogue, la police et la justice sont obligées de se fixer des priorités pour la recherche et la poursuite des délits de drogue. Le trafic international à grande échelle de drogues dures a partout la plus haute priorité. Le petit trafic et la détention de drogues douces viennent en dernier. Ce même ordre de priorités est par exemple respecté dans beaucoup d'États des États-Unis d'Amérique, en Allemagne, en Grande-Bretagne et en France. Dans ces pays, on ne dresse plus que rarement procès-verbal pour la détention de petites quantités de drogues douces. La possession d'un stock de quelques grammes pour l'usage personnel y est de facto dépénalisée. En Allemagne, par exemple, en vertu de la jurisprudence du Bundes Verfassungsgericht Karlsruhe (9 mars 1994), la détention d'un stock de cannabis pour l'usage personnel n'est plus poursuivie comme un délit. Dans les grandes villes de ces pays, on vend et on consomme à grande échelle des drogues douces dans les établissements fréquentés par les jeunes et à proximité de ceux-ci.

À l'heure actuelle, dans les villes du monde occidental, les drogues douces sont partout disponibles en grande quantité*. Aux Pays-Bas, pour garder ces usagers à l'écart du circuit criminel, les autorités ont donné à la vente au détail de drogues douces, qui satisfait à certains critères stricts, un ordre de priorité à ce point faible dans le cadre des recherches et des poursuites pénales qu'elle n'est de facto pas poursuivie. Dans d'autres pays aussi, les autorités n'interviennent pas dans la vente au détail de drogues douces - c'est par exemple le cas dans les Länder allemands voisins - mais, aux Pays-Bas, cette faible priorité est consignée dans une directive officielle détaillée du parquet, conformément aux principes nationaux de procédure pénale.

Cette politique officielle de tolérance ne repose pas sur une attitude plus permissive, voire positive, à l'égard de l'usage des drogues douces, mais sur la considération que, si l'on tolère à certaines conditions la vente de drogues douces, on empêche les jeunes de se tourner vers les drogues plus dangereuses. La politique néerlandaise des "coffee shops" se place, elle aussi, sous le signe de la recherche du moindre mal (harm reduction).

 

1.2. Situation actuelle et évaluation

 

Lors de l'évaluation de la politique néerlandaise en matière de drogue, il faut surtout s'intéresser aux résultats obtenus dans la pratique. Les données statistiques sur l'usage de drogues sont, vu son caractère illicite, basées sur des estimations qui, elles, se fondent entre autres sur des informations de la police et de l'infrastructure d'aide. Il existe toutefois une zone d'ombre, un nombre inconnu d'usagers de drogue qui ne sont en contact avec aucune instance. L'ampleur réelle de l'usage de drogues est souvent estimé aussi au moyen de sondages de population. Comme l'usage de drogues est illicite, les répondants de ces sondages n'admettront pas toujours qu'ils prennent des drogues. En outre, les groupes présentant le plus de problèmes ne seront généralement pas représentés proportionnellement dans l'échantillon.

On peut supposer en général que les autorités et les scientifiques ont une image plus complète de l'usage de certaines drogues à mesure que cet usage est moins illicite. Aux Pays-Bas, nous l'avons dit, l'usage de drogues douces est décriminalisé depuis les années soixante-dix. La consommation de drogues dures se fait, il est vrai, dans la clandestinité, mais l'infrastructure d'aide est, aux Pays-Bas, répandue et d'accès facile. Elle estime être en contact régulier avec au moins deux tiers de tous les toxicomanes. Étant donné ces circonstances, les autorités néerlandaises ont de l'ampleur et de la nature de l'usage de drogues une vue d'ensemble qui est bonne, par rapport à celle d'autres pays. Si l'on examine dans ce contexte les données statistiques disponibles sur l'usage de drogues dans différents pays, on obtient l'image suivante.

La consommation de drogues douces aux Pays-Bas ne s'écarte pas, sur le plan du volume et du type, du modèle courant dans le reste du monde occidental*. Ces dernières années, la consommation aux États-Unis, entre autres, dépasse à nouveau largement celle dans notre pays. Cela vaut tout autant pour les mineurs*. La décriminalisation dans les années soixante-dix n'a pas non plus entraîné à l'époque une hausse de la consommation chez les jeunes. L'objectif de la politique néerlandaise - qui vise à protéger du milieu des drogues dures les jeunes adultes voulant prendre des drogues douces dans une phase de leur vie - s'est en outre révélé réaliste. Une très petite part seulement des jeunes qui ont goûté aux drogues douces passe aux drogues dures. L'idée prônée par d'aucuns, selon laquelle l'usage des produits du chanvre suscite en soi le besoin physiologique ou psychique de recourir aussi aux drogues dures - la théorie dite du marchepied (stepping stone theory) - est réfutée par l'évolution de la situation aux Pays-Bas*.

Les jeunes Néerlandais qui consomment des drogues douces sont pleinement conscients des risques plus grands rattachés à l'usage de drogues dures, comme l'héroïne, et ne sont pas pressés d'en faire l'expérience. La proportion d'usagers de drogues douces prenant aussi des drogues dures est relativement faible aux Pays-Bas. Au vu de ces constatations, la théorie du marche-pied doit être considérée comme un des nombreux mythes qui entourent l'usage de drogues. Un mythe qui, dans certaines conditions, pourrait devenir réalité: une politique mettant dans le même panier l'usage des produits du cannabis et celui des drogues dures, comme l'héroïne et la cocaïne, peut en effet contribuer à ce que les fumeurs de chanvre entrent en contact avec les drogues dures. Assimiler les deux types de drogues équivaut en outre à saper la crédibilité de l'information sur les drogues dispensée aux jeunes.

Aussi différentes que soient les conceptions sur la politique en matière de drogue, il existe un large consensus sur le critère ultime en fonction duquel il faut évaluer l'efficacité de chaque politique nationale dans ce domaine. Ce critère est évidemment l'ampleur et l'évolution du nombre des toxicomanes et, en particulier, du nombre des usagers de drogues dures de moins de 21 ans. Le tableau 1 donne un aperçu comparatif international des nombres estimés de toxicomanes.

 

Chiffres comparatifs internationaux de prévalence concernant les toxicomanes (drogues dures)

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Pays

 

nombre de toxicomanes

 

millions d'habitants

 

pour mille hab.

 

Pays-Bas

25.000

15,1

1,6

Allemagne

100.000/120.000

79,8

1,3/1,5

Belgique

17.500

10,0

1,8

Luxembourg

2.000

0,4

5,0

France

135.000/150.000

57,0

2,4/2,6

G.-Bretagne

150.000

57,6

2,6

Danemark

10.000

5,1

2,0

Suède

13.500

8,6

1,6

Norvège

4.500

4,3

1,0

Suisse

26.500/45.000

6,7

4,0/6,7

Autriche

10.000

7,8

1,3

Italie

175.000

57,8

3,0

Espagne

120.000

39,4

3,0

Grèce

35.000

10,1

3,5

Portugal

45.000

10,0

4,5

Irlande

2.000

3,5

0,6

Sources: Bosman et Van Es (1993); Bless et al., 1993; WHO regional office for Europe, 1992; Commission des Communautés Européennes, 1992, Bossong 1994; Van Cauwenberghe et al. 1993.

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Le nombre des toxicomanes aux Pays-Bas est estimé par plusieurs experts à 25.000 environ*, soit 1,65 pour mille de la population. Comme expliqué plus haut, cette estimation est fiable, en raison notamment de la portée relativement grande de l'infrastructure néerlandaise d'aide aux toxicomanes. Il n'est pas possible de faire une comparaison exacte avec les nombres estimés de toxicomanes dans d'autres pays européens en raison d'incertitudes méthodologiques. Il est probable que, dans quelques autres pays où la portée des services d'aide est plus faible, la zone d'ombre soit plus importante qu'aux Pays-Bas. Quoi qu'il en soit, les estimations disponibles montrent que le nombre des toxicomanes pour 100.000 habitants est faible aux Pays-Bas, par rapport à la moyenne arithmétique européenne, qui serait de 2,7, et est même de loin inférieur à celui estimé en France, en Grande-Bretagne, en Italie, en Espagne et en Suisse, par exemple. L'annexe I reproduit une liste des nombres estimés de toxicomanes dans quelques pays européens, selon différentes sources. Selon toutes les estimations, le nombre des toxicomanes est relativement faible aux Pays-Bas.

Il est surtout réjouissant qu'aux Pays-Bas le nombre des héroïnomanes de moins de 21 ans soit relativement faible, même parmi les groupes vulnérables, et qu'il continue de diminuer ces dernières années*. Par ailleurs, l'usage des sortes de cocaïne bon marché ne s'est pas largement diffusé, comme on le craignait il y a quelques années, compte tenu de l'évolution constatée entre autres aux États-Unis*. L'augmentation du nombre de jeunes usagers est probablement freiné aussi par l'image de raté qui colle actuellement aux héroïnomanes. La présence dans des quartiers socialement vulnérables de toxicomanes d'un certain âge, vivant dans la déchéance, est une antipropagande convaincante pour l'usage de l'héroïne. Puisque la police ne mène pas d'actions répressives contre les toxicomanes pour le simple fait qu'ils consomment de la drogue et que ceux-ci peuvent obtenir facilement de la méthadone comme succédané, leur mode de vie n'est pas ressenti par les jeunes comme une expression de révolte sociale ou culturelle.

La mortalité due à une surdose de drogue est faible aux Pays-Bas. Selon un rapport des Nations Unies, le nombre des décès dus à la drogue aux Pays-Bas fut de 42 en 1991, contre 82 en Belgique, 188 au Danemark, 411 en France, 2.125 en Allemagne, 1.382 en Italie, 307 au Royaume-Uni et 479 en Espagne. Aux États-Unis, il s'éleva à 5.830*. Le nombre des décès par surdose pour 100.000 habitants est donc au moins deux fois plus élevé à l'étranger. Contrairement au reste du monde, ce nombre n'augmente pas chez nous. Aux Pays-Bas, les toxicomanes atteints du sida sont, proportionnellement, peu nombreux. Dans les pays d'Europe méridionale surtout, le pourcentage de drogués séropositifs est beaucoup plus élevé. L'accessibilité des services d'aide, y compris la possibilité d'échanger les seringues, et la vaste information du public dans notre pays ont réduit considérablement les risques inhérents aux injections intraveineuses de drogue. La proportion des toxicomanes dans le nombre total des personnes contaminées par le V.I.H. est relativement faible*. Selon une enquête, près de 60% des prostituées héroïnomanes exigent l'utilisation du préservatif, contre 20% en 1986*. Il s'ensuit un effet préventif sur la propagation du sida en dehors des groupes primaires à risques.

Sur le plan également de la mortalité et de la morbidité parmi les toxicomanes, une comparaison avec les problèmes de drogue que connaissent les pays voisins est à l'avantage des Pays-Bas. La politique de la réduction des risques (harm reduction), qui englobe entre autres les vastes programmes de distribution de méthadone et d'échange des seringues, commencés dès les années soixante-dix, a donc donné des résultats relativement bons. Elle a aussi contribué à limiter l'épidémie de sida. Dans l'ensemble, nous pouvons conclure que nous avons atteint, grâce à la politique néerlandaise en matière de drogue, des résultats concrets en termes de santé publique.

 

1.3. Complications et tendances nouvelles

 

Bien que dans une perspective internationale la situation ne soit pas défavorable en termes de santé publique, l'usage de drogues et les phénomènes dont il s'accompagne soulèvent, aux Pays-Bas également, de gros et urgents problèmes sociaux et administratifs. Trois complications entravent l'action, à savoir les nuisances, la criminalité organisée autour du trafic de drogue et la critique de l'étranger sur les effets extérieurs supposés et réels. Premièrement, un petit nombre des toxicomanes causent beaucoup de nuisances à leurs concitoyens. Ce groupe commet de nombreux délits patrimoniaux pour trouver l'argent nécessaire à l'achat de la drogue. Contrairement à ce que l'on espérait, la distribution de méthadone décidée aux Pays-Bas, n'a guère amélioré la situation. Environ vingt pour cent des toxicomanes ont un mode de vie particulièrement asocial, dont le vagabondage, l'usage de (plusieurs) drogues et la délinquance constituent des éléments qui se renforcent mutuellement*. Les seuils de tolérance, en particulier des habitants des quartiers urbains socialement vulnérables, sont constamment franchis en raison de la vente de drogue, de la criminalité liée à la drogue et des formes de comportement asocial des drogués, comme l'abandon des seringues sur la voie publique. Dans certains cas, cela a incité les citoyens à prendre eux-mêmes les choses en main, par exemple en éloignant par la force les toxicomanes de leur quartier (et/ou en interdisant la rue aux narcotouristes français).

Il est évident que la consommation de drogue ne saurait être un blanc-seing pour causer des dommages et des nuisances à autrui. Les autorités devront juguler la criminalité et les nuisances causées par une partie des drogués, quels que soient les objectifs de la politique menée en matière de drogue. Comme le groupe cible n'est pas trop nombreux - environ 5.000 drogués ont un mode de vie asocial à l'extrême -, le gouvernement considère comme son devoir d'arriver à court terme à des résultats offrant des perspectives de solution durable du problème. Dans certaines communes, la population se plaint aussi des nuisances dues aux coffee shops; ceux-ci attirent des flots de visiteurs bruyants, au comportement asocial, parmi lesquels il y a des étrangers*. Les nuisances liées aux coffee shops sont d'une autre nature que celles occasionnées par le milieu des drogues dures. Il s'agit en partie des nuisances qu'entraînent les cafés et restaurants en général. Dans certaines communes, le voisinage des coffee shops subit, entre autres du fait du narcotourisme étranger, une gêne excessive que rien ne justifie. Ces effets pervers de la politique relative aux coffee shops minent l'assise sociale de cette politique et devront être éliminés, aussi pour cette raison. Cela vaut a fortiori pour les nuisances causées par les cafés ayant une licence de vente d'alcool et qui vendent aussi du cannabis, contrairement aux dispositions municipales relatives aux débits de boisson. En outre, il faudra poursuivre plus énergiquement les coffee shops où s'exercent des activités illicites, comme le trafic de drogues dures, le trafic d'armes ou le recel. Il faudra définir plus strictement les limites de la politique de tolérance.

La deuxième complication découle de l'augmentation du nombre d' organisations criminelles qui se concentrent sur l'importation et la vente de drogue. Bien que l'on ne connaisse pas le nombre de telles organisations, il est indéniable que les criminels professionnels qui se consacrent en tout ou en partie au trafic de drogue ont pu étendre fortement leurs activités ces dix dernières années, tant sur le plan international qu'aux Pays-Bas. On estime qu'au niveau mondial le trafic de drogue génère des profits annuels de quelque 500 milliards de florins*. Les estimations du chiffre d'affaires annuel provenant des drogues douces et dures aux Pays-Bas divergent fortement. Il semblerait que l'estimation de 5,5 milliards de florins par an, citée dans le rapport sur la criminalité organisée, sur son développement et sur le plan de lutte (Nota Georganiseerde criminaliteit: dreigingsbeeld en plan van aanpak, Seconde Chambre, session 1992- 1993, 22838, no 1.), doive être considérée actuellement comme une estimation minimale. Des estimations plus récentes parlent de 10 milliards*. L'importance économique croissante du crime organisé ressort aussi des 2.600 communications faites en 1994 et transmises comme "louches" à la justice par les établissements financiers au Bureau de signalement des transactions inhabituelles. La moitié environ de ces transactions "louches" était liée au trafic de drogue.

Les activités et la puissance économique croissantes des organisations criminelles, qui opèrent souvent au niveau international, constituent une menace pour l'État de droit. Cette menace suscite évidemment des réactions des autorités, sous la forme par exemple d'un élargissement des compétences et des ressources financières de la police et de la justice. On fait aussi appel au réseau bancaire et aux professions libérales concernées dans le cadre de la prévention et de la détection des pratiques de blanchiment de l'argent sale. Les montants dont il s'agit sont devenus à ce point énormes que l'intégrité de certains segments de l'économie est mise toujours plus à rude épreuve. Un facteur compliquant la politique est que les mouvements financiers s'arrêtent de moins en moins aux frontières nationales. La portée des interventions pénales et préventives s'étend progressivement. Cette évolution implique inévitablement qu'il faut demander, dans l'intérêt public, des sacrifices aux entreprises et aux citoyens, prenant la forme de charges supplémentaires et de restriction des droits et libertés des citoyens. Pour se protéger de cette contre-offensive commune, les organisations criminelles essaient à leur tour de corrompre des membres du personnel de la police, de la justice et des banques, ainsi que des membres des professions libérales. La réaction consiste alors à introduire ou à améliorer les codes déontologiques.

Le cercle vicieux issu du trafic de drogue s'accompagne de coûts sociaux toujours plus élevés. Dans des parties des États-Unis, le coût de l'administration pénitentiaire pèse à ce point sur le budget public que d'autres équipements, comme l'enseignement, risquent d'en pâ tir. Selon certains critiques, le rapport entre les coûts de la politique en matière de drogue et ses avantages n'est plus raisonnable. L'enquête parlementaire en cours sur, notamment, l'admissibilité ou non des méthodes appliquées pour dépister les organisations criminelles porte aussi sur certains effets secondaires controversés de la politique relative au trafic de drogue.

Les effets transfrontaliers de la politique néerlandaise constituent la troisième complication. La critique parfois acerbe des autorités étrangères sur cette politique repose en partie sur une connaissance insuffisante de la situation. Il faudra y répondre en présentant mieux à l'étranger les motifs, les objectifs et les effets réels de la politique néerlandaise en matière de drogue. La critique trouve aussi son origine dans une vision fondamentalement différente de la tâche des pouvoirs publics à l'égard de la consommation de substances à risques par des citoyens adultes. Ce genre de différences se manifeste aussi dans la politique des États européens en matière de régulation des marchés de l'alcool et des cigarettes. Il existe en outre une divergence de vues sur les risques médicaux de certaines drogues. La conception du législateur néerlandais, selon laquelle les produits du cannabis sont moins dangereux pour la santé que les drogues dures et doivent donc être soumis à une autre réglementation, n'est pas partagée par tout le monde dans l'Union Européenne. Des rapports étrangers récents d'éminents spécialistes de la drogue* soutiennent la distinction faite par le législateur néerlandais entre drogues douces et dures. Une critique basée sur des conceptions relatives aux risques sanitaires qui ne sont plus soutenues dans la littérature scientifique ne saurait évidemment justifier une adaptation de la politique néerlandaise. La réaction doit consister en des programmes d'échanges scientifiques et administratifs.

Le caractère idéologique d'une partie de la critique étrangère ne doit pas faire oublier que la politique néerlandaise présente pour d'autres pays des aspects qui leur posent des problèmes. Il est manifeste que les Pays-Bas et les Néerlandais occupent une place plus que proportionnelle dans le trafic de certains types de drogue. Selon les estimations de la police, il y a aux Pays- Bas une centaine d'organisations criminelles, dont la majeure partie est aussi impliquée dans le trafic de drogue*. Au sein des organisations criminelles actives notamment dans le trafic des drogues dures, les résidents de souche étrangère entretenant des liens étroits avec des organisations criminelles dans leur pays d'origine, sont fortement surreprésentés. Les organisations dont font partie essentiellement des Néerlandais autochtones se consacrent surtout au trafic des drogues douces. La part des livraisons pour le marché national est petite. Des Néerlandais sont en outre mêlés au transit et au trafic international de drogues douces. Les Pays-Bas sont aussi un important pays producteur d'amphétamines et de XTC.

Le rôle des Pays-Bas dans le narcotrafic s'explique en partie par leur situation géographique. Ils sont, pour beaucoup de marchandises, la porte de l'Europe. Par ailleurs, Amsterdam en particulier est un centre international de rencontre, en raison notamment de son ambiance cosmopolite. Comme déjà remarqué dans le rapport de 1985 sur la société et la criminalité (Nota Samenleving en Criminaliteit, 1985), il n'est pas possible d'exclure complètement que les infrastructures existantes soient également utilisées pour le trafic de drogue. Les autorités néerlandaises déploient des efforts considérables pour dépister et poursuivre en justice le narcotrafic international passant par les ports maritimes et l'aéroport de Schiphol. La participation aux enquêtes judiciaires internationales sera renforcée dans les années à venir, notamment par la formation d'une équipe nationale de recherche. Cependant, vu le volume et la vitesse des mouvements de marchandises, il ne sera probablement jamais possible d'éliminer entièrement le trafic de drogue du port de Rotterdam, ni d'ailleurs d'aucun autre port mondial.

Les autorités de certains pays voisins s'inquiètent des effets transfrontaliers de la politique néerlandaise. La pierre d'achoppement est en particulier les prix relativement bas demandés ces dernières années aux Pays-Bas - mais depuis peu aussi en Belgique - pour certaines drogues dures, ainsi que l'exportation de drogues douces achetées dans les coffee shops. Les prix inférieurs pratiqués sur le marché illicite de l'héroïne ne peuvent pas être imputés sans plus à la politique menée aux Pays-Bas en matière de production ou d'importation. Rappelons une fois encore que, contrairement à ce que l'on suppose parfois à l'étranger, le trafic des drogues dures fait l'objet d'activités intenses de recherche et est sanctionné sévèrement, comme en témoigne l'augmentation rapide du nombre de cellules dans les prisons.

Le facteur crucial est l'offre gigantesque de drogues dures sur les marchés internationaux, comme le confirment les rapports périodiques de l'ONU. Le prix sur le marché est codéterminé par la demande locale de certaines drogues. Ces derniers temps, la popularité de l'héroïne diminue assez fortement aux Pays-Bas, comme dans quelques autres pays; de plus, les centres d'aide distribuent à grande échelle des produits de substitution, comme la méthadone, à la population des toxicomanes d'un certain âge. Il est vraisemblable que la baisse de la demande d'héroïne est à l'origine de la baisse des prix. Les faibles prix demandés pour les drogues dures incitent au narcotourisme, ce qui est préoccupant. Il est indispensable d'intensifier les efforts de dépistage, en particulier pour les drogues dures, y compris le XTC. Les mesures envisagées dans ce domaine seront détaillées au chapitre cinq du présent rapport. Il est indéniable que les coffee shops attirent des clients étrangers, surtout dans les communes frontalières. Entre les pays appliquant des politiques différentes en matière de vente d'alcool ou d'autres produits, comme les armes, s'établit un trafic transfrontalier spécifiquement axé sur ces produits.

Tant que ces différences de politique subsisteront, il sera difficile d'éviter entièrement les phénomènes de contrebande. Puisqu'il a été convenu dans le cadre de l'Accord de Schengen que les différences existant entre les politiques nationales des États membres en matière de drogue seront respectées, ces effets secondaires devront être acceptés jusqu'à un certain point. En ratifiant l'Accord de Schengen, l'État néerlandais s'est cependant engagé à combattre autant que possible ces effets transfrontaliers indésirables lors de l'application de sa politique nationale*. On peut exiger des autorités néerlandaises qu'elles fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour réduire au minimum l'exportation des drogues douces achetées dans les coffee shops. C'est à juste titre que les pays voisins demandent aux Pays-Bas d'agir en ce sens.

 

1.4. Principes pour la politique future

 

Vu les résultats relativement favorables que nous avons obtenus, nous estimons qu'il n'y a pas lieu de mettre fondamentalement en cause la politique néerlandaise en matière de drogue, axée en premier lieu sur la maîtrise des risques sanitaires de l'usage de drogues. Il n'y a donc pas non plus de raison d'en modifier l'essence. Des changements radicaux pourraient même avoir un effet contraire sur la santé publique. Pourtant, les trois complications exposées plus haut - les nuisances, la criminalité organisée autour du trafic de drogue et la critique étrangère sur certains effets extérieurs de la politique - obligent à une analyse précise des problèmes qui se présentent dans la pratique de l'application de la politique et à certains ajustements partiels. Il a été convenu dans l'accord gouvernemental de poursuivre l'approche néerlandaise du problème de la drogue, qui s'est révélée relativement fructueuse, de la nuancer et d'explorer de nouvelles voies, une attention particulière étant accordée à la lutte contre les nuisances.

Les ajustements de la politique s'imposent aussi en raison des mutations constantes des différents marchés de la drogue, du côté de l'offre comme de la demande. Les changements dans la composition et les données sociales des groupes d'usagers et la diffusion de nouvelles drogues nécessitent des mesures nouvelles. La stabilisation de la population des héroïnomanes aux Pays-Bas fait que l'infrastructure d'aide aux toxicomanes doit s'orienter vers les toxicomanes d'un certain âge et confrontés à des problèmes graves d'ordre physique et psychique. Nous avons signalé plus haut que l'héroïne a perdu beaucoup de sa popularité parmi les jeunes et que le nombre des cocaïnomanes primaires reste apparemment faible. Les designer-drugs ou drogues de synthèse comme le XTC, par contre, se vendent plus, tant dans les grandes house parties qu'ailleurs. Ces drogues exigent une nouvelle approche.

Enfin, la population a modifié son attitude face aux toxicomanes. D'une part, elle s'est habituée quelque peu à certaines formes d'usage de drogue; d'autre part, elle considère de moins en moins la toxicomanie comme une excuse pour causer des dommages à des tiers. Sa tolérance à l'égard de la délinquance, des nuisances et autres comportements asociaux des toxicomanes a baissé. Une politique pragmatique comme celle des Pays-Bas en matière de drogue va naturellement de pair avec un degré élevé d'ouverture, de sens critique et de flexibilité. Il faut trouver des réponses adéquates, c'est-à-dire réalistes, aux problèmes et tendances nouvelles qui se manifestent. Dans le débat national sur les complications constatées dans le cadre de la politique en matière de drogue, plusieurs interlocuteurs ont plaidé pour la légalisation poussée, voire totale, de la vente des drogues tant douces que dures*. Le gouvernement a examiné l'opportunité et la faisabilité des propositions de légalisation et a abouti aux conclusions suivantes.

Conformément aux conceptions néerlandaises sur la nocivité des différents types de drogue, il faut, pour commencer, faire la distinction entre la légalisation éventuelle des drogues dures et celle des drogues douces. La nocivité des drogues dures implique qu'il y a des objections majeures contre tout changement de politique pouvant entraî ner une augmentation du nombre de consommateurs, ce en raison des dangers que cela représenterait pour la santé publique. Les partisans de la légalisation passent trop facilement outre à cet argument. Même si l'on n'a aucune certitude à ce sujet, il faut néanmoins craindre que la légalisation, quelles qu'en soient les modalités, augmentera la disponibilité de ces drogues et sera interprétée par les jeunes comme une preuve qu'elles ne sont pas aussi nocives.

On risque alors qu'un nombre plus grand de jeunes commencent à consommer des drogues dures et se retrouvent peu après dans un état de dépendance. Le gouvernement n'est pas disposé à prendre ce risque. Il existe d'autres contre-indications: après l'une ou l'autre forme de légalisation aux Pays-Bas, les prix des drogues dures sur les marchés licites et sur les marchés illicites qui subsisteront seront probablement de loin inférieurs à ceux pratiqués dans les pays voisins. Il est inévitable que pareille situation entraîne une intensification du narcotourisme, tant critiqué par les gouvernements des pays voisins et par les municipalités néerlandaises concernées. Les nuisances causées par les toxicomanes ne diminueront pas, mais augmenteront probablement.

Il faut craindre en outre que l'objectif d'une réduction du narcotrafic criminel grâce à la vente licite de drogues dures se révélera illusoire si les Pays-Bas sont le seul pays à opter pour la légalisation. Dans la situation actuelle, l'approvisionnement du marché national n'est qu'une des activités des grandes organisations criminelles. Tant que subsistera ailleurs en Europe un marché lucratif pour les drogues illicites, les Pays-Bas, par leur position centrale pour le transit, resteront confrontés au narcotrafic illicite des organisations criminelles néerlandaises et internationales, et à l'obligation de le combattre. Les avantages éventuels de la légalisation n'apparaîtront probablement qu'après que d'autres pays y auront procédé et, même dans ce cas, il est loin d'être certain que les organisations criminelles deviendront moins actives. Beaucoup d'entre elles se contenteront de transférer leurs activités vers d'autres secteurs. Le gouvernement rejette sans plus la légalisation des drogues dures.

S'agissant des drogues douces, les arguments de santé publique jouent également un rôle dans le débat, mais ils sont moins importants qu'en ce qui concerne les drogues dures. Il est apparu que la vente plus ou moins libre dans notre pays de doses de drogues douces pour l'usage personnel n'a pas entraîné de consommation nettement plus élevée que dans les pays appliquant une politique très répressive sur ce point. La différence réside dans le fait que, chez nous, le consommateur de cannabis, souvent un jeune, n'est pas criminalisé. Les effets de l'usage de cannabis sont moins nocifs que ceux des drogues dures. Néanmoins, l'usage de cannabis comporte aussi des risques, pouvant menacer en particulier les jeunes.

Il est évident d'établir ici un parallèle avec des substances comme la nicotine et l'alcool, parallèle qu'il faudra retrouver dans la politique. Nous essayons de réduire la consommation de nicotine et d'alcool par un certain degré de limitation de l'offre et par la dissuasion, entre autres par l'information, mais pas par une interdiction absolue. Nous n'estimons pas souhaitable de fermer tous les coffee shops, mais pas non plus de libéraliser entièrement la vente de cannabis. La politique consistera à décourager au maximum la consommation, par exemple en réduisant le nombre des coffee shops, en fixant des limites d'âge pour les acheteurs, en interdisant l'implantation de coffee shops à proximité des écoles et en intensifiant l'information sur les effets nocifs du cannabis. Sur cette toile de fond, il faudrait envisager plutôt un modèle dans lequel l'importation est placée sous le contrôle de l'État ou bien est soumise à une réglementation stricte. L'analogie avec l'ancien monopole de l'opium des pouvoirs publics aux Indes Néerlandaises s'impose à l'esprit. L'introduction d'un système quelconque d'autorisations pour la culture du cannabis présuppose la suppression de la pénalisation, c'est-à-dire la légalisation. Les autorités néerlandaises ne peuvent en effet pas donner d'autorisations pour commettre un délit ou y être elles-mêmes impliquées.

Comme l'explique l'annexe II au présent rapport, selon des spécialistes du droit pénal international, les conventions ratifiées par les Pays-Bas ne laissent aucune marge pour légaliser la vente de drogues à des fins récréatives. La Convention des Nations Unies de 1988, en particulier, oblige à pénaliser la culture de cannabis. Il a été convenu dans le cadre de l'Accord de Schengen que les conventions des Nations Unies sur les stupéfiants seraient intégralement respectées. Il ne faut pas attendre des parties aux conventions ni des institutions internationales concernées qu'elles donnent une interprétation coulante des obligations conventionnelles s'appliquant aux Pays- Bas. La légalisation obligerait les Pays-Bas à dénoncer non seulement ces conventions sur les stupéfiants, mais aussi l'Accord de Schengen qui exige le respect de ces conventions. L'introduction d'un système d'autorisations est impossible en raison des obligations conventionnelles en vigueur.

Il faut en outre tenir compte du fait qu'il sera inévitable que les pays voisins soient confrontés aux effets extérieurs d'une telle politique. Il y a par exemple lieu de craindre qu'une partie des importations réglementées ne disparaisse illégalement à l'étranger. La légalisation de la culture, du commerce et de la vente des drogues douces se solderait en outre par des prix encore plus bas sur le marché néerlandais, puisque le producteur ou vendeur ne courrait plus le risque de poursuites pénales, ce qui intensifierait le narcotourisme. Ce serait là une perspective peu alléchante, certainement pour les communes frontalières. Étant donné, à la fois, les obligations conventionnelles et la mobilité toujours croissante au sein de l'Union Européenne, il ne peut plus y avoir que de petits écarts entre les degrés de disponibilité des drogues dans les États membres.

Le débat sur la légalisation des drogues est donc devenu un débat intrinsèquement européen, qu'il faut mener aussi dans un cadre européen. Naturellement, les Pays-Bas peuvent, éventuellement en coopération avec quelques Länder allemands et compte tenu du rapport de la commission (française) Henrion, jouer un rôle actif dans ce débat européen. Le gouvernement continuera à oeuvrer en ce sens. Dans la situation actuelle, il estime toutefois qu'il n'est pas possible que les Pays-Bas procèdent seuls, contrairement à leurs voisins, à la légalisation de la vente de drogues douces. Mais il considère le moment venu de clarifier, dans le cadre des possibilités conventionnelles, les limites dans lesquelles les exploitants des coffee shops peuvent exercer leurs activités*. Les coffee shops ont prouvé leur raison d'être aux Pays-Bas au cours des deux dernières décennies et méritent maintenant une réglementation. Cela exige non seulement une précision de la directive du parquet concernant le dépistage et les poursuites des infractions à la loi sur l'opium, mais aussi l'élaboration de dispositions complémentaires de droit administratif*.

 

1.5. Conclusions

 

Il semble préférable d'améliorer la politique actuelle, qui a porté ses fruits sur le plan de la santé publique, plutôt que de procéder à des revirements radicaux, avec toutes les incertitudes qu'ils impliquent au niveau des avantages et des inconvénients. Dans les limites fixées par les conventions internationales, la politique néerlandaise en matière de drogue restera primairement axée sur la prévention et sur la réduction des risques (harm reduction). Le présent rapport propose des ajustements de la politique sur la base d'une évaluation précise des résultats obtenus et des problèmes actuels. Il faudra réduire effectivement à court terme les nuisances causées à la population par les toxicomanes néerlandais et étrangers. Cela nécessite une action coordonnée de al'Administration, du parquet, des organismes d'assistance, de la police et du service des étrangers. Il ne faudra pas hésiter à prendre des mesures sévères là où elles s'imposent.

Le développement du crime organisé forme une menace pour l'État de droit. L'État néerlandais continuera à le combattre par tous les moyens, notamment dans le cadre international, sans toutefois renier ses propres principes éthiques. Le dépistage et la poursuite juridiciaire du trafic de drogue restent la première priorité de la police et de la justice néerlandaises. L'aide aux toxicomanes devra être remaniée, en partie parce que les données du problème ont changé: vieillissement des héroïnomanes, apparition des designer-drugs.

Les chapitres qui suivent examineront successivement la politique en matière de consommation de drogues dures, les réformes à apporter à l'infrastructure d'aide aux toxicomanes, la politique en matière de drogues douces et l'application de la loi sur l'opium. Le rapport se termine par un bref résumé des principales conclusions et mesures envisagées.

 

2. La politique relative à l'usage de drogues dures

 

2.1 Ampleur et nature du problème

 

Comme nous l'avons déjà dit, le nombre des héroïnomanes aux Pays- Bas est estimé à quelque vingt-cinq mille. Si l'on y ajoute le nombre non négligeable de toxicomanes qui n'ont d'aucune manière affaire aux organismes d'aide ou à la justice, ce nombre atteint vingt-sept mille. Par rapport à d'autres pays européens et certainement aux États-Unis, ces estimations ne peuvent pas être qualifiées d'élevées (voir annexe I). Le sous-groupe des cocaïnomanes primaires a légèrement augmenté ces dernières années, mais reste petit*. Cela vaut aussi pour les usagers de formes de cocaïne meilleur marché. Environ 65 pour cent des toxicomanes sont en contact avec un organisme d'aide. Selon les estimations, trois quarts des héroïnomanes parmi ces clients reçoivent plus ou moins régulièrement un produit de substitution, la méthadone*.

La consommation de XTC (MDMA) parmi les élèves du secondaire a fortement augmenté ces dernières années. En 1992, 3,3 pour cent des élèves de 12 à 18 ans avaient une fois pris du XTC. La plus grande partie de cette consommation est occasionnelle et récréative*, mais elle est fréquente parmi des groupes spécifiques de jeunes vulnérables, comme les clients des organismes d'aide à la jeunesse*. L'usage de XTC peut entraîner pour la santé des dommages graves et aigus, tels que l'hyperthermie et la déshydratation, avec parfois même une issue fatale. L'XTC peut aussi porter gravement atteinte au foie et aux reins. Vu ces risques pour la santé, le XTC est classé parmi les drogues dures. D'autres designer-drugs moins connues peuvent aussi constituer une menace pour la santé publique. Les développements rapides dans le domaine des produits psycho-pharmaceutiques font que de nouvelles drogues apparaissent constamment sur le marché à des fins récréatives. Une évolution positive dans ce contexte est que les usagers adoptent toujours plus une attitude de consommateurs critiques qui veulent prendre un minimum de risques.

 

2.2. Politique relative à l'usage de XTC

 

La politique relative au XTC est exposée dans un rapport du ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports (Seconde Chambre, session 1993-1994, no 23760) et a été discutée avec la Commission permanente de la Chambre pour les questions de santé le 29 octobre 1994 et le 14 juin 1995. Dans ce rapport, le ministre exprime sa préoccupation devant l'évolution de la consommation de XTC et annonce plusieurs mesures. Il s'agit de mesures administratives, de mesures axées sur le suivi précis et critique de l'offre de drogues de synthèse, d'études sur la nocivité de ces drogues et d'intensification de l'information. Comme le XTC et les drogues apparentées sont souvent consommées au cours de house parties et d'autres grandes manifestations, le ministre a entre-temps dressé des lignes directrices pour la politique municipale à l'égard de ces événements (Stadhuis en House, 1995). Ce document expose les possibilités qu'ont les communes pour assortir de conditions l'octroi des autorisations, afin d'empêcher autant que possible l'usage de drogues et ses conséquences. S'agissant de surveiller le marché de la drogue, les systèmes actuels de suivi seront élargis. Des recherches complémentaires sur la nocivité des designer-drugs seront entamées sous peu. La propagation de l'usage de ces drogues nécessite une attitude vigilante et dynamique dans le domaine de l'information et de la prévention. Il faudra accroître à cet effet l'expertise des agents de prévention. En outre, plusieurs campagnes d'information seront lancées en automne. Voir le chapitre 3, paragraphe 2.

 

2.3. Criminalité, nuisances et toxicomanes

 

On a parfois l'impression que la majeure partie des nuisances et que le gros des vols et cambriolages - parfois qualifiés de criminalité d'acquisition - sont le fait de toxicomanes et que tous les toxicomanes assurent leur subsistance en commettant des faits punissables. Cette impression est loin d'être exacte. Une partie des délits contre le patrimoine doit être considérée comme criminalité occasionnelle. Une autre partie est commise par des adolescents mal insérés dans la société, mais qui ne sont pas nécessairement tous des toxicomanes, loin de là*. D'autres facteurs, comme la clandestinité*, la passion du jeu ou, plus généralement, un mode de vie axé sur le luxe et impossible à financer sur les ressources propres, sont tout autant des causes de criminalité dite d'acquisition. La part des toxicomanes dans la criminalité totale - donc y compris les crimes et délits non élucidés - est estimée entre 10 et 20 pour cent.

Comme le noyau criminellement actif des toxicomanes commet une multitude de délits (le taux de récidive est élevé) et agit parfois très ouvertement, ces personnes ont, proportionnellement, souvent affaire à la police et à la justice*. Leur taux plus élevé de récidive fait qu'elles sont nombreuses dans les statistiques des personnes soupçonnées de criminalité par la police et entraîne des peines privatives de liberté plus fréquentes et plus longues. Cela se traduit par le fait qu'actuellement la moitié environ de la population des détenus se compose de toxicomanes. Il ne faut toutefois pas en déduire que la moitié de tous les problèmes de criminalité est causée par la toxicomanie. Selon une étude récente, un tiers des délits patrimoniaux commis dans les grandes villes et élucidés par la police est imputable à des toxicomanes. Pour cinq délits fréquents dans cette catégorie, par exemple les cambriolages de maisons et de voitures, ce taux est même de 50 pour cent. Les proportions sont légèrement inférieures pour l'ensemble du pays.

Selon des études néerlandaises et étrangères, beaucoup de toxicomanes - jusqu'à la moitié selon certains experts - avaient déjà commis des délits avant même de se droguer*. Dans ce groupe, la criminalité et l'abus de drogue sont des éléments d'un mode de vie inadapté qui se renforcent mutuellement. Cela pourrait expliquer la constatation faite dans la pratique selon laquelle la fourniture de méthadone aux héroïnomanes n'entraîne pas en soi la fin de leur carrière criminelle. La part que prennent les toxicomanes dans la criminalité s'inscrit principalement dans la délinquance locale fréquente, celle des délits patrimoniaux, tels que le cambriolage, le vol à la roulotte et le vol avec violence, à la tire et à l'étalage (articles 310, 311, 312 du code pénal)*. Il s'y ajoutent, dans une moindre mesure, des actes de violence, comme les mauvais traitements, menaces et délits contre la vie, des infractions à la législation sur les armes et, dans une mesure encore moindre, des attentats à la pudeur, des infractions au code de la route et des délits économiques. Les actes de violence peuvent découler par exemple de la suppression des inhibitions du fait de la consommation de certaines substances.

Dans ce contexte, l'abus d'alcool constitue toutefois un facteur criminogène beaucoup plus important. En outre, il y a des toxicomanes qui sont revendeurs de drogue dans la rue. Les toxicomanes n'occupent pratiquement pas de postes importants dans la criminalité organisée/professionnelle impliquée dans le trafic de drogue. En ce qui concerne les nuisances, elles sont souvent imputées aux toxicomanes d'une manière trop généralisée et non nuancée, comme d'ailleurs les vols et cambriolages fréquents. Les sans domicile fixe, les alcooliques, les clandestins, les joueurs invétérés et les malades psychiatriques contribuent tout autant aux nuisances et aux sentiments d'insécurité dans beaucoup de villes. Les nuisances causées par les toxicomanes sont une partie, d'ailleurs importante, du problème plus vaste que posent les concentrations de groupes socialement marginalisés dans les grandes villes.*

Dans le cadre de la politique relative aux grandes villes, le secrétaire d'État à l'Intérieur, agissant aussi au nom des ministres des Affaires sociales et de l'Emploi, des Affaires économiques, de la Justice, du Logement, de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement et de la Santé, du Bien-être et des Sports, a conclu des arrangements, d'abord avec les quatre plus grandes villes, en vue d'une amélioration structurelle de la sécurité et de la qualité de la vie, en particulier dans les quartiers socialement les plus vulnérables. Des arrangements comparables seront également conclus avec les quinze autres grandes villes. L'État a réservé un montant total de 375 millions de florins pour les quatre années à venir en vue de l'exécution des plans dressés. Les fonds financeront notamment des projets intégraux axés sur l'insertion sociale des groupes de jeunes à risques et des projets spécifiques d'amélioration de la sécurité et de la qualité de la vie dans les quartiers. En outre, un montant de 560 millions de florins a été réservé pour un plan d'emplois dans le secteur de la surveillance. Le gouverneme nt a donné ainsi une forte impulsion à la prévention de la criminalité et des nuisances dans les grandes villes. On peut s'attendre à ce que les arrangements conclus avec les villes constitueront les fondements d'une action intégrale contre le problème de la dégradation du cadre de vie et celui des nuisances.

La criminalité et les nuisances causées par quelques milliers de toxicomanes extrêmement inadaptés et hautement récidivistes créent une situation inacceptable à laquelle il faut absolument s'attaquer d'une manière plus efficace. Comme il existe des possibilités réelles à cet effet, ou qu'il faut pouvoir en trouver, puisque le groupe cible n'est pas démesuré, le gouvernement estime de son devoir d'obtenir à court terme des résultats tangibles dans ce domaine. L'expérience acquise dans quelques villes montre qu'une politique axée sur le dépistage et la poursuite judiciaire du petit groupe de toxicomanes très actifs sur le plan criminel peut faire baisser considérablement les nuisances dues à la criminalité. Cette politique sera stimulée énergiquement. En outre, l'offre correspondante d'aide sera adaptée. Nous y reviendrons au chapitre 3, paragraphe 6.

 

2.4. Mesures administratives contre les nuisances

 

Pour réduire les nuisances et les délits patrimoniaux causés par les toxicomanes, les pouvoirs locaux, la police, le parquet et les organismes d'aide devront conditionner d'une façon cohérente le comportement des groupes de toxicomanes concernés. Un comportement socialement inadapté devra être sanctionné, et un comportement adapté devra, si possible, être récompensé. Dans le secteur urbain Westerpark à Amsterdam fonctionne depuis quelque temps une antenne pour le signalement de nuisances, qui a donné de bons résultats. Souvent, les plaintes pour nuisances ont pu être réglées par la médiation. Cette initiative sera étendue aux autres secteurs urbains de la capitale et mérite d'être reprise ailleurs. Notre action visera à promouvoir la création de telles antennes en d'autres endroits, en coopération étroite avec la police, les communes et les institutions d'aide aux toxicomanes. Ces antennes pourront aussi contribuer à la préparation collective des procédures judiciaires et à la fourniture de la preuve. Leur création permettra d'agir au besoin plus vite et d'une manière mieux coordonnée et de déterminer quels toxicomanes sont le plus responsables des nuisances.

Beaucoup de services distincts s'occupent de la lutte contre les nuisances. Cela exige une régie ferme et la suppression de chicanes bureaucratiques. Les quatre grandes villes ont proposé d'instituer avec la plupart des ministères concernés un groupe spécialisé dans les nuisances liées à la drogue, se composant de fonctionnaires ayant un vaste mandat. Ce groupe doit veiller à ce que les arrangements administratifs conclus soient exécutés d'une manière coordonnée et suivant un calendrier strict par tous les services concernés de l'État et des communes. Cette proposition de coopérer aussi, au besoin, au niveau de l'exécution cadre bien avec notre politique relative aux grandes villes; elle a d'ailleurs été mise en oeuvre depuis.

Ce groupe spécialisé, dont feront partie les ministères concernés, les quatre métropoles et en tout cas l'Union des communes néerlandaises comme représentante des autres communes, peut coïncider avec le groupe thématique de sécurité institué dans le cadre de la politique relative aux grandes villes. Il a pour mission de veiller à l'application non seulement des paragraphes des arrangements conclus avec les grandes villes relatifs à la sécurité, mais aussi des mesures envisagées et des accords sur la lutte contre les nuisances, consignés dans le présent rapport. Le groupe d'orientation pour la réduction des nuisances (SVO), institué en vue de la mise en oeuvre du rapport sur la politique de réduction des nuisances causées par les toxicomanes (Nota inzake het beleid gericht op het verminderen van door verslaafden veroorzaakte overlast (Seconde Chambre, session 1993-1994, 22684, no 12)) et qui se consacre en particulier à la réforme de l'aide aux toxicomanes, sera intégré dans le nouveau groupe qui s'appellera par conséquent équipe inter-administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes. Cette équipe instituera des groupes de travail pour l'exécution de tâches spécifiques et disposera d'un secrétariat.

 

2.5. Instruments juridiques

 

On peut s'attaquer aux nuisances découlant de la vente et de l'usage de drogue dans les rues en se basant sur les dispositions générales des arrêtés municipaux, par exemple les interdictions d'attroupement ou d'utiliser la voie publique à d'autres fins que celles pour lesquelles elle est prévue. Il faut limiter le recours à des pouvoirs exceptionnels aux cas où il y a effectivement une situation d'urgence, comme visée dans les articles 175 et 176 de la loi relative aux communes ( Gemeentewet). Nous renvoyons pour cela à la position adoptée par le gouvernement suite à l'examen des pouvoirs exceptionnels des communes, transmise par lettre du 21 mars 1995 du ministre de l'Intérieur au président de la commission parlementaire permanente de l'Intérieur. La vente de drogues (dures) à partir d'habitations gêne fortement les voisins. Il s'agit souvent d'appartements, dont les voisins sont confrontés à une affluence de toxicomanes, avec tous les phénomènes périphériques que cela implique et qui sont ressentis comme menaçants. Cette vente n'est pas toujours assurée par le locataire; celui-ci est parfois soumis à des pressions pour tolérer le trafic (et récompensé par de petites quantités de drogue pour son usage personnel); dans d'autres cas, il y a sous- location ou usage illicite des lieux.

Dans la mesure où ce sont des particuliers ou des sociétés de construction et de gestion de logements sociaux qui donnent en location, une procédure civile contre le locataire gênant est possible. Dans d'autres cas, si l'immeuble appartient à un trafiquant de drogue ou à un spéculateur qui ne s'intéresse pas à sa fonction d'habitation, cette procédure n'apportera pas de solution. Les poursuites pénales contre un revendeur n'empêcheront généralement pas un autre de continuer le trafic dans le même immeuble. Dans les quartiers précisément où la structure sociale s'affaiblit, le besoin se fait sentir d'enrayer tout début ou toute continuation de la dégradation de la situation, découlant du trafic de drogue à partir de logements. Dans les cas où les habitants signalent pareil phénomène et où l'enquête de police confirme la gravité des plaintes, il devrait y avoir compétence pour ordonner la fermeture temporaire d'un logement, jusqu'à ce que l'affluence des clients ait pris fin. À l'heure actuelle, les moyens à cet effet sont limités, parce que, en vertu de l'article 10 de la Constitution, tout logement doit rester accessible à ses habitants et aux membres de leur famille. La fermeture de logements dans les cas où elle est considérée comme souhaitable en raison de nuisances liées à la drogue doit être fondée, selon l'article 10 de la Constitution, sur une loi au sens formel*. C'est pourquoi nous préparons une modification de la loi relative aux communes, en vue de permettre la fermeture d'un logement. L'atteinte ainsi portée à la protection de la vie privée est justifiée par le besoin de lutter contre les nuisances liées à la drogue et par l'argument que les personnes qui autorisent le trafic de drogue dans leur habitation portent elles-mêmes gravement atteinte au caractère privé du logement.

 

2.6. Tourisme des drogues dures

 

Une partie des nuisances est causée par les toxicomanes étrangers séjournant illégalement aux Pays-Bas et par les narcotouristes des pays voisins, membres de l'UE. Des consommateurs de drogue viennent d'Allemagne, de Belgique, de France et d'autres pays aux Pays-Bas pour s'y approvisionner en drogues et/ou pour en consommer. Le tourisme de la drogue frappe différentes communes le long de la frontière orientale et méridionale, comme Arnhem, Venlo, Heerlen et Maastricht. Des villes situées plus à l'intérieur du pays y sont, elles aussi, confrontées. Certains consomment sur place la drogue achetée, d'autres en emportent au- delà de la frontière pour leur usage personnel ou pour des tiers. Le tourisme des drogues dures s'accompagne souvent de comportements agressifs de rabattage des clients par les intermédiaires de la drogue (runners) et de nuisances intolérables dans les quartiers d'habitation et les centres- ville. La lutte contre le tourisme de la drogue suivant l'itinéraire dit de Hazeldonk (Lille, Anvers, Rotterdam) s'effectue en collaboration avec les autorités françaises et belges. Les opérations visent tant les rabatteurs (runners) que les narcotouristes. Plus de 800 touristes et rabatteurs furent arrêtés en 1994. Les efforts déployés par la police néerlandaise représentèrent environ 35.200 heures-homme. Le rabattage sur des parties de l'autoroute en Belgique et aux Pays-Bas a diminué, mais le phénomène réclame une attention constante. Les actions d'interception accaparent une grande partie de la capacité carcérale.

Les interventions ont entraîné un déplacement des problèmes vers d'autres parties de la frontière et vers d'autres locaux. Le mode de voyage s'est lui aussi modifié: les intéressés font plus souvent usage du train. En 1995, les autorités de Rotterdam ont lancé sous le nom de code de "Victor" une offensive intégrale contre les nuisances liées à la drogue. Dans ce cadre, beaucoup d'immeubles furent fermés et quelques centaines de narcotouristes et rabatteurs étrangers furent arrêtés. Cette politique répressive pour décourager les narcotouristes étrangers sera poursuivie dans les années à venir. Une plus grande priorité sera donnée au dépistage et à la poursuite pénale des personnes tirant les ficelles sur les marchés locaux des consommateurs de drogues dures, c'est-à-dire des individus qui dirigent les rabatteurs et les revendeurs à domicile, etc. Des consultations ont été entamées entre les autorités judiciaires en Belgique et dans le nord de la France et des membres du parquet aux Pays-Bas en vue de l'élaboration d'une approche plus structurelle du problème, qui présuppose une bonne collaboration entre les services de police et de recherche. Il y a eu des échanges de magistrats et de fonctionnaires de police entre la France et les Pays-Bas et qui ont amélioré la coopération dans le domaine de la justice et de la police.

La politique vise à une meilleure harmonisation des efforts déployés dans ce cadre par la police des différentes régions à la frontière méridionale et orientale et, autant que possible, au transfert aux autorités étrangères concernées des poursuites pénales en matière de drogue contre les prévenus étrangers. Dans leurs consultations avec leurs voisins, les Pays-Bas insistent aussi sur l'aide aux toxicomanes et la prévention. Une concertation aura lieu sur les projets dits de contrainte et de dissuasion, afin que les toxicomanes délinquants originaires de l'étranger soient mis en mesure de suivre un traitement dans leur pays d'origine, comme mesure de substitution à la détention dans une prison néerlandaise. Comme la capacité d'accueil pour toxicomanes est faible, en particulier en France, il ne faut pas trop espérer à court terme. Dans le cadre du plan européen de lutte contre la drogue, les Pays-Bas ont présenté une proposition en vue de s'attaquer au narcotourisme. La Commission européenne a fait dans ce même cadre une proposition pour l'adoption d'un programme d'action communautaire pour la prévention de la toxicomanie*. Ce programme offre des possibilités pour améliorer l'aide aux toxicomanes au sein de l'UE.

Quand il s'agit de toxicomanes étrangers qui commettent des faits punissables, y compris les petits revendeurs et les rabatteurs, les mesures évidentes consistent à les dépister, poursuivre et juger ou à transférer les poursuites pénales à leur pays d'origine, ou encore à les expulser directement et, si possible, à les déclarer indésirables (art. 21 de la loi sur les étrangers (Vreemdelingenwet) ). Même à l'égard des citoyens de l'UE, qui ont un droit de séjour en vertu du droit communautaire et jouissent en général d'une protection spéciale contre l'expulsion, nous estimons que dans des cas urgents l'expulsion directe est autorisée (art. 100, õ 4, du décret sur les étrangers ( Vreemdelingenbesluit) ). Les narcotouristes des pays voisins, qui s'adonnent à la criminalité et troublent ainsi l'ordre public, doivent savoir qu'ils seront expulsés immédiatement en vertu de la loi sur les étrangers. Nous ne devons en aucun cas nous résigner à ce que les Pays-Bas deviennent un centre d'accueil pour héroïnomanes européens. Nous mettrons fin à l'exportation vers les Pays-Bas des problèmes étrangers liés à la drogue.

 

3. La prévention, l'aide et les soins aux toxicomanes

 

3.1. Nécessité de réformer l'infrastructure d'aide

 

Le nombre des personnes dépendantes des drogues dures est stable et relativement faible aux Pays-Bas (voir annexe I). L'âge moyen des héroïnomanes dépasse les 30 ans et continue d'augmenter*. Il n'y a donc pas lieu de supposer que la politique en matière de drogues douces a entraîné un fort accroissement du nombre de consommateurs de drogues dures. Le fait que, comme il ressort par exemple des données du service médical et sanitaire d'Amsterdam (GG&GD), les jeunes Néerlandais prennent rarement avant leurs 21 ans des drogues dures comme l'héroïne ou la cocaïne prouve plutôt le contraire*. Le fait qu'il n'y ait pratiquement pas aux Pays-Bas de jeunes consommant de l'héroïne ou de la cocaïne dès avant leurs 21 ans est particulièrement réjouissant, d'autant plus que l'expérience nous apprend que les chances de vaincre un jour la toxicomanie sont plus grandes si l'on ne commence à prendre des drogues dures qu'à un âge avancé. Entre-temps, l'infrastructure d'aide est confrontée à des changements.

Comme exposé plus haut, les nuisances causées par une partie des toxicomanes ont augmenté. Ensuite, l'infrastructure d'aide est confrontée à une variété toujours plus grande de groupes cibles extrêmement difficiles qui demandent une approche adaptée. Exemples: les toxicomanes malades mentaux, les toxicomanes à comportement criminel grave et/ou agressif, les sans domicile fixe et jeunes vagabonds toxicomanes, les toxicomanes allochtones et les consommateurs de plusieurs drogues. La caractéristique commune de ces groupes est que leur toxicomanie n'est pas une donnée indépendante, mais qu'elle est généralement liée à d'autres problèmes, comme les troubles psychiques, les problèmes de mode de vie et de santé et/ou une situation sociale défavorisée. Des maladies comme la tuberculose et des formes d'hépatite sont de plus en plus fréquentes parmi les toxicomanes. Enfin, beaucoup des toxicomanes appartenant à ces groupes cibles sont en mauvais état physique et psychique du fait de longues années d'usage de drogue, ce qui affaiblit leurs chances de guérison*.

La politique néerlandaise à l'égard des toxicomanes a eu longtemps pour fondement que ces personnes sont à considérer en fait comme des malades qui doivent être traités pour leur toxicomanie par des méthodes axées sur l'abstinence. Il y a toutefois peu d'évaluations d'envergure, réalisées sur une base scientifique, de l'efficacité de tels programmes de traitement à plus long terme. Des études révèlent que ce type d'intervention n'a qu'une influence restreinte sur le déroulement du processus de dépendance* *.

L'aide axée sur la limitation des dégâts pendant la période de toxicomanie, par contre, est plutôt efficace. L'état de santé des toxicomanes néerlandais est de ce fait relativement bon, ce qui se manifeste entre autres par l'existence d'un contingent toujours plus grand de toxicomanes plus âgés. Une partie des toxicomanes néerlandais est aussi assez bien intégrée dans la société. Les résultats décevants de certaines formes de traitement uniquement axées sur l'abstinence de drogue et l'apparition de nouveaux groupes de toxicomanes dont la toxicomanie fait souvent partie d'un problème plus vaste obligent à ajuster l'offre d'équipements de prévention et d'aide. Les réformes suivantes ont, aux yeux du gouvernement, la plus haute priorité :

réforme de la prévention;

meilleure harmonisation des différentes formes d'aide;

différenciation de l'offre de traitements en établissement;

meilleure correspondance entre les traitements en établissement et ambulatoires et les séjours

en prison (projets de contrainte et de dissuasion);

fourniture à titre expérimental d'héroïne sur indication médicale.

Ces réformes ont trait à l'aide et à la prévention ciblées sur l'ensemble de la population des toxicomanes et sur les groupes vulnérables qui risquent de le devenir. Dans ce cadre, le groupe des toxicomanes très difficiles - et souvent criminels - recevra l'attention requise. Le lecteur trouvera ci-après une brève explication de chacun de ces points de réforme.

 

3.2. Réforme de l'aide et prévention

 

La problématique de la drogue change constamment de nature, ce qui a des répercussions sur les activités d'aide, mais aussi sur la prévention. De nouvelles drogues, des modèles de consommation différents et de nouveaux groupes à risques exigent une prévention de qualité et une approche dynamique. La diffusion des substances du genre XTC nécessite par exemple d'autres attitudes et approches que celles des activités "traditionnelles" du passé. La prévention ne peut pas rester limitée aux groupes cibles traditionnels, comme les écoliers et, pour ce qui est de la prévention secondaire, les consommateurs d'héroïne. Les activités de prévention doivent être améliorées, pour réagir d'une façon plus adéquate aux changements. Les campagnes ne touchent pas suffisamment les nouveaux groupes à risques et les usagers cachés. Fait illustratif sur ce plan, ce sont souvent des organismes autres que les organismes traditionnels qui rendent visite aux jeunes fréquentant les discothèques, coffee shops et house parties et y consommant des drogues. On attend aussi des institutions traditionnelles qu'elles adoptent une attitude active à l'égard des nouveaux groupes de consommateurs et visitent les endroits où l'on consomme de la drogue.

Sur le plan de la prévention, l'insuffisance de matériel d'évaluation ne permet pas d'établir les résultats spécifiques des différents efforts déployés ces dernières années. Puisque le champ d'action de la prévention primaire et secondaire s'étend, il est indispensable de savoir quelles interventions sont efficaces et lesquelles ne le sont pas. Le gouvernement encouragera par conséquent la recherche sur l'efficacité de la prévention. Les mêmes remarques s'appliquent au suivi des changements dans la nature et l'ampleur de l'usage de drogue. Il faut absolument connaître ces changements pour pouvoir réagir d'une manière adéquate aux nouvelles tendances. L'exploration du marché par le biais d'un système de suivi est d'une grande importance pour l'oeuvre de prévention et pour le secteur de l'aide. Elle permet aux agents de la prévention de connaître mieux et plus vite les tendances sociales pouvant influer sur le problème de la drogue. Le suivi est aussi utile pour l'infrastructure d'aide, car il lui permet par exemple de développer à un stade précoce de nouvelles stratégies de limitation des dégâts. Nous avons réservé des fonds pour la mise en place d'un bon système de suivi.

Nous avons déjà conclu plus haut qu'il y a généralement un lien marqué entre l'usage de drogue s'accompagnant de gros problèmes et les situations sociales défavorisées. Pour pouvoir atteindre à un stade précoce les nouveaux groupes à risques, la prévention devra se voir accorder un champ d'action plus grand et s'intéresser davantage aux situations sociales défavorisées. Elle devra coopérer avec d'autres institutions, comme l'aide à la jeunesse, pour entrer en contact avec des groupes comme les jeunes vagabonds, les écoliers qui font l'école buissonnière et les jeunes marginaux allochtones et autochtones. La politique relative aux grandes villes prévoit une approche intégrale pour combattre les risques de marginalisation de grands groupes de jeunes citadins. Les grandes villes dresseront cette année avec le parquet et la police des programmes d'action concrets dans ce but. L'action devra se fonder sur l'approche dite par facettes, tenant autant que possible compte des différents aspects de la problématique. Nous renvoyons dans ce cadre au rapport sur la politique de santé publique 1995-1998 (Nota `Gezond en Wel, kader van het volksgezondheidsbeleid 1995-1998') (Seconde Chambre, session 1994-1995, no 24126) et au rapport sur la gestion de l'aide à la jeunesse (Nota `Regie in de Jeugdzorg')*.

En matière de toxicomanie, plus encore que dans d'autres domaines, il vaut mieux prévenir que guérir. La recherche scientifique montre que, parmi les jeunes, une connaissance suffisante des risques sur la base d'une information objective est le facteur préventif déterminant. L'Institut néerlandais de prévention de l'alcoolisme et de la toxicomanie (NIAD) déploie depuis plusieurs années déjà, en collaboration avec les services médicaux et sanitaires municipaux et le monde de l'enseignement, un grand nombre d'activités d'information axées sur les jeunes. Il est probable qu'une ligne téléphonique spéciale sera opérationnelle dès cet automne pour la diffusion d'informations sur l'alcool, les drogues, le tabac et les jeux de hasard. Nous veillerons à ce qu'une impulsion nouvelle soit donnée - notamment dans le cadre de l'approche intégrale de la problématique des jeunes dans les grandes villes, qui constitue un élément important de la politique relative aux grandes villes - à la diffusion dans les écoles d'informations réalistes et de qualité sur l'usage et l'abus d'alcool, de nicotine et de drogues, s'adressant aussi spécifiquement aux groupes à problèmes. Le bureau de consultation et d'aide aux alcooliques et aux toxicomanes (CAD) de Drente a par exemple, à la demande du parquet et à l'instar d'une initiative allemande fructueuse, produit des vidéoclips sur les risques de l'usage de drogue, qui peuvent être utilisés pour l'information dans les discothèques, etc. Il faudra également faire une meilleure utilisation des possibilités de donner des informations dans les coffee shops.

Pour parachever la prévention, il faudra punir de sanctions pénales sévères les trafiquants de drogue qui opèrent dans les écoles ou à proximité de celles-ci ou qui recourent à des élèves pour le faire. Le ministre de la Justice chargera le parquet d'en tenir compte dans sa politique de dépistage et de poursuites. La vente de drogues dures à des jeunes sera sanctionnée plus sévèrement. La diffusion de l'usage des designer-drugs ou drogues de synthèse comme le XTC, réclame une approche nouvelle. Du point de vue de la prévention, le problème est que ces drogues n'entrainent pas en général une dépendance physique, mais causent néanmoins dans certains cas des dommages graves à la santé. Un autre problème est la mise sur le marché de pilules de qualité inférieure. Les activités de suivi dont il est question plus haut porteront aussi sur la surveillance de la qualité de ces drogues. La politique vise en outre le développement de nouvelles techniques de communication. Un groupe de travail national prépare actuellement les activités dans ce domaine. On pourrait également accorder une attention accrue à la "prévention administrative". Nous avons déjà précisé que le ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports a envoyé récemment aux communes une notice contenant des lignes directrices pour l'élaboration d'une politique s'appliquant aux événements de grande envergure (Stadhuis en House, 1995).

Les institutions exécutantes, en particulier, signalent que leurs activités de prévention ne sont pas soutenues au niveau national par des campagnes d'information ni par des actions de promotion de l'expertise et d'innovation. Cette situation est indésirable, étant donné qu'on ne connaît pas suffisamment les chevauchements et les lacunes dans la prévention. On ne sait pas non plus dans quelle mesure l'aide aux toxicomanes prolonge les activités de la police et de la justice. Nous veillerons à court terme à créer les possibilités de mettre en place une cellule nationale de soutien à la qualité de la prévention, qui pourra répondre aux besoins signalés.

 

3.3. Meilleure harmonisation au sein du secteur de l'aide aux toxicomanes

 

La diversité des demandes d'aide et l'accroissement du nombre des groupes cibles font que l'offre d'aide ne doit plus se composer d'une série de services standard, mais doit être taillée sur mesure. Cela implique, essentiellement, que l'offre d'aide en général peu différenciée doit être remplacée par une offre adaptée à la demande, qui permette de s'intéresser aussi à des aspects comme le retard social, le logement, l'hébergement et les aptitudes sociales. Il faudra développer dans ce but des programmes d'aide aboutissant à un trajet individuel, avec un point de départ et une destination, entre lesquels tous les éléments dont peut se composer une demande d'aide retiendront l'attention requise. Cette façon de procéder permettrait de mieux éviter que les toxicomanes n'entrent en contact simultanément avec plusieurs organisations d'aide et de soins, sans aucune coordination. Cela signifie que si, pendant le trajet, on envoie les clients consulter d'autres établissements, on y transmet leurs données et on surveille s'ils se tiennent à ce qui a été convenu.

Par le biais des dossiers des clients, des enregistrements et compte rendus standard et des communications personnelles, les exécutants des différentes organisations doivent se tenir mutuellement informés. La gestion cas par cas est d'une importance essentielle dans de tels trajets intégraux d'aide. L'offre d'aide est articulée autour de deux notions clés: la responsabilité et la réciprocité. Les toxicomanes doivent accepter la responsabilité de leur propre comportement. La toxicomanie n'est pas une excuse pour les nuisances occasionnées à autrui. La notion de réciprocité signifie que l'on attend des toxicomanes que, en échange de l'aide reçue, ils respectent les engagements pris avec le service d'aide. Les programmes à mettre au point dans le cadre de la réforme de l'aide devront contribuer à réaliser ces objectifs. Si l'approche axée sur la demande donne lieu à un programme d'aide adapté aux besoins et aux souhaits individuels, les notions de responsabilité et de réciprocité auront plus de sens pour les clients. Il sera alors davantage possible de rappeler les toxicomanes leurs obligations à l'égard de la société, à titre de contrepartie raisonnable.

L'infrastructure d'aide ambulatoire aux toxicomanes assure une large part de l'application des programmes de méthadone. Grâce notamment à ces programmes, beaucoup de toxicomanes sont relativement bien insérés dans la société. Pourtant, dans de nombreux cas, ils ne sont pas suffisamment dirigés vers les établissements de traitement et les projets de formation, d'emploi et d'hébergement. La fourniture de méthadone, les programmes de traitement et les projets de réinsertion sociale doivent être complémentaires et il faudra mieux concrétiser cette complémentarité dans les années à venir. Une coordination plus poussée avec les autres institutions d'aide aux toxicomanes, les instances générales d'assistance sociale, y compris les agences de l'emploi, la police et la justice et, accessoirement, l'aide postpénale pourra fournir une contribution utile à cet objectif. L'équipe inter-administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes a pour mission d'y veiller.

 

3.4. Différenciation des soins en établissement

 

À l'exception de quelques lits pour les urgences dues aux surdoses (désintoxication de crise), les soins en établissement sont en majeure partie axés sur l'abstinence. Le problème, c'est qu'il existe différents groupes de toxicomanes qui ont besoin de soins en établissement, mais dont la situation fait que l'abstinence ne peut pas être considérée comme une option réaliste. Au moment où a lieu le placement, il est généralement question d'une situation d'urgence dans laquelle on ne peut guère faire de projets d'avenir fondés. Souvent, le seul besoin réel du drogué à ce moment-là est le repos et une possibilité de se remettre. Si, dans pareil cas, l'abstinence est fixée comme objectif, un nombre considérable de clients - la pratique l'a montré - arrêtent immédiatement le traitement ou l'interrompent à un stade précoce. C'est pourquoi les établissements de soins doivent eux aussi différencier davantage leur offre de traitements, au niveau des objectifs et des contenus.

Les établissements de soins devront donc proposer, outre les traitements visant l'abstinence, des programmes de traitement ayant des objectifs moins ambitieux, comme la stabilisation et l'amélioration de l'état de santé du client (toxicomane). Dans la pratique actuelle, le choix proposé au client consiste uniquement en différents programmes devant aboutir à l'abstinence, programmes qui sont généralement de longue durée. Les variantes de courte durée et à temps partiel, qui ne visent pas directement le rétablissement, mais la stabilisation et l'amélioration, sont fortement sous-représentées. Les premiers pas ont été faits pour l'institution d'un centre de motivation pour les soins en établissement (IMC) à Amsterdam. Son but premier est de créer un milieu de vie stable et sûr, à partir duquel on peut ensuite examiner quel traitement (en établissement ou ambulatoire) est indiqué pour le patient.

 

En développant des programmes adaptés, on augmente les chances de voir les groupes restés jusqu'à présent à l'écart de l'infrastructure d'aide, entrer en contact avec celle-ci et le rester. Ce d'autant plus si les établissements de soins s'intéressent effectivement dès le départ et plus qu'actuellement aux aspects de réinsertion sociale. Un exemple concret en est la réalisation, comme élément du trajet intégral d'aide, de projets expérimentaux dans le domaine du logement protégé, allant de pair avec des expériences de préparation au travail. Nous encouragerons l'infrastructure d'aide en établissement à lancer de tels projets axés sur la réinsertion sociale des toxicomanes.

 

3.5. Gestion et structure financière de l'aide ambulatoire aux toxicomanes

 

L'aide ambulatoire aux toxicomanes est principalement concentrée dans quelque 45 grandes communes. Jusqu'en 1994, son financement fut régi par le règlement intérimaire de financement de l'aide aux toxicomanes ( Tijdelijke Financieringsregeling Verslavingszorg - TFV), avec un budget de plus de 110 millions de florins. Élément caractéristique de ce règlement, le financement passait par 23 communes dites centrales. Celles-ci étaient tenues de concrétiser, dans leur région, la politique d'aide ambulatoire aux toxicomanes en concertation avec les autres communes intéressées. Le partage du budget régional entre les institutions et les communes concernées était garanti dans ce contexte. Cette gestion et cette structure financière en partie décentralisées ont fonctionné d'une manière satisfaisante.

Dans le cadre de la "rénovation sociale", l'aide ambulatoire aux toxicomanes est stipulée expressément dans la loi intérimaire sur l'encouragement de la rénovation sociale (Tijdelijke Wet Stimulering Sociale Vernieuwing - TWSSV). Le système des 23 communes centrales, décrit ci-dessus pour l'organisation de l'aide ambulatoire aux toxicomanes dans la région, a été préservé. On y a ajouté une obligation d'aide et d'information pour les communes intéressées, ainsi que la condition de procéder dans la région à une concertation adéquate avec les parties entrant en considération à cet effet. Vu le caractère temporaire de cette loi, il est prévu d'en transférer à compter de 1997 le budget total au Fonds des Communes. Comme il n'est pas possible de stipuler l'affectation des ressources fournies à ce Fonds, le budget de l'aide ambulatoire aux toxicomanes sera donc morcelé entre toutes les communes. Le lien existant actuellement encore entre la responsabilité administrative, l'obligation d'aider et le droit de disposer des finances nécessaires à cet effet est ainsi supprimé.

L'Association néerlandaise des institutions d'aide aux toxicomanes (NeVIV) et quelques municipalités ont attiré l'attention sur le risque de morcellement. Le gouvernement estime qu'il faut ancrer dans la loi l'obligation de coopération et d'information des communes en matière d'aide ambulatoire aux toxicomanes. Cela pourrait par exemple se faire par le biais d'une modification de la loi sur le bien-être (Welzijnswet ), notamment de l'article 12. En consultation avec les parties intéressées, nous cherchons comment élaborer avant 1997 une structure future de financement permettant, en essence, la poursuite de la méthode de travail actuelle. Il est crucial de préserver le lien entre la responsabilité administrative et la disponibilité du budget afférent. Le Fonds des Communes dispose d'un instrument pour accorder temporairement des ressources aux communes à des fins spécifiques. Les montants restent les mêmes, mais passent dorénavant par le Fonds. Cela peut durer au maximum quatre ans. Pendant cette période, les efforts porteront sur l'amélioration indispensable de la coopération régionale. Cette coopération permettra ensuite de répartir les ressources selon les normes générales.

 

3.6. Contrainte et dissuasion dans l'aide aux toxicomanes

 

Le rapport sur la réduction des nuisances liées à la drogue (Seconde Chambre, session 1992-1994, 22684, no 12) constitue la base de la politique amorcée. L'approche de la contrainte et de la dissuasion occupe ici une place centrale : une partie des toxicomanes justiciables doit opter pour, soit suivre un trajet d'encadrement et de traitement offrant des perspectives d'insertion sociale et de cessation de la carrière criminelle, soit subir la détention provisoire. Un groupe d'orientation interministériel pour la réduction des nuisances (SVO) a été institué en vue de la mise en oeuvre de la politique exposée dans le rapport susmentionné. En concertation avec les partenaires responsables dans les communes de la réduction des nuisances et de l'aide ambulatoire aux toxicomanes, le groupe d'orientation SVO a dressé des plans intégraux d'action. Ce sont en effet les communes qui assument la responsabilité première de l'élaboration de la politique locale. En 1994, neuf communes reçurent une contribution financière. La sélection d'au total 25 communes pouvant bénéficier à partir de 1995 d'une contribution financière s'est faite sur la base de la politique spécifique relative aux grandes villes. Un des critères pour bénéficier des fonds était que les communes devaient suivre une approche intégrale, s'intéressant à la fois à la prévention, à l'aide, à la détention et à la réinsertion sociale.

Il devait en outre être manifeste que les différents acteurs, tels que l'aide aux toxicomanes (ambulatoire et en établissement), la police, la justice, l'aide postpénale, les services municipaux et les établissements pénitentiaires, assument tous une responsabilité dans la réalisation de l'objectif, à savoir la réduction des nuisances. Des contributions sont aussi fournies à plusieurs initiatives nationales, comme le projet "Drang op Maat" de l'Association néerlandaise des institutions d'aide aux toxicomanes (NeVIV), l'extension du nombre des pensions sociales, l'extension des projets d'assistance précoce dans l'aide postpénale (projets VIP), le développement de peines de substitution pour toxicomanes, l'accroissement du nombre de sections sans drogue dans les établissements pénitentiaires et la fondation d'une clinique légale de désintoxication. Cette clinique spéciale, qui comportera une phase fermée et une phase ouverte, ouvrira probablement ses portes début 1996. Elle aura pour groupe cible des justiciables toxicomanes que l'on peut traiter, mais dont la nature de la toxicomanie, la gravité des faits punissables commis, la structure de la personnalité et les antécédents en matière de traitement sont tels que le placement dans un établissement de soins ouvert n'est pas indiqué. Le traitement dans la clinique commence donc par une phase fermée, dont la durée varie selon les clients. Après cette phase fermée, le client passe à la phase ouverte, qui se déroule dans une communauté de vie et de travail en milieu rural. Il s'agit d'un nouvel équipement de soins aux toxicomanes, qui sera lancé à titre expérimental; il faudra un certain temps pour en mettre au point la forme définitive. C'est pourquoi le démarrage dans la phase fermée se fera à petite échelle. À la longue, la clinique comportera au maximum 70 places.

Conformément aux estimations du rapport sur la réduction des nuisances liées à la drogue, le gouvernement augmentera de 12,5 millions de florins le budget 1996 du groupe d'orientation interministériel pour la réduction des nuisances (SVO). Comme dit plus haut, ce groupe d'orientation sera intégré, avec l'équipe sur les nuisances liées à la drogue, dans l'équipe inter- administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes. Le gouvernement accorde une grande importance à l'extension de la capacité d'accueil dans le cadre des projets de contrainte et de dissuasion. Les 200 cellules supplémentaires à régime simple qui seront en majeure partie disponibles cette année - les cellules dites de Wallage - sont réservées aux quatre métropoles dans le contexte de la politique relative aux grandes villes. Les projets de contrainte pour toxicomanes exigent encore plus de cellules d'un autre type. En concertation avec le parquet, 500 des cellules supplémentaires prêtes en 1996 seront réservées à la détention de toxicomanes ayant commis des délits graves. Il y aura ainsi une capacité supplémentaire suffisante pour cette catégorie.

Dans le cadre du plan d'action Détention pratique (Werkzame Detentie), des sections sans drogue, au régime adapté, ont été créées dans les établissements pénitentiaires. Leur capacité est de 300 places environ. Une extension à 620 places au total est prévue en 1997. Cela devrait permettre aux toxicomanes motivés de séjourner pendant des parties de leur détention dans ces sections et de se préparer activement à un traitement effectif et à leur redressement social. Le détenu sort d'une de ces sections soit pour être placé dans un établissement de soins en vertu de l'application de l'article 47 du règlement relatif aux établissements pénitentiaires (Gevangenismaatregel), soit parce que sa détention a pris fin; il peut alors bénéficier de l'encadrement de l'aide aux toxicomanes et/ou de l'aide postpénale. La mesure pénale de placement des toxicomanes Les projets actuels de contrainte et de dissuasion sont conçus pour les toxicomanes ayant commis des délits plutôt graves. À leur sortie de l'établissement pénitentiaire, ils sont généralement placés dans une clinique de désintoxication.

La pratique nous apprend cependant que, pour beaucoup de toxicomanes, la recherche de l'abstinence à court terme est un objectif peu réaliste et qu'il vaudrait mieux chercher à améliorer leur mode de vie et leur insertion sociale. Il existe dans ce but des formes ambulatoires d'assistance qui insistent sur la nécessité de suivre une formation et d'avoir l'expérience du travail. À Dordrecht et à Bois-le-Duc, par exemple, on a obtenu de bons résultats en offrant, à des conditions strictes, une formation et du travail à des délinquants commettant systématiquement des délits, dont des toxicomanes*.

Des entretiens ont eu lieu avec les quatre grandes villes sur la possibilité de proposer à titre expérimental à des toxicomanes ayant commis des séries de délits mineurs de participer à certaines formes de placement en cadre fermé. Le maximum que l'on peut attendre de beaucoup de ces personnes à court terme est qu'elles adaptent en partie leur mode de vie. Ceci est possible par le placement dans un cadre d'accueil fermé, où l'on oeuvre en vue de leur réinsertion sociale par le biais de formations et de l'acquisition d'expérience du travail. Le fondement juridique de ces nouvelles formes de placement de toxicomanes criminels posant des problèmes peut consister, provisoirement, en la suspension de la détention préventive à des conditions particulières. Les toxicomanes se trouvent alors, sur une base de volontariat, dans un cadre fermé qui remplace le séjour en maison d'arrêt ou en prison. S'ils abandonnent le programme avant terme, ils sont arrêtés et (ré) incarcérés. La commune sera responsable de l'offre d'équipements d'aide, de formation et de stage, tant pendant le placement que par la suite. Dans la situation idéale, il y aurait aussi des perspectives d'emploi à la fin du trajet. C'est pourquoi le ministère des Affaires sociales et de l'Emploi participe à la préparation de l'expérience.

La construction dont on dispose pour le placement des toxicomanes en tant que condition de la suspension d'une détention préventive n'est pas idéale. Le placement remplace une peine privative de liberté relativement courte et ne peut donc être que de courte durée. Il est souhaitable de créer des possibilités pour le placement forcé de toxicomanes qui causent des nuisances importantes, par exemple parce qu'ils commettent en série des délits mineurs et/ou ont un comportement agressif. Il faut créer dans ce but un fondement juridique spécifique. Le ministre de la Justice présentera de ce fait un projet de loi pour l'introduction de la mesure pénale de placement des toxicomanes, en partie par analogie avec l'ancien placement de vagabonds, mendiants et souteneurs dans un établissement de travail de l'État, en vertu de l'article 432 du code pénal.

Le placement des toxicomanes qui continuent à commettre régulièrement des délits n'est pas justifié par la gravité des faits commis isolément; elle réside d'une part dans les nuisances que cause leur délinquance à la société et, d'autre part, dans l'intérêt que présente pour la personne droguée l'offre intégrée d'aide et de formation dans un cadre fermé. La durée maximale du placement dépassera de ce fait la durée habituelle de la sanction pour les délits patrimoniaux, et s'élèvera par exemple au minimum à trois mois et au maximum à un ou deux ans. Les municipalités des quatre villes se sont déclarées disposées à collaborer à la réalisation d'une ou de plusieurs expériences. Un inventaire sera dressé à très court terme pour déterminer par exemple l'ampleur exacte du groupe cible. Les communes de Rotterdam et d'Amsterdam ont déclaré vouloir participer au financement des expériences. Nous sommes, quant à nous, disposés à y affecter des fonds provenant du budget de la politique relative aux grandes villes.

Il a été convenu avec les grandes villes que l'équipe inter- administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes instituera un groupe de travail conjoint, chargé de dresser l'inventaire, puis de préparer et d'encadrer une ou plusieurs expériences. L'objectif est de démarrer dès 1996 une expérience à Rotterdam pour une centaine de toxicomanes occasionnant des nuisances. L'équipe inter-administrations fera des propositions pour l'extension des expériences à 300 places au moins, dont en tout cas 100 seront mises à la disposition d'Amsterdam. Étant donné, notamment, la faible ampleur de la catégorie des récidivistes très actifs par ville, nous attendons de l'extension de l'application des projets de contrainte et de dissuasion, combinée à l'extension de la capacité carcérale normale, qu'elle aboutira à une réduction notable des nuisances occasionnées par les toxicomanes criminels posant des problèmes.

 

3.7. Fourniture d'héroïne sur indication médicale

 

Le problème des toxicomanes en état de déchéance extrême, parfois gravement malades, est d'une tout autre nature. La présence constante d'un tel groupe de drogués nécessite de nouvelles méthodes d'intervention. Le besoin s'en fait sentir précisément aux Pays-Bas, où l'âge moyen des toxicomanes est relativement élevé. Dans ce contexte, on plaide tant pour les placements et traitements forcés dans les cliniques sur indication médicale que pour les traitements forcés dans les prisons, où les intéressés sont enfermés pour actes criminels liés à la drogue. Selon les experts, le placement dans les cliniques au titre de la loi sur l'internement dans les hôpitaux psychiatriques (Wet Bijzondere Opneming in Psychiatrische Ziekenhuizen - BOPZ) n'est possible que pour un très petit groupe de toxicomanes. La toxicomanie en soi n'est pas une maladie mentale. La plupart des drogués ne peuvent pas être qualifiés valablement de malades mentaux. Cependant, le groupe le plus déchu comprend un nombre relativement élevé de patients psychiatriques. Mais il est difficile, voire impossible de traiter les malades mentaux qui sont depuis longtemps des toxicomanes profonds. Les possibilités de faire subir un traitement à un nombre plus grand de toxicomanes dans les cliniques fermées sont donc très limitées. L'ampleur et la nature des délits qu'ils commettent et donc les nuisances criminelles causées, ne sont pas à ce point graves qu'il faille les placer dans une clinique légale de désintoxication ou leur imposer un projet de contrainte et de dissuasion.

Le 7 juin 1995, le vice-président du Conseil de la Santé ( Gezondheidsraad) a présenté au ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports un avis partiel concernant la prescription d'héroïne à des toxicomanes. Ce document a été porté à la connaissance de la Seconde Chambre. La commission Médications en cas de Toxicomanie, qui a rédigé l'avis, conclut que, puisqu'on ne dispose pas de données scientifiques suffisantes sur l'efficacité ou la nocivité de la prescription d'héroïne sur indication médicale à une quelconque catégorie de la population actuelle d'héroïnomanes, il est souhaitable de faire de la recherche sur ce point aux Pays-Bas, à l'aide d'une expérience médico-scientifique. La commission estime qu'entrent en ligne de compte pour prendre part à cette expérience "les héroïnomanes à dépendance grave, qui ne réagissent pas ou insuffisamment aux médications qui leur sont proposées actuellement". À ses yeux, la durée de l'état de dépendance n'est pas d'un intérêt déterminant. La condition est toutefois que les clients potentiels aient participé à plusieurs reprises et sans succès à des programmes de traitement visant, par la médication, à éviter la rechute et à assurer la stabilisation.

Le but d'une telle expérience est d'examiner s'il est possible, en prescrivant de l'héroïne, de stabiliser cette catégorie de toxicomanes, d'améliorer leur bien-être physique et psychosocial, de réduire leur recours à des doses complémentaires de drogue et, éventuellement, de les motiver pour mettre fin à leur toxicomanie. La commission conseille de comparer la médication à examiner - la fourniture d'héroïne - à celle qui est la plus courante actuellement, la distribution de méthadone par voie orale. L'héroïne à prescrire peut au besoin être combinée avec de la méthadone. L'expérience devra porter, selon la commission, sur de l'héroïne tant injectable que non injectable. Cela implique que le plan de recherche devra permettre de tenir compte, lors de l'interprétation des résultats, des différences entre le mode d'administration de la substance et des différences entre l'euphorie due à ces modes d'administration. L'expérience doit évidemment satisfaire aux conditions fixées à toute bonne recherche clinique.

La commission recommande d'effectuer l'expérience proposée dans les établissements d'aide existants. On pourrait envisager de faire de la recherche en plusieurs endroits à la fois, et pas seulement dans les grandes villes; il est alors en principe possible que les comptes rendus divergent sur certains points. Pour des raisons de gestion des données, il faut éviter qu'il y ait un trop grand nombre d'endroits. L'évaluation scientifique de l'expérience doit être exécutée par un institut de recherche indépendant. La commission estime souhaitable de soumettre le rapport de recherche non seulement à une commission d'éthique médicale, mais aussi à un groupe international d'experts. Vu l'importance de la recherche et la nécessité d'une bonne coordination, la commission conseille en outre d'instituer un comité national d'encadrement.

La commission déconseille de laisser les drogués emporter l'héroïne prescrite. Elle insiste en outre sur le fait que l'arrêt de la prescription d'héroïne à la fin de l'expérience peut soulever des problèmes. Selon elle, il est apparu que les problèmes de ce genre peuvent être largement évités si l'on conclut avec chaque participant à l'expérience un contrat précisant, outre l'objectif et la durée de l'expérience, les droits, obligations et responsabilités tant du patient que du service traitant. La commission recommande aussi d'étudier les possibilités que peuvent offrir d'autres opiacés euphorisants dans le traitement des héroïnomanes, en particulier les substances qui sont disponibles sous une forme d'administration pratique ou qui peuvent le devenir.

Nous partageons la conception de la commission, selon laquelle il est souhaitable de faire une expérience médico-scientifique sur l'efficacité et la nocivité de la prescription d'héroïne à des héroïnomanes, puisque les données scientifiques disponibles sont insuffisantes. Nous pouvons en principe aussi accepter le groupe cible proposé par la commission pour une telle expérience: "les héroïnomanes à dépendance grave, qui ne réagissent pas ou insuffisamment aux médications qui leur sont proposées actuellement". Compte tenu de l'attrait que la participation à l'expérience exercera sans nul doute sur les toxicomanes, nous estimons que l'intervention devrait rester réservée en premier lieu aux patients plus âgés, ayant un long passé de toxicomanie et dont la situation psychosociale est sans perspectives. Sur ce plan, nous nous écartons donc du point de vue de la commission, qui n'estime pas la durée de la toxicomanie comme un élément déterminant.

Nous souscrivons également au but d'une telle expérience, qui est d'examiner s'il est possible, en prescrivant de l'héroïne, de stabiliser cette catégorie de toxicomanes, d'améliorer leur bien- être physique et psychosocial, de réduire leur recours à des doses complémentaires de drogue et, éventuellement, de les motiver pour mettre fin à leur toxicomanie. Les trois aspects du bien-être - physique, psychique et social - ont, entre eux, des liens fonctionnels; pour les mesurer, il faut pour chacun de ces aspects des points de mesure objectivables. La multiplicité des facteurs qui influeront sur le résultat du traitement - la commission cite dans ce contexte la médication à examiner, le dosage et le mode d'administration, la personne du médecin traitant, le cadre du traitement, le rituel du traitement, les espérances et intentions du médecin traitant, les espérances et la réceptivité du patient et, surtout, l'interaction qui s'établit entre ces deux personnes dans le courant du processus de traitement - explique en partie l'avis de la commission, selon lequel l'expérience devrait être menée en plusieurs endroits, avec la participation en chacun d'eux de plus de cent patients.

Nous considérons qu'une période d'essai est nécessaire pour pouvoir répondre aux questions pratiques d'ordre médical et organisationnel et pour faire une meilleure estimation des coûts. Elle est aussi nécessaire pour élaborer un schéma réaliste de rapport de recherche et le mettre à l'essai pour voir s'il convient. Il s'agit en l'occurrence d'une étude préalable, portant sur au maximum 50 toxicomanes. On pourrait prévoir à cet effet une période initiale de six mois qu'il faudrait clôturer par une évaluation, suivie d'une nouvelle période de six mois de comptes rendus médicaux stricts. L'évaluation de ceux-ci doit ensuite permettre d'arrêter la forme définitive à prendre par les rapports sur l'expérience médico-scientifique à exécuter. Des patients appartenant aux groupes indiqués ci-dessus devraient participer à l'étude préalable, étant entendu que les critères de sélection doivent être établis soigneusement. La fourniture d'héroïne a, nous l'avons dit, pour but d'améliorer l'état physique et psychosocial du drogué. Les mesures envisagées n'ont pas pour but de réduire les nuisances causées aux tiers. Il faudra pourtant s'intéresser aux aspects de nuisance et de criminalité, tant dans le rapport sur les données à réunir que dans l'étude d'évaluation. Il est stipulé d'avance que la fourniture aux toxicomanes détenus pour avoir commis des délits ne peut pas se poursuivre.

Le ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports tiendra des consultations avec les municipalités ayant déjà présenté des propositions pour la fourniture d'héroïne, afin de déterminer où pourra s'effectuer l'étude préalable susvisée. Après cette étude préalable et si les résultats sont positifs, une décision sera prise sur l'expérience médico-scientifique proprement dite. Le point de départ est qu'il doit y avoir un type de cofinancement pour compenser les frais supplémentaires, comme le coût des préparations d'héroïne et celui de la rédaction des rapports médicaux et de l'évaluation. L'exécution pourrait être placée sous la responsabilité organisationnelle primaire des services médicaux et sanitaires des communes. Le ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports a demandé l'avis en la matière de l'inspecteur principal général des soins de santé.

Pendant la période d'essai et pour la durée de l'expérience médico-scientifique, les applications thérapeutiques expérimentales peuvent avoir lieu dans le cadre d'une autorisation décernée par le premier soussigné à des fins scientifiques au titre de l'article 6 de la loi sur l'opium (Opiumwet). La vérification intercollégiale des actes médicaux concernés peut aussi être prévue dans ce cadre. La supervision devrait être assurée par le Service national de contrôle de la santé publique (Staatstoezicht op de Volksgezondheid), qui pourrait, par ses rapports annuels d'inspection, présenter au ministre de la Santé et à la Seconde Chambre un compte rendu d'appréciation des constatations faites. Entre-temps, on pourrait examiner si les expériences en cours actuellement en Suisse avec la fourniture d'héroïne, qui sont notamment évaluées par l'Organisation Mondiale de la Santé, donnent des résultats présentant de l'intérêt pour la politique à mener aux Pays-Bas. En ce moment, on administre en Suisse de l'héroïne à 700 toxicomanes. Jusqu'à présent, les constatations seraient en majeure partie positives. Le Service national de contrôle de la santé publique a été prié de suivre le déroulement de ces projets et de faire le moment venu son rapport au ministre de la Santé. Ce rapport sera porté à la connaissance de la Seconde Chambre. En vertu de l'article 12 rapproché de l'article 19 de la Convention unique sur les stupéfiants, il faudra donner des explications à l'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) à Vienne, afin de pouvoir porter l'estimation actuelle de l'usage d'héroïne au niveau requis pour la réalisation des plans de fourniture. Cela signifie que ce niveau devra être déterminé en concertation par les services médicaux exécutants et le Service national de contrôle de la santé publique.

Indépendamment de ce qui précède, la commission conseille de rendre plus facile à réaliser dans la pratique le traitement palliatif à l'héroïne ou aux opiacés euphorisants équivalents à l'héroïne des patients gravement malades, héroïnomanes depuis longtemps et en permanence, qui n'ont plus que peu de temps à vivre. La commission ne sous-tend pas cette recommandation par un exposé des difficultés techniques qui se posent. C'est pourquoi nous avons demandé au Service national de contrôle de mener une enquête sur ce point et de faire des propositions pour faciliter l'exécution de cette recommandation. La disponibilité de médicaments contenant de l'héroïne pose en tout cas un problème ici, puisqu'ils ne sont pas enregistrés aux Pays-Bas. Les critères de sélection de ce groupe de patients devront être formulés avec précision. Le ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports est disposé à examiner cette dernière partie de l'avis, puis à en discuter avec la Seconde Chambre.

 

3.8. Garantie de qualité et évaluation

 

L'offre d'équipements préventifs et curatifs doit d'une part être renouvelée en permanence pour faire face aux nouveaux problèmes et questions soulevés, mais doit d'autre part rester budgétairement maîtrisable. Il faut constamment faire des choix dans l'offre totale. L'élaboration de la politique dans ce domaine requiert absolument une bonne connaissance du ratio coûts-avantages des différentes interventions. On a, jusqu'à présent, trop peu examiné l'efficacité des soins en établissement et des soins ambulatoires aux Pays-Bas. Dans le cadre de la réforme de l'aide et de la politique relative aux grandes villes, une attention accrue ira au suivi et à l'évaluation. Le développement de systèmes nationaux d'enregistrement et l'insertion dans les rapports annuels des institutions d'un nombre plus grand d'informations statistiques sur les clients traités, sur ceux qui abandonnent le traitement et sur ceux qui l'achèvent, ainsi que sur leur carrière sociale ultérieure, fourniront déjà une contribution importante en ce sens. Les études d'évaluation des mesures préventives sont, elles aussi, trop peu systématiques, et le ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports veillera à les stimuler.

Les premiers pas ont été faits en vue de l'amélioration de la qualité de l'aide aux toxicomanes. Il s'agit notamment de l'élaboration d'un cadre de vérification, de l'amorce de programmes de fixation de normes pour les produits et d'une enquête sur le taux de satisfaction à l'égard des services. La Fondation Scénarios prospectifs des soins de santé ( Stichting Toekomstscenario's Gezondheidszorg) a été chargée de dresser également des scénarios prospectifs pour les problèmes relatifs à la toxicomanie*. Ici aussi, le contexte européen de ces problèmes retiendra l'attention.

 

4. La politique relative aux drogues douces et aux coffee shops

 

4.1. Ampleur et nature de l'usage de cannabis

 

La décriminalisation de la possession de drogues douces en 1976 n'entraîna pas une hausse de la consommation. On constata une stabilisation du niveau de consommation dans les premières années suivant la modification de la loi sur l'opium (Opiumwet)*. Selon des chiffres pour l'ensemble du pays, la consommation a augmenté à nouveau légèrement dans la période 1984-1994. On constate la même fluctuation ailleurs*. Aux États- Unis, la hausse fut même forte ces dernières années*. Sur le plan tant du volume que des tendances, la consommation de drogues douces aux Pays-Bas ne diverge pas fort de celle dans d'autres pays. Elle semble déterminée en premier lieu par des modes au sein de la culture internationale des jeunes et par d'autres facteurs autonomes, comme le taux de chômage de longue durée des jeunes. L'influence de la politique gouvernementale en matière de drogue et du taux de disponibilité de drogue qui en découle est limitée.

L'Institut néerlandais de prévention de l'alcoolisme et de la toxicomanie (Nederlands Instituut voor Alcohol en Drugs - NIAD) estime à 675.000 le nombre total de personnes prenant régulièrement du cannabis aux Pays- Bas*. Le nombre des usagers de drogues douces a donc augmenté, après une baisse dans les années soixante-dix. Le modèle de consommation dominant a un caractère récréatif. Cependant, l'usage de cannabis est particulièrement élevé et intensif parmi des groupes spécifiques de jeunes, comme ceux qui manquent chroniquement l'école et les vagabonds. La politique suivie aux Pays-Bas n'a donc apparemment pas entraîné d'augmentation de l'usage. Il semblerait cependant, selon certaines indications, que la liberté d'accès aux coffee shops contribue à ce que certains usagers consomment pendant plus longtemps*.

Les chiffres de prévalence - chiffres portant sur le volume de la consommation dans certains groupes de la population - ne donnent guère d'informations sur les aspects de l'usage faisant problème. Les effets du cannabis ont été traités dans de nombreux ouvrages scientifiques. Son effet principal est d'agir sur l'humeur, la lucidité et la mémoire. Les effets dépendent du dosage et du mode de consommation. Les effets euphorisants, de calme et de détente - pour lesquels le cannabis est prescrit à des fins médicinales aux États-Unis par exemple - s'accompagnent d'une réduction du pouvoir de concentration, de la vigilance et du fonctionnement de la mémoire*.

La toxicité physique du cannabis est faible. Il n'y a ni surdoses mortelles ni dépendance physique. Une dépendance psychique peut survenir, mais elle n'est pas comparable, sur le plan de la fréquence et de l'intensité, avec la dépendance psychique qui découle de la consommation d'héroïne, de cocaïne, d'alcool et de nicotine. Le cannabis rend moins agressif que l'alcool. L'usage de cannabis n'est pas nécessairement un tremplin vers les drogues dures. Le nombre d'incidents dus à un surdosage extrême reste limité à quelques dizaines par an. Le traitement de ces cas est simple et peut, la plupart du temps, se limiter à placer l'usager dans un environnement propre à la détente et, au besoin, à lui administrer un calmant. Le nombre de personnes s'adressant aux bureaux de consultation et d'aide aux alcooliques et aux toxicomanes (CAD) est plus élevé ces dernières années. En 1993, 1.749 personnes étaient inscrites dans un de ces bureaux pour des problèmes liés à la consommation de cannabis. Cela représente trois pour cent du nombre total des clients inscrits dans les centres d'aide aux toxicomanes. Il s'agirait approximativement d'un ou deux pour cent des usagers intensifs de cannabis, c'est-à-dire de ceux qui prennent du cannabis dix fois ou plus par mois.

Les faits et conditions de consommation tels qu'on les connaît actuellement font conclure que le contrôle social permet de gérer les risques, tant individuels que sociaux, de l'usage de cannabis. Ces risques ne peuvent pas, en soi, être qualifiés d'"inacceptables", ce contrairement aux risques liés à la consommation de drogues dures, comme l'héroïne. Pourtant, la prudence s'impose à l'égard de l'usage de cannabis. Celui-ci est surtout populaire chez les jeunes, c'est-à-dire chez des personnes se trouvant dans une phase de la vie où l'on explore activement les risques. La société exerce sur l'adolescent pour qu'il soit performant à l'école et au travail de grandes pressions en raison des critères de formation de plus en plus poussés qu'exige le monde du travail. Par ailleurs, les perspectives d'un emploi fixe, avec le statut social et les relations que cela implique, sont incertaines pour certains groupes. Dans ce contexte, les risques d'usage excessif de cannabis sont plus grands.

L'effet du cannabis sur les élèves mérite une attention particulière. Il est avéré que la consommation occasionnelle de cannabis soulève peu de problèmes, mais que la consommation quotidienne gêne l'obtention de bons résultats à l'école. Il serait souhaitable de mieux connaître les constatations faites dans les écoles sur la consommation de drogues douces par les élèves. Le problème, c'est que la direction et les conseils d'administration des écoles se taisent par crainte pour la réputation de leur établissement, et que les parents et éducateurs veulent protéger la vie privée des élèves concernés. Une plus grande ouverture s'impose. En complément aux activités existantes, on cherchera à réunir davantage d'informations sur l'ampleur et la nature des problèmes liés à l'usage de cannabis parmi les élèves et sur l'efficacité des mesures correctives et préventives appliquées. L'information sur les risques d'un usage fréquent de cannabis sera intensifiée.

 

4.2. Étendue du marché des drogues douces aux Pays-Bas

 

Plusieurs estimations ont été faites de l'étendue du marché national des drogues douces. Selon une estimation récente, la consommation annuelle des Néerlandais représenterait, environ 500 millions de florins. Le chiffre d'affaires intérieur total, y compris la vente aux touristes de la drogue, représenterait quelque 800 millions (valeur à la consommation). Ces débouchés ont offert des possibilités au crime organisé*. La moitié du cannabis consommé se compose de sortes de haschisch provenant d'Asie, du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord et d'un petit volume de marihuana, originaire surtout de Colombie. Près des trois quarts sont du haschisch marocain; il semblerait qu'une part importante du haschisch importé soit réexportée. Le mode de gestion de ces organisations d'exportation, souvent dirigées par des Néerlandais, est très professionnel et axé sur la continuité.

En 1994, les autorités ont saisi plus de 43 tonnes de haschisch et près de 195 tonnes de marihuana. Le nombre total de plantes de nederwiet, la variété de chanvre indien cultivée aux Pays-Bas, trouvées et détruites a atteint 558.000. On a pu déterminer que plusieurs des lots de cannabis saisis à l'étranger étaient destinés aux Pays-Bas. Malgré ces succès des autorités, l'approvisionnement du marché intérieur est resté souple, comme si rien ne s'était produit. La part de marché du nederwiet représenterait déjà la moitié de la consommation intérieure totale de drogues douces. L'expertise traditionnelle des Néerlandais dans le domaine des techniques horticoles et d'amélioration des végétaux a contribué à la conquête de cette part de marché. Le nederwietest un produit de qualité et est de ce fait surtout populaire parmi les jeunes. Les chiffres d'affaires annuels liés à l'importation, à la vente intérieure, à la (ré)exportation et au commerce de transit des drogues douces s'élèveraient, ensemble, à quelque 6,5 milliards de florins. Enfin, il convient de signaler que des Néerlandais participent aussi, ailleurs dans le monde, au trafic de drogue, en particulier de drogues douces*. Cette dernière activité est primairement du ressort de la justice dans les pays concernés.

 

4.3. Régulation des coffee shops

 

La vente de petites quantités de drogues douces, à l'origine uniquement autorisée dans les maisons des jeunes, est progressivement tombée aussi, dans de grandes parties du pays, entre les mains d'exploitants commerciaux. La vente au détail de drogues douces a de ce fait pris son envol dans de nombreuses communes dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix. Comme nous l'avons souligné dans notre introduction, les coffee shops ont prouvé qu'ils pouvaient contribuer à la séparation souhaitée entre le marché de détail des drogues douces et celui des drogues dures. Le nombre de ces établissements, en soi utiles, et les nuisances occasionnées par leurs clients se sont toutefois multipliés. De plus, une partie d'entre eux se trouve sous l'influence d'organisations criminelles.

Dans certaines communes, les voisins des coffee shops se plaignent des nuisances causées par les clients qui traînent alentour, par la pollution et par l'intensité de la circulation*. Il est évident que les coffee shops installés dans le centre des villes font moins l'objet de plaintes de cette nature que ceux implantés dans les quartiers d'habitation. Les nuisances sont surtout constatées dans les communes frontalières, en raison de la clientèle étrangère qui a souvent un comportement agressif et d'intimidation.

Beaucoup de critiques concernent l'implantation de coffee shops à proximité d'écoles et d'établissements pour jeunes. Il arrive aussi que l'on se plaigne de la vente de drogues dures dans les coffee shops ou tout près. Cette vente de drogues dures est diamétralement opposée à la politique gouvernementale, telle qu'elle est consignée dans la directive du ministère public sur les coffee shops d'octobre 1994. Le parquet agira plus sévèrement dans ces cas. Les fortes concentrations de coffee shops dans certaines communes non seulement sont source de nuisances, mais aussi poussent à la vente des drogues dures. Vu ces concentrations, le produit du commerce des drogues douces est trop faible pour une exploitation rentable. Les fortes concentrations sont donc aussi indésirables pour cette raison. L'assertion de certains informateurs étrangers selon laquelle on peut aussi, en règle générale, acheter des drogues dures dans les coffee shops néerlandais est d'ailleurs fausse*.

La politique en matière de poursuites pénales - telle qu'elle est formulée dans la directive arrêtée en octobre 1994 par les procureurs généraux concernant la politique des recherches s'appliquant aux coffee shops (Journal officiel (Staatscourant) 1994, no 203) - vise à étayer la politique fixée par la concertation tripartite locale en matière de coffee shops. À des conditions strictes - pas d'affichage, pas de vente de drogues dures, pas de nuisances, pas de vente à des jeunes de moins de 18 ans et pas de vente de plus de trente grammes par transaction par personne - il n'y a pas de poursuites pénales contre les personnes qui vendent des drogues douces dans des établissements du secteur des hôtels, restaurants et cafés ne servant pas d'alcool. Le principe est que seuls les établissements ne vendant pas d'alcool peuvent bénéficier de cette exception.

Malgré la directive du parquet, il existe encore une grande diversité de locaux vendant des drogues douces. Le coffee shop au sens strict est un café qui ne vend pas d'alcool et n'a pas de machines à sous. Dans la pratique, il y a aussi vente de drogues douces dans des cafés ordinaires, des vidéothèques, des centres de fitness et des logements privés. Le nombre de ces points de vente illicites est estimé à 900. Le nombre de coffee shops au sens strict dans le pays se situe vraisemblablement entre 1100 et 1200. Les coffee shops présentent des caractères divers: grands établissements dans les villes, axés sur la vente massive, coffee shops de quartier ou pour jeunes, où les habitués jouent au baby-foot, locaux glauques, etc. Partout, l'aspect commercial a pris le dessus. La vente pour des motifs idéologiques ne se pratique plus que dans quelques communes.

Dans beaucoup de communes, les municipalités cherchent, en collaboration avec la police et la justice, à assainir et à mieux contrôler le phénomène du coffee shop. En d'autres termes, la politique de tolérance est affinée. Les communes sont à des stades différents de formulation et d'application d'une nouvelle politique en matière de coffee shops. Beaucoup d'entre elles veulent réduire d'une façon draconienne dans les années à venir le nombre des coffee shops, par exemple à la moitié du nombre actuel. Nous soutenons leurs efforts, notamment parce qu'ils rendront mieux maîtrisable le phénomène du coffee shop. Avec les instruments administratifs dont ils disposent, les pouvoir locaux peuvent, s'ils les utilisent avec consistance, combattre une large part des nuisances causées par l'usage et le trafic de drogues douces et éviter l'implantation de coffee shops à proximité des écoles ou dans les rues où un tel établissement n'est pas souhaitable en raison de la circulation ou de leur fonction résidentielle*.

L'implantation peut être réglementée sur la base d'arrêtés concernant les nuisances, du décret d'application à l'industrie hôtelière de la loi relative aux établissements dangereux, insalubres et incommodes, d'arrêtés municipaux concernant les hôtels, restaurants et cafés ne vendant pas d'alcool, de règlements généraux de police et d'arrêtés en matière d'environnement. Par le biais d'un plan d'occupation des sols, les communes peuvent éviter l'implantation de coffee shops en des endroits inacceptables (près d'écoles, de clubs de jeunes, de centres de quartier). L'exploitation peut être réglementée à l'aide de mesures prises par analogie avec la loi sur les boissons alcoolisées et les hôtels, restaurants et cafés, par le biais du règlement général de police et d'arrêtés municipaux concernant les hôtels, restaurants et cafés ne vendant pas d'alcool. Dans certaines communes, des accords ont en outre été conclus avec les exploitants de coffee shops.

Les instruments énumérés ci-dessus permettent d'arriver à la fixation de normes claires pour les coffee shops. Ensuite, les normes municipales doivent évidemment être respectées et les autorités doivent effectivement intervenir s'il y a vente de drogues douces hors du circuit des coffee shops. Cela réclame des accords concrets entre la municipalité, le parquet et la police au sein de la concertation tripartite. Les objectifs de cette politique sont de mettre fin à la vente de drogues douces dans les cafés servant de l'alcool et de réglementer strictement les coffee shops pour ce qui est de l'emplacement, des heures d'ouverture, de l'aménagement, des toilettes, des places de stationnement et des nuisances sonores.

Quant à savoir si des nuisances se produiront, il est évident que cela dépendra de l'attrait qu'exerce l'établissement sur les éléments criminels. C'est pourquoi il est important de pouvoir fixer des critères concernant les qualités et les antécédents de celui qui exploite le coffee shop. C'est possible en vertu d'un arrêté municipal concernant les hôtels, restaurants et cafés ne vendant pas d'alcool, par analogie avec le règlement pris au titre de la loi sur les boissons alcoolisées et les hôtels, restaurants et cafés et le décret sur les règles de moralité, pris en vertu de cette loi. Nous examinons entre-temps, en consultation avec l'Union des communes néerlandaises, s'il est possible de mettre au point des dispositions modèles en la matière. Le but n'est pas seulement de consigner un certain nombre de critères de qualité, mais aussi de prévoir le moyen de refuser l'autorisation, le cas échéant le permis de nuisance, si le gérant ou l'exploitant concerné a un passé criminel ou sert d'homme de paille à une organisation criminelle.

Lors de la révision générale de la loi sur les boissons alcoolisées et les hôtels, restaurants et cafés, nous rechercherons, notamment dans le cadre de la prévention administrative du crime organisé, le moyen d'augmenter pour les municipalités les possibilités de refus ou de retrait de telles autorisations. En élaborant ces dispositions, nous veillerons à éviter les effets négatifs sur l'image de marque des autres établissements du secteur.

La politique intégrale administrative et judiciaire de régulation des coffee shops, esquissée ici, ne signifie pas qu'une commune soit obligée de tolérer sur son territoire la présence d'un ou de plusieurs points de vente. Une municipalité peut décider de n'autoriser aucun coffee shop. Cette décision exige évidemment des consultations préalables dans le cadre de la concertation tripartite avec le chef du corps de police et le procureur de la reine. S'il existe une demande locale réelle de cannabis, cette décision comporte le risque que les jeunes deviennent dépendants du circuit criminel pour en acheter. En outre, la vente se déplace alors ailleurs, dans des maisons, des cafés ou dans la rue, avec des effets secondaires soulevant des problèmes. Avant de prendre une décision, il faut voir si l'on est capable de la faire respecter. C'est pourquoi la plupart des communes préfèrent tolérer quelques points de vente relativement sûrs. Le gouvernement soutient cette ligne de conduite, à condition que les normes que l'on décide de fixer s'accompagnent de mesures adéquates de contrôle de leur respect. Si la concertation tripartite retient l'option zéro, le parquet entamera des poursuites pénales contre les coffee shops existants, même si pour le reste ils respectent les règles.

Une politique claire de mise en oeuvre des dispositions implique qu'il faut du personnel pour surveiller et contrôler les autorisations et le respect de la directive du parquet et des arrêtés municipaux. Toute infraction aux normes fixées doit être sanctionnée. Nous demanderons au ministère public et aux communes d'y veiller scrupuleusement. Le contrôle strict des limites imposées est une condition essentielle à l'assainissement et à la régulation des coffee shops. Le gouvernement rappelle dans ce contexte l'accroissement des effectifs de police décidé dans l'accord gouvernemental. Selon toute vraisemblance, les efforts de surveillance et de contrôle pourront diminuer à nouveau, une fois atteint le niveau d'assainissement souhaité.

Les exploitants des coffee shops doivent payer des impôts sur leurs revenus et ils sont donc imposés. Les mouvements financiers correspondant aux chiffres d'affaires réels des coffee shops qui respectent les conditions posées par la justice ne comptent pas parmi les transactions inhabituelles au sens de la loi sur le bureau de signalement des transactions financières inhabituelles. Nous estimons qu'une approche cohérente est d'une grande importance pour la politique locale de lutte contre les nuisances liées aux coffee shops. L'équipe inter-administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes instituera un bureau d'expertise ayant pour tâche d'assister les communes, la police et le parquet dans l'application d'une combinaison de moyens de droit administratif et de droit pénal en vue de la régulation des coffee shops et de développer plus avant les instruments de droit administratif. Ce bureau pourra aussi émettre des avis sur la politique municipale relative à d'autres aspects des problèmes liés à la drogue.

 

4.4. Coffee shops et criminalité organisée

 

Un coffee shop bien assorti propose un choix de plusieurs sortes de marihuana, de haschisch et de nederwiet. Selon les estimations, les ventes se composent actuellement pour plus de la moitié de nederwiet. L'exploitant du coffee shop s'approvisionne en partie auprès de grossistes ou de personnes ayant rapporté du cannabis et des produits du cannabis de leurs vacances. Avec le succès du nederwiet, certains exploitants de coffee shops se sont mis à en cultiver pour leur propre compte ou entretiennent des contacts avec différents petits cultivateurs à domicile, dont ils achètent la récolte. Ainsi, toute la chaîne de production et de vente peut rester à l'abri des organisations criminelles.

Les enquêtes judiciaires révèlent régulièrement l'existence d'organisations criminelles qui se consacrent à l'importation, à la culture, au commerce de gros et à la vente au détail de cannabis, ainsi qu'à l'exploitation de coffee shops et d'autres établissements du secteur des hôtels, restaurants et cafés. Ces organisations investissent dans des biens immobiliers et dans des entreprises licites, entre autres dans le secteur du sexe et celui des machines à sous. Dans les organisations de ce genre, les exploitants de coffee shops ne sont souvent pas plus que des hommes de paille. Selon certaines indications, des organisations criminelles s'adonneraient tant à la grande culture de nederwieten plein air et sous abri qu'à la petite culture professionnelle sous abri. Cependant, la culture de nederwiet n'est certainement pas dominée dans son ensemble par les organisations criminelles.

L'influence de la criminalité organisée est une pierre de touche importante dans l'appréciation de la politique relative aux coffee shops. On doit empêcher autant que possible la participation des organisations criminelles à l'approvisionnement des coffee shops en drogues douces, notamment parce qu'on veut garder le marché des drogues douces séparé de celui des drogues dures. En effet, si les coffee shops sont sous l'emprise d'organisations criminelles, le risque est grand qu'on y vende aussi des drogues dures et qu'on y exerce d'autres activités criminelles. Indépendamment de cela, il faut donner aux organisations criminelles le moins possible l'occasion de gagner de l'argent grâce à la vente tolérée de cannabis dans les coffee shops. Enrayer l'influence du crime organisé sur le secteur des coffee shops est un objectif important de notre politique. Nous préciserons au chapitre 5 du présent document la politique pénale s'appliquant à l'approvisionnement des coffee shops en drogues douces.

 

4.5. Narcotourisme et coffee shops

 

Dans les régions frontalières surtout, les coffee shops attirent des clients des pays voisins, ce qui irrite les autorités de ces pays, dont la politique en matière de drogue vise, du moins en théorie, à garder illicite la vente de cannabis, même de doses pour l'usage personnel. Les habitants des communes frontalières néerlandaises s'en trouvent fortement incommodés. Il a été proposé, pour résoudre le problème du tourisme de la drogue, d'interdire la vente aux étrangers en invoquant l'Accord de Schengen. Cependant, l'ordre de discriminer les acheteurs étrangers de cannabis par rapport aux acheteurs néerlandais pourrait ne pas être compatible avec la Constitution et serait difficile à faire respecter. Si la distinction est néanmoins imposée, les intéressés auront recours à des intermédiaires néerlandais.

La critique étrangère ne porte pas en premier lieu sur la consommation de cannabis sur place dans les coffee shops néerlandais, mais sur l'importation de quantités qui peuvent être considérées comme des stocks. Le critère des 30 grammes, qui marque la limite entre la contravention et le délit, a été emprunté lors de l'élaboration de la loi de 1976 sur l'opium à une législation applicable aux États-Unis et qui dépénalise la détention d'au maximum une "ounce" de cannabis. Cette norme a aussi été retenue parce qu'il s'agirait, pour les utilisateurs partageant leurs cigarettes avec d'autres, d'une quantité suffisante pour deux semaines environ. Les personnes détenant cette quantité pourraient encore tomber sous le régime des contraventions. Le risque que ce critère mène au développement d'un trafic d'ordre plus professionnel avait déjà été soulevé à la Seconde Chambre, lors de l'examen de la loi de 1976 sur l'opium.

Une quantité de 30 grammes de cannabis permet par exemple de rouler de 50 à 100 cigarettes (joints). Les clients moyens des coffee shops achètent des doses de 3 grammes maximum pour une valeur d'environ 25 florins. Certainement dans les zones frontalières, les quantités vendues à des étrangers dépassent quelques grammes, et il est pratiquement sûr qu'elles sont destinées à l'exportation. Les week-ends, dans beaucoup de communes, les deux tiers du chiffre d'affaires des coffee shops proviennent des ventes aux narcotouristes*. On a l'impression que les quantités saisies lors de l'arrestation de narcotouristes contrebandiers sont plus importantes depuis la suppression des contrôles aux frontières.

La pénalisation moins forte des quantités ne dépassant pas 30 grammes ne s'applique pas à l'importation ni à l'exportation. Les Pays-Bas n'ont jamais voulu que leur politique serve à ce que les coffee shops approvisionnent l'étranger. L'exportation de drogues douces est, quelle qu'en soit la quantité, un délit aux termes de la loi néerlandaise sur l'opium. Dans certains cas, la vente de drogues douces à un étranger ou à un intermédiaire néerlandais peut constituer, pour un exploitant de coffee shop, une complicité d'exportation, c'est-à-dire un délit, même s'il s'agit de quantités inférieures à 30 grammes.

La directive du parquet applique à la vente de cannabis par les coffee shops tolérés la norme légale d'au maximum 30 grammes, applicable à la possession d'une provision de cannabis pour l'usage personnel. Il nous semble que les nuisances constatées dans les zones frontalières et les critiques formulées à l'étranger sont des raisons suffisantes pour reconsidérer cette norme pour la vente. La vente autorisée dans les coffee shops sera limitée à 5 grammes par client. L'adaptation en ce sens de la directive du parquet ne portera pas atteinte à l'objectif central de la politique, qui est de protéger les consommateurs de drogues douces contre le milieu des drogues dures. Dans les quelques points de vente sans but lucratif, on ne vend déjà que des portions d'au maximum 3 ou 5 grammes. Les Néerlandais de 18 ans et plus, désireux de prendre des drogues douces, peuvent continuer à s'adresser pour cela aux coffee shops. Par ailleurs, le dépistage de la simple possession ou détention d'une quantité pour l'usage personnel d'au maximum 30 grammes n'est toujours pas prioritaire. Il deviendra plus difficile pour les visiteurs étrangers d'acheter une provision pour l'exportation. Cela découragera certainement les jeunes étrangers de venir.

Le contrôle du respect de la norme de 5 grammes pour la vente n'est, en soi, pas plus compliqué que celui de la norme actuelle de 30 grammes. On saura immédiatement quels shops vendent régulièrement des portions de plus de 5 grammes. Là où s'effectue déjà le contrôle pour les 30 grammes, le passage à la norme de 5 grammes ne réclamera pas des effectifs supplémentaires. Le contrôle du respect de la norme de 5 grammes fera partie des mesures plus strictes qui seront en tout cas appliquées en matière de respect des règles aux coffee shops subsistant après l'assainissement. Si le tourisme de la drogue ne diminue pas, il y aura périodiquement, pour souligner la politique nouvelle, des activités ciblées de dépistage de l'exportation par des touristes étrangers de stocks commerciaux de cannabis achetés dans les coffee shops ou ailleurs. Les autorités demanderont au besoin l'assistance des autorités de police à l'étranger, en invoquant les accords conclus à cet effet en 1990 dans le cadre de la Convention d'application de l'Accord de Schengen.

En fixant un nouveau plafond pour les portions de cannabis à vendre dans les coffee shops, les Pays-Bas satisfont à l'obligation acceptée dans l'acte final joint à la Convention d'application de Schengen de 1990 de prévenir autant que possible les effets transfrontaliers d'une politique nationale en matière de drogues douces qui serait divergente de celle des autres pays. Cette adaptation élimine une partie de la critique que soulèvent les coffee shops dans le pays et à l'étranger, sans compromettre leur fonction sociale primaire, la séparation du marché des consommateurs de drogues douces de celui des drogues dures. Le parquet intégrera cette norme dans sa directive et veillera à son respect. Un problème que rencontrent les exploitants de coffee shops est que la vente de petites quantités de drogues douces est tolérée, mais que la détention de l'indispensable stock commercial de ces drogues ne l'est pas. Ceci n'est pas un problème majeur dans la pratique juridictionnelle. La directive du ministère public sera adaptée en ce sens qu'il n'y aura pas de recherches ciblées si les exploitants de coffee shops respectent les conditions municipales et pénales et détiennent dans leur local une réserve d'au maximum quelques centaines de grammes.

 

5. L'application de la loi sur l'opium

 

5.1. Dépistage et poursuite du trafic de drogue

 

Héroïne

L'héroïne qu'on trouve aux Pays-Bas provient principalement de l'Asie du Sud-Ouest. On a constaté dans la plupart des cas l'implication d'organisations criminelles turques. La part des groupes chinois dans la contrebande d'héroïne est devenue plus faible. La contrebande s'effectue généralement par camion. Des pays d'Europe centrale et orientale jouent un rôle toujours plus grand dans le stockage et la distribution de l'héroïne. La contrebande se fait de plus en plus souvent dans des voitures particulières, à partir d'entrepôts dans ces pays. La collaboration entre les services de recherche européens dans la lutte contre la contrebande sur l'itinéraire des Balkans via l'Europe de l'Est et l'Allemagne ainsi que via la Grèce et l'Italie est bonne. Un agent de liaison néerlandais est en poste en Turquie.

Cocaïne

La cocaïne vendue aux Pays-Bas vient pour l'essentiel de la Colombie et du Venezuela. Plusieurs pays d'Amérique du Sud et d'Amérique centrale et la région des Caraïbes, dont les Antilles Néerlandaises et Aruba, jouent un rôle dans l'exportation. Des organisations colombiennes, souvent de Cali, assument la plupart des envois vers l'Europe. Pour la cocaïne également, les activités de pays d'Europe centrale et orientale s'intensifient.

Drogues de synthèse

Les Pays-Bas sont, depuis des années, un important pays producteur d'amphétamines*. 75 pour cent des amphétamines saisies en Allemagne au cours des premiers mois de 1994 provenaient des Pays-Bas. Ce pourcentage atteignit 90 pour cent pour les composés du type XTC. Les Pays-Bas ont été confrontés à des rejets illicites de déchets provenant de laboratoires de drogue. Un des laboratoires démantelés avait une capacité d'un demi-million environ de pilules de XTC par jour *. Le nombre des enquêtes menées contre des producteurs de stupéfiants synthétiques a augmenté ces dernières années. Une des cinq équipes centrales instituées pour le dépistage du crime organisé se consacre spécialement à la lutte contre la production et le commerce des drogues de synthèse.

 

5.2 Résultats des recherches

 

Les résultats obtenus aux Pays-Bas en matière de saisie de stupéfiants par la douane, la police et d'autres services de recherche ne sont pas inférieurs à ceux d'autres pays européens*.

Le tableau ci-après donne un aperçu comparé des drogues illicites saisies.

Tableau comparatif des drogues illicites saisies (1994)*

------------------------------------------------------------------------

NL

F

D

B

E

Héroïne (kg)

246

661

1.590

137

824

Cocaïne (kg)

8.200

4.743

767

479

3.899

Cannabis (kg)

238.258

58.014

25.694

59.904

219.195

Amphétamines (kg)

215

80

120

23

32

Drogues synth./ pilules (x1000)

Drogues synth./ pilules (x1000) 1433293061314

------------------------------------------------------------------------

Les quantités de drogue saisies ne constituent pas, il est vrai, un étalon pour évaluer l'intensité des recherches menées et les succès obtenus, mais les chiffres relatifs aux Pays-Bas montrent que la police et la douane y sont actives. Le développement de méthodes d'analyse pour un contrôle efficace par la douane des conteneurs, par exemple, qui arrivent dans les ports maritimes et des passagers atterrissant dans les aéroports, porte ses fruits. En 1994, les quantités de drogue saisies par la douane ont augmenté de 58 pour cent par rapport à l'année précédente. Pendant les sept premiers mois de 1995, les autorités ont à nouveau intercepté beaucoup de drogue que pendant la même période de 1994. Une concertation aura lieu avec les autorités des Antilles Néerlandaises pour voir si et comment le contrôle sur l'exportation de stupéfiants par les vols vers Schiphol peut être intensifié.

 

5.3. Rôle du crime organisé Pays-Bas

 

Selon les estimations de la police* basées sur les données des services de renseignements, une centaine d'organisations criminelles seraient actives aux Pays-Bas, dont 80 pour cent environ s'occupent en partie ou exclusivement de trafic de drogue*. Toujours selon la police, le volume du trafic de stupéfiants serait resté à peu près le même qu'en 1993. Depuis cette année, 33 groupes criminels hautement organisés, dont 27 faisaient le trafic de drogue, ont été démantelés. Au total, plus de 100 personnes considérées comme des cadres/dirigeants furent arrêtées. Cependant, de nouveaux groupes sont devenus actifs.

La moitié environ des communications reçues par le Bureau de signalement des transactions inhabituelles et considérées comme suspectes sont liées à la drogue*. Les organisations se composant principalement de Néerlandais sont surtout actives dans le trafic des drogues douces. La vente des drogues douces sur le marché néerlandais à la consommation représente un chiffre d'affaires estimé à 800 millions de florins, la moitié provenant du nederwiet. Des Néerlandais sont en outre impliqués dans le transit et le trafic international de drogues douces et de XTC; une part importante de ce trafic s'effectue entièrement hors des Pays-Bas. Sur la centaine de groupes criminels hautement organisés, les trois quarts en ont pour activité principale le trafic de drogues dures et près de la moitié le trafic de drogues douces (certains groupes ont plusieurs activités principales).

Plus de la moitié des groupes faisant essentiellement le trafic des drogues dures font aussi celui des drogues douces et la majeure partie des groupes actifs dans les drogues douces le sont aussi dans les drogues dures. La séparation des marchés, recherchée au niveau des consommateurs, n'existe donc guère au niveau du crime organisé. Criminalité organisée en Europe En raison de l'absence d'une définition univoque ou d'une liste de critères pour l'établissement d'un tel relevé, on ne dispose pas, dans l'Union Européenne, d'une vue d'ensemble de la criminalité organisée liée à la drogue ou autre. Au niveau national, les différences sont grandes pour ce qui est de la disponibilité de matériel statistique pertinent dans ce domaine. Les Pays-Bas, l'Italie, le Royaume-Uni et l'Allemagne sont en tête pour la description du phénomène, ce qui peut donner une image fausse. Dans le cadre de la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures au sein de l'UE, un groupe de travail cherche à développer, en attendant un système européen de collecte et d'analyse d'informations, une méthode utilisable pour évaluer la criminalité organisée dans l'Union. Les Pays-Bas jouent un rôle actif dans ce groupe de travail.

On peut constater, avec les réserves d'usage en raison des lacunes susmentionnées, que la criminalité organisée s'est solidement enracinée dans tous les pays et que le trafic et la contrebande de drogue restent des activités majeures des groupes criminels actifs dans l'Union. Dans beaucoup de cas, ces organisations opèrent au niveau international; elles ne se limitent pas non plus à un seul type de délit, mais sont impliquées dans tout un éventail d'activités criminelles. Citons en particulier le trafic d'individus et la prostitution, le trafic d'armes, l'extorsion, les actes de violence, le vol de véhicules et leur vente, les faux en écriture, la fraude CE, le traitement ou le rejet clandestin de déchets, la corruption, la fraude et le blanchiment d'argent, ainsi que l'intimidation, par exemple de la police et de témoins*.

Il existe des formes de coopération (internationale) entre groupes. Comme dit plus haut, il semble que la fonction centrale de notre pays dans le transport international de marchandises licites fournisse une infrastructure également utilisée pour l'importation et le transit de drogues illicites, ainsi que pour l'organisation de ces activités. Cet abus sera combattu activement dans les années à venir. Lutte pénale contre le trafic de drogue aux Pays-Bas Nous l'avons vu, la police, la douane et le parquet néerlandais mènent un combat acharné contre l'importation et le trafic de drogue. Ces dernières années, les agents des recherches, les douaniers et les procureurs de la reine ont déployé de gros efforts dans ce domaine. La nouvelle méthode de recherche basée sur l'analyse du crime est en plein développement aux Pays-Bas et donne lieu à la recherche systématique des organisations criminelles, à l'aide notamment des renseignements provenant du Bureau de signalement des transactions inhabituelles. En collaboration étroite avec le Service d'information et de recherche financières (FIOD), les autorités compétentes font un usage croissant des nouvelles possibilités légales pour dépister, geler et confisquer les fortunes obtenues d'une façon illicite. Cette approche n'est pas restée infructueuse, puisque les dirigeants d'une trentaine de groupements criminels hautement organisés ont été arrêtés ces deux dernières années.

Les activités de la police, de la douane et de la justice contribuent à ce que les drogues restent relativement chères pour les consommateurs et ne puissent pas être vendues ouvertement. En combinaison avec la séparation des marchés des drogues douces et dures, elles contribuent donc à réduire le nombre des personnes qui commencent à prendre des drogues dures. Comme le drogué doit faire de gros efforts pour se procurer l'argent nécessaire à l'achat de drogues dures, la lutte pénale contre le trafic contribue probablement aussi au sevrage d'une partie des toxicomanes plus âgés.

Aux Pays-Bas non plus, la répression du trafic de drogue n'a pas réduit durablement l'importation et l'offre de drogues dures. L'offre sur les marchés internationaux continue d'exister et les gains potentiels sont à ce point élevés que la place des dealers arrêtés et des organisations criminelles démantelées est immédiatement occupée par d'autres. Les perspectives de succès durables sont donc maigres. Par ailleurs, il faut se prémunir contre le danger de voir des réseaux nationaux et internationaux d'organisations criminelles acquérir progressivement une puissance économique et financière de plus en plus grande. Selon des estimations, le chiffre d'affaires annuel de la drogue dans le monde est de 500 milliards de florins*. Le problème de l'expansion du crime organisé actif notamment dans le narcotrafic existe dans de grandes parties du monde et retient toute l'attention des États membres des Nations Unies, comme on a pu le constater au cours des conférences de chefs de gouvernement et de ministres, tenues à Naples en 1994.

Le gouvernement participera activement dans les années à venir à la conscientisation et à la discussion de ce problème mondial, qui est parfois considéré par certains comme la conséquence inéluctable de l'interdiction pénale de la consommation de drogue. Il estime cependant erroné de croire, comme on le dit parfois, que le seul remède au problème de la drogue consisterait à légaliser entièrement toutes les drogues et qu'une politique différenciée et axée sur la maîtrise de la situation serait vaine. La lutte au niveau pénal et administratif contre la criminalité organisée, entre autres dans le contexte du trafic de drogue, sera poursuivie énergiquement.

 

5.4. Actualisation du plan de lutte contre le crime organisé

 

Pour une description de la lutte menée jusqu'à présent contre la criminalité organisée, nous renvoyons tout d'abord au rapport sur la criminalité organisée, sur son développement et sur le plan de lutte ( Nota "De georganiseerde criminaliteit in Nederland; dreigingsbeeld en plan van aanpak"), ainsi qu'aux rapports de suivi, dont le dernier fut envoyé à la Seconde Chambre le 16 mai 1995 (Seconde Chambre, session 1994-1995, 22838 no 14). Il ressort de ces rapports que le dépistage d'organisations criminelles par des équipes spécialisées commence à porter ses fruits. Une unité distincte a été créée au sein du parquet, chargée de coordonner la lutte policière et judiciaire contre le crime organisé et dirigée par un procureur principal, libéré dans ce but de ses autres fonctions.

L'équipe nationale de recherche, dont la formation a été annoncée, deviendra opérationnelle cette année. Elle se concentrera sur les enquêtes financières et sur la collaboration aux enquêtes entamées dans d'autres pays. Elle s'occupera donc surtout du dépistage des organisations criminelles opérant au niveau international. Il s'ensuit que les Pays-Bas pourront ainsi mieux prêter assistance aux enquêtes entamées à l'étranger sur le narcotrafic. Il est évident que les résultats et conclusions de l'enquête parlementaire codétermineront, s'il y a lieu, les décisions à prendre dans ce domaine. Une chose est certaine, le dépistage des organisations criminelles sera intensifié dans les prochaines années. Dès que les conclusions de l'enquête parlementaire seront connues, les ministres de la Justice et de l'Intérieur présenteront à la Chambre un plan actualisé de lutte contre le crime organisé.

Comme on le sait, les possibilités d'enquêtes financières ont été beaucoup élargies. Le gouvernement estime encourageante la collaboration du secteur bancaire, des entreprises et des professions libérales concernées dans la lutte contre le réinvestissement du produit du crime. Grâce notamment aux activités de la Plateforme nationale de lutte contre la criminalité (Nationaal Platform Criminaliteitsbeheersing) - un cadre de coopération entre les entreprises, les professions libérales et l'É tat, présidé par le ministre de la Justice -, on constate manifestement une plus grande vigilance et résistance à l'égard de l'infiltration sournoise par des organisations criminelles. Quelques municipalités prennent des mesures pour réduire au minimum les chances des organisations criminelles. Le plan actualisé de lutte s'intéressera largement à la répression du crime organisé au niveau administratif.

 

5.5. Coopération internationale dans la lutte contre la drogue

 

Le trafic illicite de stupéfiants a un caractère international. En effet, les pays producteurs et consommateurs sont disséminés dans le monde entier et les trafiquants sont constamment à la recherche de nouveaux débouchés. La mise au point et l'entretien des filières nécessitent le recrutement constant d'"employés", non seulement dans les pays producteurs et consommateurs, mais aussi dans les pays de transit. Si, dans la lutte contre ce trafic illicite entre pays producteurs et consommateurs, l'accent porte sur la détection des filières, l'interception des transports et le dépistage des courriers, dans les pays consommateurs, il porte plutôt sur le démantèlement de toute l'organisation. Ces activités ne seront couronnées de succès que si les services nationaux des recherches dans les pays concernés collaborent d'une manière intense et efficace.

La nécessité de coopérer existe depuis pas mal de temps et s'exprime dans des conventions conclues spécialement pour prévenir et combattre le trafic illicite. Au niveau mondial, les fondements juridiques sont consignés dans trois conventions des Nations Unies, à savoir la Convention unique sur les stupéfiants de 1961, telle que modifiée par le protocole de 1972, la Convention sur les substances psychotropes de 1971 et la Convention contre le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes de 1988. Vu leur caractère mondial et leur taux élevé de ratification, ces conventions forment une bonne base pour la coopération judiciaire en matière pénale entre les pays producteurs et consommateurs. S'agissant de la coopération entre pays consommateurs, on se sert également de ces instruments juridiques, mais il est apparu qu'elle est plus efficace si l'on élabore des règlements complémentaires.

C'est ainsi que fut conclu dans le cadre du Conseil de l'Europe l'Accord mettant en oeuvre l'article 17 de la Convention des Nations Unies de 1988 - qui prévoit un règlement de coopération pour les interventions hors des eaux territoriales contre les navires des Parties qui s'adonnent à la contrebande de drogue - et que fut intégré dans la Convention d'application de Schengen un chapitre distinct consacré aux stupéfiants. De plus, le Traité sur l'Union Européenne contient des dispositions relatives à la lutte contre le trafic illicite de drogue; on a d'ailleurs, dans le cadre de l'UE, déployé plusieurs activités complémentaires, comme l'élaboration de règlements et de directives concernant les précurseurs et la création de l'Unité "Drogue" Europol, comme premier pas vers Europol.

Le cas échéant, des conventions sont conclues au niveau bilatéral. Ainsi, le Royaume des Pays-Bas a conclu en 1989 avec le Venezuela une convention en vue de la répression de l'abus, du trafic illicite et de la production illicite de stupéfiants, de substances psychotropes et des substances chimiques connexes. Si l'on ajoute ces règlements spécifiques au réseau des conventions générales de coopération internationale en matière pénale (extradition, entraide judiciaire en matière pénale, transfert des poursuites pénales et reprise de l'exécution des jugements, confiscation des produits du crime), ainsi que les conventions d'entraide administrative dans le domaine douanier, en vigueur aux Pays-Bas et dans les pays voisins, on peut dire qu'il existe un ensemble impressionnant d'instruments juridiques pour la recherche internationale et la poursuite pénale des délits liés à la drogue et des groupements organisés transnationaux de trafic de drogue, opérant dans ces pays. Il n'est donc pas primordial de compléter cet ensemble d'instruments conventionnels.

Ce qui est souhaitable, c'est d'augmenter l'efficacité de la coopération internationale. On peut le faire en procédant à une analyse approfondie des aspects transfrontaliers du trafic de drogue et des organisations impliquées. Il importe en outre d'établir et d'entretenir des réseaux internationaux de police, de douane et de justice, afin que la coordination des recherches et des poursuites se déroule effectivement d'une manière efficace et conforme au droit national de chacun et qu'il soit fait un usage optimal des instruments qu'offrent les conventions existantes. L'intensification de la coopération en Europe se traduit par un nombre croissant de demandes d'entraide judiciaire pour la recherche et la poursuite pénale de délits liés à la drogue. Cela oblige à simplifier les procédures internationales et nationales. L'entrée en vigueur de la Convention d'application de l'Accord de Schengen a beaucoup simplifié nombre de procédures entre les États membres, entre autres parce que la police et le parquet de chacun d'eux peuvent échanger directement leurs demandes.

Aux Pays-Bas, l'accroissement du nombre de demandes nous a fait comprendre qu'il faut améliorer la qualité du traitement des demandes par la police, le parquet et le ministère de la Justice. Puisque les demandes ne sont plus un phénomène occasionnel, mais permanent, il est indispensable d'organiser structurellement le traitement des demandes par toutes les parties en cause. Les procédures sont ou seront optimalisées au moyen de l'automatisation, tant au ministère de la Justice qu'au sein du parquet et de la police. Il est prévu de procéder aussi à une harmonisation et à l'échange d'informations. Comme dit plus haut, une équipe nationale de recherche sera bientôt opérationnelle dans le domaine de la police.

La loi sur la prévention de l'abus des produits chimiques (Wet Voorkoming Misbruik Chemicaliën), entrée en vigueur le 1er juillet 1995, vise à éviter le détournement de substances chimiques pour la production illicite de stupéfiants. Elle contient des règles concernant la fabrication et le commerce des précurseurs, qui sont d'ailleurs utilisés à raison de 90 pour cent environ d'une manière légale. Par cette loi, les Pays-Bas satisfont aux obligations découlant de la Convention de 1988 contre le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes, ainsi que des règlements et de la directive CEE, basés sur cette convention. En cas d'infraction à la loi, le coupable peut se voir infliger non seulement une peine privative de liberté et une amende, mais aussi la confiscation de ses avantages financiers.

La réglementation internationale dans ce domaine vise à éviter partout dans le monde le commerce illicite des précurseurs. Le Service de contrô le économique (Economische Controle Dienst - ECD) est chargé de surveiller le respect des dispositions de cette loi, puisqu'il entretient déjà des contacts avec l'industrie chimique du fait d'autres tâches de surveillance. La Division centrale d'Informations criminelles (CRI) et l'ECD mettront en place, dans les locaux de ce dernier, un bureau central de signalement des mouvements de précurseurs. Sous la présidence de la Commission européenne et en concertation avec les États membres, des initiatives sont prises en vue d'une coopération plus poussée dans un cadre international, par exemple avec les É tats-Unis et les pays membres de la CEI et de l'ASEAN.

 

5.6. Culture du nederwiet

 

Comme nous l'avons exposé dans le chapitre introductif, des obligations conventionnelles s'opposent à une réglementation légale de l'approvisionnement des coffee shops en produits du cannabis (voir annexe III). Il faut en outre craindre qu'une telle réglementation ait pour effet de faire baisser les prix et de confirmer la réputation de tolérance à l'égard de la drogue qu'ont déjà les Pays-Bas, deux éléments qui ne pourraient que faire augmenter le narcotourisme. Le gouvernement considère qu'en raison des obligations conventionnelles il ne sera possible de fixer une telle réglementation que si d'autres pays, se trouvant dans un contexte analogue, décident de faire de même. Entre-temps, la situation de l'offre sur le marché des produits du cannabis aux Pays-Bas s'est radicalement modifiée, en raison de la culture du nederwiet. Le cannabis national, dont la popularité augmente à un rythme rapide, crée une nouvelle problématique. Les Pays-Bas risquent de devenir exportateurs de la production nationale de cannabis, ce qu'ils veulent absolument éviter.

La culture du nederwiet soulève en soi, pour les autorités néerlandaises, de gros problèmes de contrôle. La culture peut se faire à petite échelle à domicile, sans que cela se remarque, et être de ce fait difficile à détecter systématiquement. Aux États-Unis non plus, la justice n'est pas parvenue à réduire la culture du cannabis, qui génère des revenus annuels estimés à plus de 18 milliards de dollars*. La police et la justice néerlandaises sont obligées de fixer des priorités dans leur lutte contre la culture illicite. On sait d'ailleurs qu'il y a aussi culture illicite de cannabis, outre aux États-Unis, en Belgique, en Allemagne et en Europe de l'Est. Aux Pays-Bas, les autorités ont fermé en 1994 323 exploitations clandestines (contre 237 en 1993). Le nombre des plantes saisies est passé de 194.000 en 1993 à 558.000 en 1994. En outre, 600 kilos de nederwiet furent saisis. Dans la plupart des cas, il s'agissait d'une petite culture à domicile, tant pour l'usage personnel et la vente au détail que pour le commerce de gros. La culture en plein air représentait moins de 10 pour cent et la culture dans des serres ou hangars, plus de 20 pour cent. Selon les estimations, il y aurait à l'heure actuelle quelques dizaines de milliers de cultivateurs à domicile.

Le phénomène de la culture de cannabis à domicile place les autorités devant un dilemme. D'une part, elles constatent que les coffee shops sérieux ont tendance à acheter leur marchandise à des réseaux de cultivateurs à domicile non criminels. Cela leur permet d'éviter les contacts avec les organisations criminelles. Cette tendance est positive, étant donné l'objectif de laisser le moins possible de marge aux organisations criminelles. Il est en principe possible que ñ 35.000 cultivateurs à domicile - une estimation qui serait plutôt large -, ayant chacun une culture très modeste de quelques plantes, couvrent la demande intérieure de cannabis*. Il ne serait alors plus nécessaire de recourir au réseau criminel. Par ailleurs, on risque qu'une partie des cultivateurs à domicile soit annexée par des organisations criminelles, comme on l'a déjà constaté à l'occasion.

Il est évident qu'en ce qui concerne la culture du nederwiet les possibilités de faire respecter les règles sont déterminantes dans la politique de dépistage et de poursuites. Les entretiens avec les procureurs généraux ont révélé que le dépistage des petites cultures à domicile est très difficile, parce qu'elles ne sont guère visibles. L'ordre des priorités dépendra en partie des circonstances et développements locaux. La concertation tripartite locale est l'enceinte convenant à la prise des décisions en la matière. La politique retenue sera étayée par des dispositions administratives. La culture par des personnes mineures ne sera en aucun cas tolérée.

Il semblerait que les cultivateurs de chanvre néerlandais parviennent occasionnellement à augmenter la teneur en THC des plantes cultivées à domicile, ce qui en accroît l'effet psychotrope. Le laboratoire de médecine légale a analysé en 1994 183 échantillons de chanvre, la plupart cultivés à domicile, pour en établir la teneur en THC. La teneur moyenne en THC était de 8 pour cent. Ce pourcentage ne s'écarte pas de celui que contient généralement le chanvre étranger. En 1994, on a mesuré dans un cas une teneur en THC de 20 pour cent dans un échantillon de nederwiet. La consommation de cannabis à teneur élevée en THC peut entraîner la surdose et des accès de panique chez les usagers. Nous veillerons à ce que le laboratoire de médecine légale examine systématiquement la teneur en THC du chanvre cultivé aux Pays-Bas. S'il y a lieu, le parquet sera prié d'être particulièrement sévère dans la répression des cas de production et de vente de cannabis à teneur élevée en THC, par exemple en en tenant compte dans la sanction requise.

En matière de dépistage et de poursuites pénales, la plus haute priorité doit aller à la culture de cannabis pour l'exportation et/ou comme forme de criminalité organisée. Il faut éviter que les Pays-Bas ne deviennent un pays producteur et exportateur de drogues douces, a fortiori si celles-ci comportent des risques inacceptables en raison de leur forte teneur en THC. Ne pas intervenir dans cette évolution équivaudrait à prendre des risques injustifiables pour la santé publique et nous exposerait à juste titre aux critiques de l'étranger. Pour mieux réprimer la culture à grande échelle de nederwiet, le ministre de la Justice a l'intention de proposer de porter à quatre ans et une amende de la cinquième catégorie la sanction maximale légale, qui est actuellement de deux ans et une amende de 25.000 florins.

Il importe aussi dans ce cadre de prendre position au sujet de la réglementation légale de la culture de cannabis à des fins licites. Selon le décret du 18 octobre 1976 (Journal officiel (Stb.) 509) portant application de l'article 3a, premier paragraphe, de la loi sur l'opium (Opiumwet), la culture du chanvre comme coupe-vent dans l'agriculture et l'horticulture ou destinée manifestement à la récolte des graines ou des fibres (pour cordes) ne tombe pas sous le coup de la loi sur l'opium. Ce type de culture n'est pas fréquent aux Pays-Bas. La superficie des cultures pour les fibres est d'environ 1.000 ha; il s'agit d'une centaine d'exploitations. Cela pourrait se modifier à l'avenir; la culture pour l'industrie du papier pourrait offrir des perspectives, et un vent de retour à la nature souffle des États-Unis, mettant au goût du jour les vêtements et autres articles à base de chanvre. Dans le cadre de l'Union Européenne, des subventions sont accordées pour la culture de variétés de chanvre autorisées (à très faible teneur en THC), en vertu de l'annexe B du règlement CEE no 1164/89.

La libéralisation de la culture du chanvre aux fins citées peut occasionner des problèmes de preuve lors des interventions de la police en vertu de la loi sur l'opium, si le cultivateur de variétés de chanvre présumées psychotropes invoque l'exception pour les producteurs de fibres et de graines. Au stade précoce de la croissance, il n'est pas toujours possible de distinguer la variété avec certitude. Ces dernières années, les cultivateurs qui pourraient invoquer l'exception pour la récolte des graines ou des fibres ont aussi été poursuivis au titre de l'article 87 de la loi sur les semences et les plantes (Zaaizaad- en Plantgoedwet), qui exige l'inscription au Service général néerlandais de contrôle des semences et des plants (NAK).

Nous avons fait examiner s'il est utile d'introduire un système d'autorisations pour la culture du chanvre à des fins agricoles et horticoles*. Cela soulève quelques objections: premièrement, il faut prévoir une cellule administrative pour un petit nombre seulement d'autorisations; deuxièmement, le contrôle pratique est difficile, parce qu'il faut des connaissances très spécialisées pour pouvoir établir si les plantes qui poussent dans le champ correspondent à l'espèce mentionnée sur l'autorisation. Par ailleurs, il n'est pas exclu que l'exploitant masque une culture illicite en l'entourant par exemple de cultures licites.

Il vaudrait mieux limiter l'exception prévue par le décret du 18 octobre 1976 à la culture en plein air de variétés de chanvre autorisées. De cette façon, il est certain que la culture de chanvre en serres, quelles que soient les variétés cultivées, est toujours une infraction à la loi sur l'opium. Nous veillerons, en concertation avec le ministre de l'Agriculture, de la Nature et de la Pêche, à ce que le décret du 18 octobre 1976 soit adapté de façon à permettre aux autorités de mieux réprimer la culture à grande échelle sous abri et la culture de variétés de chanvre non autorisées. La politique en matière de drogue aux Pays-Bas: Conclusions et intentions politiques La politique néerlandaise en matière de drogue de ces vingt dernières années a toujours été dictée par le souci de préserver la santé publique. Par rapport à cet objectif, on peut dire que cette politique a réussi.

La dépénalisation de la détention d'une provision de drogues douces pour l'usage personnel et l'existence de points de vente tolérés à certaines conditions n'ont pas entraîné parmi les jeunes un niveau de consommation préoccupant. De plus, les usagers de drogues douces ne sont en règle générale pas enclins à essayer les drogues dures, comme l'héroïne et la cocaïne, ce qui est conforme à l'objectif de la politique de séparation des marchés. La consommation d'héroïne ou de cocaïne est peu fréquente parmi les Néerlandais mineurs et continue de diminuer. Cette évolution est favorable par rapport à celle que connaissent la plupart des autres pays européens. Cela explique probablement les différences de ton entre le débat public aux Pays-Bas et celui dans d'autres pays. Chez nous, le problème de la drogue n'est plus ressenti essentiellement comme une menace aiguë pour la santé publique, mais comme une source de nuisances. Une approche plus pragmatique et plus administrative convient au problème tel qu'il est actuellement défini et ressenti aux Pays- Bas.

La politique fortement axée sur la prévention et sur l'aide aux toxicomanes a contribué à ce que l'état de santé des drogués vivant aux Pays-Bas soit meilleur que dans les pays voisins. La contamination des toxicomanes par le V.I.H. est moins répandue qu'ailleurs et est en baisse. La mortalité est faible parmi les toxicomanes et n'augmente pas, contrairement à la situation dans beaucoup de pays européens. Les résultats atteints jusqu'à présent incitent le gouvernement à poursuivre dans ses grandes lignes sa politique pragmatique, axée sur la maîtrise des risques sanitaires.

Cependant, on a constaté entre-temps que la politique a aussi des implications défavorables, qui en exigent l'ajustement partiel. Les nuisances criminelles et autres causées par les drogués néerlandais et étrangers ont dépassé le seuil critique dans nombre de communes et doivent donc, pour cela, être réduites. Ces phénomènes connexes minent en outre l'assise sociale de la politique d'insertion des consommateurs de drogue dans la société. La politique néerlandaise en matière de drogue restera axée, dans les années à venir, sur la prévention des effets néfastes de la consommation de drogue pour la santé publique, mais visera aussi à en réduire les nuisances sociales.

L'attrait qu'exerce le marché néerlandais de la drogue sur les consommateurs des pays voisins et les critiques que suscite de ce fait dans ces pays notre politique jugée tolérante nous forcent à des ajustements. Enfin, le rôle croissant des organisations criminelles dans l'importation et la vente de drogues dans notre pays et à l'étranger est extrêmement préoccupante. La puissance économique croissante du crime organisé constitue, aux Pays-Bas également, un problème grave et urgent. Indépendamment de ces complications, il faut se rendre compte du fait que le problème de la drogue change constamment de nature. Parmi les jeunes, l'héroïne est devenue la drogue des ratés et la consommation de drogues de synthèse comme le XTC se répand largement. En fonction par exemple du contexte où elles sont prises, les drogues de synthèse peuvent causer des dommages importants à la santé. Elles sont de ce fait classées parmi les drogues dures. La lutte contre ces drogues exige d'ailleurs une approche spécifique.

Une autre tendance ayant des conséquences importantes pour la politique est l'usage intensif de drogues tant douces que dures dans des groupes marginalisés de la collectivité. groupe cible, l'aide aux toxicomanes ne sera efficace que si elle fait partie d'une approche plus globale, par laquelle on essaie aussi d'améliorer leur situation en matière de formation et d'emploi. La politique spécifique pour les grandes villes, que le gouvernement mène en coopération étroite avec les communes concernées et qui recherche notamment l'insertion sociale des jeunes risquant de perdre pied dans la société, offre de bonnes possibilités à cet effet.

 

Le débat sur la légalisation

 

Dans la société néerlandaise, d'aucuns préconisent depuis quelque temps déjà de rayer entièrement du droit pénal la production et la vente des drogues. Selon le raisonnement suivi, cette mesure ferait baisser fortement les prix des stupéfiants, ce qui ferait perdre aux organisations criminelles leur principale source de revenus. En outre, les toxicomanes ne devraient plus commettre de délits pour se procurer l'argent nécessaire à l'achat des drogues illicites.

Le gouvernement considère qu'avec la libéralisation des drogues dures on risquerait qu'un nombre plus grand de jeunes vivant dans des conditions sociales vulnérables ne consomment ces drogues, avec tous les dangers inhérents pour leur santé. Ces dangers sont, pour le gouvernement, une raison suffisante en soi pour rejeter cette option. Le nombre des drogués de moins de 21 ans est heureusement faible et continue de baisser, et il ne faut pas compromettre ce résultat. Le fait que les drogués mineurs sont peu nombreux dans les villes néerlandaises constitue en effet un acquis important de notre politique en matière de drogue.

En ce qui concerne les drogues douces, la situation est quelque peu différente. L'expérience néerlandaise avec les coffee shops a démontré qu'une plus grande disponibilité de drogues douces n'a pas en soi suscité une hausse inacceptable de la consommation. Pour les jeunes, les coffee shops exercent la fonction sociale utile de tampon contre le milieu criminel des drogues dures. La question qui se pose est de savoir s'il ne faudrait pas légaliser l'approvisionnement des coffee shops en drogues douces. Nous considérons comme indésirable la libéralisation sans plus, c'est- à-dire la commercialisation entière du trafic des drogues douces. Il faut plutôt en décourager l'usage, entre autres par l'information. On pourrait envisager l'introduction d'un monopole d'État ou d'un système d'autorisations. Cela présenterait certainement des avantages et permettrait de réduire le rôle que jouent les organisations criminelles autour des coffee shops. Cette option se heurte toutefois aux obligations découlant des conventions ratifiées par les Pays-Bas.

La mise en place d'un système d'autorisations s'accompagnerait de charges lourdes sur le plan de l'application et du contrôle. En outre, la légalisation éventuelle de la culture et/ou du commerce des drogues douces aurait probablement pour conséquence d'intensifier le tourisme de la drogue, ce qui aggraverait encore les nuisances causées par les narcotouristes étrangers. Il ne faut pas oublier qu'en cas de formes de légalisation limitées aux Pays-Bas le crime organisé axé sur le transit vers d'autres pays subsistera et qu'il faudra continuer à le combattre. Aux yeux du gouvernement, les inconvénients sont plus grands que les avantages pratiques. Il vaut mieux résoudre les problèmes liés aux coffee shops dans les limites des conventions sur les stupéfiants, par des ajustements des procédures pénales appliquées par le parquet, combinés avec des réglementations d'ordre administratif.

Le gouvernement s'efforcera de participer aussi efficacement que possible aux débats européens et internationaux sur la politique en matière de drogue. La diffusion d'informations concrètes sur les motifs sous-tendant la politique néerlandaise et sur ses résultats recevra la plus haute priorité. Le gouvernement considère cependant que la marge permettant d'influer sur le débat européen est plus petite qu'on ne le croit souvent. Des considérations normatives, déterminées par la culture et les idéologies, jouent inévitablement un grand rôle dans ce débat.

Les Pays-Bas devront fournir leur contribution au débat en Europe et dans le monde sur les avantages et les inconvénients de la légalisation des drogues douces - débat que le gouvernement estime souhaitable - avec une grande circonspection et en relativisant comme il se doit leurs propres conceptions. L'approche suivie devra comprendre par exemple l'établissement de contacts avec des partenaires stratégiques à l'étranger. Les représentants du monde néerlandais des affaires qui s'inquiètent de la politique gouvernementale en matière de drogue pourront contribuer au débat international.

Approche intégrale Le gouvernement décide de poursuivre dans la voie suivie depuis les années soixante-dix, mais avec quelques ajustements. Comme par le passé, le problème de la toxicomanie sera traité dans un cadre adapté de prévention, d'aide, de thérapie et de sanction pénale en cas de comportement criminel. Dans ce cadre, il y aura cependant quelques nouveaux accents. La prévention primaire sera, d'une part, axée davantage sur l'usage récréatif de nouvelles drogues comme le XTC et, d'autre part, sur l'usage plus problématique des drogues dans les groupes socialement vulnérables. Un centre national d'appui sera créé pour la diffusion d'informations, le renforcement de l'expertise et l'élaboration de la politique dans le domaine de la prévention de l'usage de drogue.

Quant à l'assistance, l'offre en sera mieux adaptée aux besoins. Il s'agit entre autres d'établir une meilleure correspondance entre les différentes formes d'aide, comme la distribution de méthadone et les projets de formation, d'emploi et d'hébergement. Plus que par le passé, on proposera aux toxicomanes une offre intégrale d'assistance taillée sur mesure, dont découleront à la fois des droits et des obligations. Une attention accrue sera accordée à la gestion cas par cas (case-management). Si l'on réclame une offre plus flexible et intégrale en matière de prévention et d'assistance, on doit aussi disposer d'une stratégie claire d'action et de financement. Cela étant, le gouvernement a décidé de faire examiner si l'approche régionale actuelle de l'aide ambulatoire aux toxicomanes par le biais de 23 communes centrales pourra se poursuivre au 1.1.1997, à l'expiration de la loi intérimaire sur l'encouragement de la rénovation sociale (Tijdelijke Wet Stimulering Sociale Vernieuwing). Puisqu'il est indispensable de suivre de près l'évolution du problème de la toxicomanie, nous veillerons à régler par la loi la participation aux campagnes nationales d'information.

 

Lutte contre les nuisances

 

Pour faire face aux problèmes de nuisance et de criminalité, il faut suivre une approche intégrale à laquelle toutes les parties - État, municipalités, parquet, police, aide postpénale, administration pénitentiaire et aide aux toxicomanes - fournissent une contribution harmonisée. Pour ce qui est de l'usage des drogues dures, les efforts des pouvoirs locaux, de la police, du parquet et des assistants sociaux devront se concentrer sur le conditionnement du comportement des drogués. Le fait que la consommation de drogue n'est pas en soi punissable ne constitue pas un blanc-seing pour les vols de toute sorte, l'agressivité ou un comportement gênant pour autrui. Les toxicomanes qui s'en rendent coupables seront rappelés à l'ordre. Pour maintenir dans des limites acceptables ces phénomènes liés à l'usage de drogue, toutes les instances concernées devront procéder à une harmonisation intensive de leur action. Sans vouloir rendre les toxicomanes inaccessibles pour les services d'aide, nous estimons qu'il importe d'accorder aussi pendant les différentes phases de l'aide une attention suffisante à la socialisation du comportement des drogués. Il est essentiel de suivre ici une approche en chaîne et de renforcer tout d'abord la prévention.

Les programmes d'action annoncés par les grandes villes pour l'approche intégrale de la problématique sociale des jeunes jettent les fondements à cet effet. En améliorant les perspectives sociales des jeunes vulnérables, on s'attaque à la racine du problème. Ensuite, l'aide aux toxicomanes doit être d'accès facile et différenciée. Il est essentiel de créer des perspectives d'insertion sociale des clients des organisations d'aide aux toxicomanes, sous forme notamment de cours de formation et d'emplois. Simultanément, les toxicomanes qui persistent dans leur comportement déviant, qu'il soit criminel ou cause des nuisances, devront subir des sanctions. Les établissements s'occupant des toxicomanes devront, eux aussi, appliquer ces principes d'action. Enfin, le dernier maillon de la chaîne est la disponibilité d'une capacité carcérale suffisante pour punir les délinquants opiniâtres, y compris les contrevenants aux dispositions municipales en matière de nuisances.

La prévention et la lutte contre les nuisances liées à la drogue font expressément partie des accords conclus pour accroître la sécurité dans le cadre de la politique relative aux grandes villes. Le gouvernement a réservé des fonds supplémentaires pour l'application notamment de cette politique pendant les quatre années à venir (au total 375 millions pour la qualité de la vie et la sécurité, prises ensemble). Il a été convenu dans ce cadre que les quatre grandes villes prendront l'initiative d'organiser une régie centrale plus stricte au niveau local, afin d'arriver à une approche consistante et intégrée, avec la participation directe du secteur de l'aide, de la police, de la justice et de l'aide postpénale. Le budget pour la rénovation de l'aide en vue de la réduction des nuisances liées à la drogue s'élève en 1995 à 37 millions de florins et sera augmenté à partir de 1996 de 12,5 millions (soit 49,5 millions structurellement).

Une équipe inter-administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes (Interbestuurlijke Task Force Veiligheid en Verslavingszorg) sera créée pour assurer l'exécution adéquate des mesures envisagées par l'État et les grandes villes dans les domaines de la sécurité et de la lutte contre les nuisances liées à la drogue. Cette équipe, se composant de coordonnateurs mandatés par l'État et les communes, sera chargée de surveiller l'exécution rapide des mesures concernant les nuisances liées à la drogue consignées dans ce rapport et de conseiller les municipalités et les responsables politiques concernés s'il y a des risques de retards au niveau des communes ou de l'État.

Faisant suite à l'opération de police "Victor" qui eut lieu avec succès à Rotterdam cette année, une capacité policière et carcérale sera réservée en permanence au dépistage ciblé des toxicomanes néerlandais et étrangers occasionnant des nuisances. Au besoin, les toxicomanes étrangers arrêtés pour actes criminels seront immédiatement expulsés, même s'il s'agit de citoyens de l'UE. La coopération avec les autorités de police et de justice des pays voisins sera intensifiée. Au sein de l'UE par exemple, nous oeuvrerons pour que l'aide aux toxicomanes dans certains pays soit améliorée, de sorte que les juges néerlandais aient davantage de possibilités pour le placement de toxicomanes étrangers dans une clinique de désintoxication, etc., de leur pays d'origine.

Le ministre de l'Intérieur présentera un projet de loi élargissant les possibilités des communes pour fermer les logements où l'on vend de la drogue. À l'exemple d'Amsterdam, des unités de signalement des nuisances liées à la drogue seront installées en plusieurs endroits du pays; elles auront une fonction de médiation et de collecte d'informations. Jusqu'à présent, les soins en établissement sont presque entièrement placés sous le signe de l'abstinence, c'est-à-dire qu'ils cherchent à désintoxiquer complètement et durablement leurs clients. Cet objectif est trop ambitieux pour la plupart des toxicomanes, certainement à court terme. Les établissements d'aide aux toxicomanes devront choisir plus souvent comme objectif secondaire, voire principal, d'améliorer l'adaptation sociale de leurs clients. Si nécessaire et possible, il faudra recourir pour cela à un instrument de droit pénal.

Une clinique légale de désintoxication sera ouverte en 1996, à l'intention des toxicomanes qui ont commis des délits graves et ont besoin de soins intensifs. Elle comportera à la longue 70 places. Dans le cadre de la politique déjà amorcée et axée sur la réduction des nuisances, une marge plus grande sera créée pour les projets dits de contrainte et de dissuasion, dont le but est d'utiliser la menace de la détention pour stimuler les drogués ayant commis des délits relativement graves à suivre un traitement en établissement ou même ambulatoire. Des formes d'encadrement intensif par l'aide postpénale et le contrôle du respect des conditions fixées se situent dans le prolongement de ces projets. En concertation avec le parquet, le ministre de la Justice réservera dans ce but 500 des cellules supplémentaires disponibles en 1996.

Dans le cadre de la politique relative aux grandes villes, il y aura une ou plusieurs expériences de placement de toxicomanes causant des nuisances graves, parce qu'ils commettent des séries de délits (patrimoniaux) légers et/ou ont un comportement agressif, dans une situation d'hébergement surveillé où l'on oeuvre en vue de leur réinsertion sociale. L'équipe inter- administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes, citée plus haut, a pour mission d'y veiller. Le placement dans un établissement d'internement des toxicomanes se fera provisoirement encore sur la base d'une condition dont est assortie la suspension de la détention préventive.

Pour créer la base juridique convenant à cette approche, le ministre de la Justice présentera un projet de loi portant introduction d'une mesure pénale de placement des toxicomanes, en partie par analogie avec la mesure devenue caduque du placement pénal des mendiants et vagabonds dans un établissement de travail de l'État. Ce placement forcé pourra être imposé par le juge pour au moins trois mois et au plus un ou deux ans. Les communes assureront le programme de formation et de stage. Les municipalités des quatre grandes villes se sont engagées à fournir leur coopération entière à la réalisation de ces plans. Celles de Rotterdam et d'Amsterdam se sont aussi déclarées disposées à les cofinancer. On commencera par une expérience dans la commune de Rotterdam, avec une centaine de places. L'équipe inter-administrations préparera des propositions pour l'extension des expériences ailleurs jusqu'à un minimum de 300 places, dont en tout cas 100 pour Amsterdam.

 

Expérience de fourniture d'héroïne

 

Le gouvernement a pris connaissance avec intérêt de l'avis du Conseil de la Santé (Gezondheidsraad) sur la fourniture d'héroïne et d'autres opiacés sur indication médicale. Nous entamerons des consultations avec les municipalités que cela intéresse en vue de la réalisation d'une ou de plusieurs petites expériences sur une base strictement médicale. L'objectif de la fourniture de ces substances est d'améliorer l'état médical et social des drogués. Les effets positifs de cette mesure sur les problèmes de criminalité et de nuisance sont à considérer comme des effets secondaires hautement souhaitables. L'évaluation portera aussi sur ces aspects. On commencera par une étude pilote portant sur un maximum de 50 toxicomanes.

 

Répression pénale du narcotrafic

 

La lutte énergique dans le cadre du droit pénal contre le trafic des drogues dures sera poursuivie et la coopération avec l'étranger sera intensifiée. L'équipe nationale de recherche aura entre autres pour tâ che de collaborer aux enquêtes préparatoires étrangères. Les objectifs de la répression consistent à maintenir des seuils financiers et sociaux aussi élevés que possible pour l'usage des drogues dures et à prévenir l'implication des Pays- Bas et de Néerlandais dans le narcotrafic international. La vente de drogues dures aux élèves sera sévèrement sanctionnée. Une priorité plus grande sera donnée au dépistage des personnages clés du trafic local des drogues dures (c'est-à-dire du niveau moyen).

La répression pénale du crime organisé demande de lourds sacrifices à l'État et à la société néerlandaise en général. Le gouvernement estime que, vu la gravité de la situation actuelle, ces sacrifices sont inévitables. Les ministres de la Justice et de l'Intérieur présenteront à la Seconde Chambre, dès que possible après la fin de l'enquête parlementaire sur le crime organisé, un plan actualisé de lutte contre le crime organisé.

 

Coffee shops

 

En vertu d'une directive du ministère public, le dépistage de la vente de drogues douces dans certains établissements ne vendant pas d'alcool n'a pas la priorité. Les coffee shops sérieux ont prouvé qu'ils contribuaient à protéger les usagers de drogues douces contre le milieu des drogues dures. La politique de tolérance pénale sera par conséquent poursuivie. La pratique existant de facto et selon laquelle les exploitants qui respectent les conditions fixées ne risquent pas de poursuites pour la détention de quelques centaines de grammes de cannabis pour la vente dans leur établissement sera formalisée dans la directive du parquet.

La vente de drogues dures dans les coffee shops est diamétralement opposée à l'objectif central de la politique relative à ces locaux et continuera donc de faire l'objet d'une répression pénale et administrative sévère. Les coffee shops ont maintenant besoin d'une meilleure assise administrative. Étant donné la responsabilité des pouvoirs locaux pour le maintien de l'ordre public et de la sécurité, ils doivent veiller à ce que ces établissements soient implantés et exploités de telle manière qu'ils produisent un minimum de nuisances. La limitation à une catégorie donnée d'établissements, à savoir à ceux où l'on ne sert pas d'alcool et qui n'ont pas de machines à sous, doit permettre une politique de maintien de l'ordre applicable au niveau local. Les municipalités devront fixer des règlements complémentaires, en vue d'un meilleur contrôle préventif des établissements, tant sur le plan de l'aménagement qu'en ce qui concerne le chef d'entreprise, le directeur et le gérant. Les personnes à antécédents criminels ne sont pas autorisées à faire ce travail.

De tels règlements adaptés et les efforts supplémentaires pour en assurer l'application contribueront à la régulation de l'institution qu'est le coffee shop. Le contrôle du respect des dispositions exige des accords concrets entre les municipalités, la police et le parquet. La plupart des grandes communes ont décidé entre-temps de réduire considérablement le nombre des coffee shops, dans beaucoup de cas à moins de la moitié du nombre actuel. Le gouvernement soutient cette opération d'assainissement. Aucun coffee shop ne sera plus admis à proximité des écoles. En principe, la concertation tripartite dans une commune où il n'y a pas de demande réelle d'un tel point de vente peut retenir l'option zéro.

On examinera, dans le cadre de la révision générale de la loi sur les boissons alcoolisées et les hôtels, restaurants et cafés (Drank- en Horecawet), comment accroître pour les communes les possibilités de refuser, d'annuler et de retirer les autorisations concernées. L'équipe inter-administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes instituera à l'intention des municipalités, de la police, du ministère public et de l'enseignement un bureau d'expertise sur les aspects administratifs et judiciaires de la politique en matière de drogue, y compris la régulation des coffee shops. La vente tolérée de drogues douces dans les coffee shops sera limitée à un maximum de 5 grammes par client. Les exploitants de coffee shops qui se spécialisent dans la vente de provisions de drogues douces manifestement destinées à l'exportation seront si possible poursuivis pour complicité de trafic illicite transfrontalier. Les étrangers qui exportent des réserves commerciales vers leur propre pays feront périodiquement l'objet de recherches ciblées, ce qui devrait dissuader d'autres amateurs. Au besoin, les instances concernées demanderont l'assistance des autorités étrangères. Les ajustements de la directive du ministère public en ce sens freineront l'exportation de provisions de drogues douces vers les pays voisins.

L'expansion de la culture du nederwiet, variété de chanvre indien développée aux Pays-Bas, exige des instructions claires. Le ministre de la Justice présentera un projet de loi relevant de deux à quatre ans de prison le maximum pour la sanction pénale légale frappant la culture du cannabis. Dans le cadre du dépistage et des poursuites de la production de nederwiet, la priorité ira aux cultures professionnelles à grande échelle. On évitera ainsi que le nederwiet ne devienne un produit d'exportation. La culture à domicile par des personnes majeures de petites quantités de nederwiet, culture qui répond aux conditions à fixer par la concertation tripartite locale, ne sera pas prioritaire dans le dépistage et les poursuites.

Nous estimons que l'approche administrative et pénale intégrée, esquissée ci-dessus, constitue une amélioration importante de la régulation des coffee shops. Elle pourra aussi contribuer à affaiblir l'influence des organisations criminelles sur ces établissements. Cet aspect constituera dans les années à venir la pierre de touche de la politique relative aux coffee shops. Recherche et statistiques L'Union Européenne a pris des initiatives pour mieux connaître l'ampleur et l'évolution de l'usage de drogue en Europe. Elle a institué à cet effet à Lisbonne l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies. Cette question fait aussi régulièrement l'objet d'études dans les différentes institutions de l'ONU et au Conseil de l'Europe (groupe Pompidou). Le gouvernement néerlandais estime très utile de disposer de données statistiques et de recherche sur l'usage de drogue, qui soient meilleures et comparables et qui permettent par exemple de mieux déterminer les effets des politiques menées; le débat sur ce thème devient ainsi plus objectif et est moins dominé par des images et des conceptions a priori.

Ainsi, on aboutira vraisemblablement peu à peu à une meilleure compréhension du fondement et des effets de la politique néerlandaise en matière de drogue. Le gouvernement prendra des initiatives en vue de l'extension du programme statistique et scientifique concernant l'usage de drogue, par exemple dans le cadre de l'Union Européenne et des Nations Unies. S'agissant de la réforme de l'aide aux toxicomanes, y compris pour les aspects de nuisance, une attention accrue sera accordée au suivi et à l'évaluation et l'on procédera à des études périodiques des usagers. Les premiers travaux portant sur la qualité ont été entamés avec la coopération de l'Association néerlandaise des institutions d'aide aux toxicomanes (Nederlandse Vereniging van Instellingen voor Verslavingszorg - NeVIV). Le ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports stimulera l'étude d'évaluation des mesures préventives. La Fondation Scénarios prospectifs des soins de santé (Stichting Toekomstscenario's Gezondheidszorg) a reçu pour mandat d'établir aussi des scénarios prospectifs pour le problème de la toxicomanie*. Le contexte européen du problème sera abordé dans ce cadre.

L'évaluation de la politique relative aux coffee shops englobera des questions comme la réalisation effective de la séparation des marchés des drogues douces et des drogues dures, les effets de la politique municipale de lutte contre les nuisances et la participation d'organisations criminelles à l'exploitation et à l'approvisionnement des coffee shops.

 

Conclusion

 

Nous n'avons pas l'illusion d'avoir donné, avec le présent document, un programme détaillé de la politique néerlandaise à long terme en matière de drogue. Les modèles de consommation de drogue changent continuellement. C'est pourquoi une politique pragmatique, c'est-à-dire axée sur l'obtention de résultats concrets, doit être flexible. Nous estimons que ce rapport, basé sur une analyse objective de la situation, trace pour la politique néerlandaise en matière de drogue une voie qui est à la fois constructive et réaliste et tient compte d'une façon équilibrée des objections formulées à l'étranger et dans le pays. La politique ainsi définie vise à poursuivre l'action spécifiquement néerlandaise, qui se veut humaine et axée sur l'insertion sociale des toxicomanes, tout en mettant fin aux excès dont souffre la société en raison du problème de la drogue. Il y a peut-être encore des incohérences entre certaines parties de la politique envisagée, mais il faut garder à l'esprit qu'elle n'est pas un exercice de logique, mais un effort pour maîtriser, dans les cadres conventionnels en vigueur, un problème persistant et complexe, soumis à l'influence de l'évolution sociale et culturelle rapide que connaissent les Pays-Bas et les pays étrangers. Tant l'usage de drogue que la politique en la matière sont en mutation constante, aussi au niveau international. La politique que nous venons de définir est basée sur les fondements jetés au cours des années précédentes et offre en même temps le moyen de réagir rapidement aux nouveaux développements. À nos yeux, le présent rapport constitue un pas en avant pour la politique en matière de drogue.

Le ministre de la Santé, du Bien-être et des Sports : Mme E. Borst-Eilers

Le ministre de la Justice : Mme W. Sorgdrager

Le secrétaire d'État à l'Intérieur : J. Kohnstamm

20 octobre 1995

 

 

Estimation des fonds nécessaires pour la mise en oeuvre du rapport sur la politique en matière de drogue (en florins), sur une base annuelle

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Mesures générales

 

1. Intensification de l'information et amélioration de la connaissance de la politique néerlandaise en matière de drogue dans le pays et à l'étranger et aide aux communes, au ministère public et à la police pour la politique des coffee shops : 1,2 million (Santé, Justice, Intérieur)

2. Intensification du dépistage d'organisations criminelles, e.a. par la recherche financière et l'entraide dans les enquêtes internationales : 8 million (Intérieur, Justice)

3. Surveillance des designer-drugs, de la teneur en THC et enquêtes périodiques sur les consommateurs : 2 million (Santé, Justice)

 

Nuisances

 

4. Intensification de la lutte contre les nuisances, conformément au rapport sur la politique en matière de nuisances : 12,5 million (Santé 11,15; Justice 1,35)

5. Expérience de placement en cadre fermé, avec action de réinsertion sociale grâce à des formations et stages, pour une durée de 3 ans, à partir de 1997* : 8 million (budget GSB, Rotterdam)

 

Narcotourisme

 

6. Stimulation de la coopération transfrontalière entre la police, l'Administration et l'infrastructure d'aide : 0,6 million (Intérieur 0,4; Santé 0,1; Justice 0,1)

 

Réforme des soins

 

7. Fourniture d'héroïne * (contribution aux expériences municipales) : 4 million (Santé)

8. Politique axée sur la qualité, évaluation et amélioration de la prévention; campagnes d'information : 1,5 million (Santé 0,85; Justice 0,65)

9. Études prospectives : 0,6 million (Santé, Justice, Intérieur)

Total : 38,4 million

------------------------------------------------------------------------

Les fonds nécessaires à l'exécution de ces intentions politiques ont été réservés dans les budgets existants des ministères de la Santé, du Bien-être et des Sports, de l'Intérieur, de la Justice, et dans les postes budgétaires pour la politique de lutte contre les nuisances liées à la drogue (SVO) et la politique relative aux grandes villes.

 

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Annexes

 

Annexe I

 

Nombre de toxicomanes (x1000)

-----------------------------------------------------------------------

 

15 - 20? 10 - 20 20?15 - 20

10 10 10 20 10 10

150 150 100 120 120 -150 150

80-100 80 60 - 80 100 90 -140 100 - 250

??9 - 13 30 40 - 50 10 - 20

2 ? ? 20 3,5 2

150-200 150? 150 100 -200 150 - 200

1- 1,5?1,8 2 1,2- 1,5 1 - 1,5

15- 20 21203 22 - 24 22

??40 - 50 50 40 - 50 40 - 50

120??100?120

150-200 35-90 ? 100 ? 150 - 200

693-823,5 446-501 250,8-294,8 742 426,7-629 770-1.045,5

 

États membres

Dépistage + poursuites 1989-1993

CCE-2e rapport réduction demande 1992

CCE-1e rapport réduction demande 1990

L'Express 7 0ct. 1993

O.M.S. 1985-1990

NIAD 1990-1991

Belgique

15-20

?

10-20

20

?

15-20

Danemark

10

10

10

20

10

10

France

150

150

100

120

120-150

150

Allemagne

80-100

80

60-80

100

90-140

100-250

Grèce

?

?

9-13

30

40-50

10-20

Irlande

2

?

?

20

3,5

2

Italie

150-200

150

?

150

100-200

150-200

Luxembourg

1-1,5

?

1,8

2

1,2-1,5

1-1,5

Pays-Bas*

15-20

21

20

22-24

22

Portugal

?

?

40-50

50

40-50

40-50

Espagne

120

?

?

100

?

120

Royaume-Uni

150-200

35-90

?

100

?

150-200

Total

693-823,5

446-501

250,8-294,8

742

426,7-629

770-1.045,5

Source: Modèle de la Commission relatif au Plan d'action et aux stupéfiants (1995-1999) Commission des Communautés Européennes, juin 1994.

(*) [NdR : tableau recomposé par moi-même, à partir des données mal formatées ci-dessus (ex : Pays-Bas 15-202120322-2422) d'où erreurs possibles].

------------------------------------------------------------------------

Annexe II

 

Principales mesures envisagées dans le rapport sur la politique en matière de drogue aux Pays-Bas

Globalement: Pas de légalisation des drogues dures ni douces. Poursuite de la politique axée sur la séparation des marchés et sur la réduction des risques, avec quelques ajustements:

réforme de l'aide;

intensification de la lutte contre les nuisances et la criminalité;

lutte contre la criminalité organisée;

intensification des consultations avec l'étranger.

Approche intégrale: prévention, soins, réinsertion sociale et sanctions pénales contre les comportements causant des nuisances et/ou criminels. Plus en particulier: Réalisation d'une cellule nationale de soutien pour l'information, l'augmentation des connaissances et l'élaboration de la politique dans le domaine de la prévention des toxicomanies. Réglementation légale de la participation aux campagnes nationales d'information dans le cadre du suivi de la problématique de la drogue. Recherche sur le mode de financement de l'aide ambulatoire régionale aux toxicomanes à l'expiration de la loi intérimaire sur l'encouragement de la rénovation sociale (TWSSV).

Réforme de l'aide aux toxicomanes:

différenciation de l'offre de soins en établissement;

attention accrue pour la prévention et l'insertion sociale des toxicomanes;

expérience de fourniture d'héroïne aux toxicomanes d'un certain âge, ne pouvant plus être traités;

extension de la capacité des projets de contrainte et de dissuasion (500, en concertation avec le parquet);

ouverture d'une clinique légale de désintoxication (70 places). Institution de l'équipe inter-administrations de sécurité et d'aide aux toxicomanes (État, communes, Union des communes néerlandaises), en relation étroite avec la politique relative aux grandes villes.

Institution d'un bureau d'expertise pour aider les municipalités dans la lutte administrative contre les nuisances et dans l'application de la politique relative aux coffee shops:

étude de la jurisprudence;

mise au point de propositions pour la politique locale relative aux coffee shops;

antennes de signalement des nuisances;

échange de connaissances.

Projet de loi sur la fermeture de logements. Répression stricte des narcotouristes causant des nuisances (dépistage et expulsion immédiate). Projet de loi sur la mesure pénale du placement forcé de toxicomanes commettant fréquemment des délits et de toxicomanes causant souvent des nuisances; expérience à Rotterdam (100 places). Réduction de 30 à 5 grammes de la quantité de cannabis pouvant être vendue au détail dans les coffee shops réglementaires et intensification du contrôle sur l'exportation. Insertion dans la directive du parquet de la tolérance d'un stock commercial de quelques centaines de grammes de cannabis dans les coffee shops. Projet de loi tendant à relever la sanction maximale pour la culture de cannabis. Priorité au dépistage des cultures de nederwiet à grande échelle. Pas de priorité au dépistage des petites cultures de nederwiet à domicile, dans des limites à fixer localement. Intensification du dépistage des organisations criminelles (équipe nationale). Priorité plus grande pour le dépistage des chefs du trafic de drogue au niveau local. Élaboration d'un plan de lutte contre la criminalité organisée à la fin de l'enquête parlementaire. Encouragement de la coopération transfrontalière entre la justice, la police, les administrations et les infrastructures d'aide.

Attention accrue pour la recherche, le suivi et l'évaluation:

enquête périodique sur les consommateurs;

projets axés sur la qualité;

évaluation des mesures de prévention;

scénarios prospectifs;

politique relative aux coffee shops;

teneur en THC;

drogues chimiques.

 

Annexe III

 

Conclusions de l'avis de J.J.E. Schutte, directeur au service juridique du Conseil de l'Union Européenne et ancien professeur de droit pénal international à l'Université d'Amsterdam, sur les engagements de droit international contractés par le Royaume dans le domaine de l'application de droit public des prescriptions relatives aux stupéfiants et aux substances psychotropes*.

Les implications juridiques d'une légalisation éventuelle du cannabis et des produits du cannabis Une décision unilatérale néerlandaise de légaliser le marché du cannabis et des produits du cannabis, c'est-à-dire de dépénaliser la culture de plantes de cannabis pour d'autres fins que celles reconnues comme licites dans la convention unique sur les stupéfiants de 1961, ainsi que la production, la détention et le commerce de cannabis et de produits du cannabis (que l'importation, l'exportation et le transit restent ou non pénalisés), aurait les conséquences de droit international suivantes: La convention unique sur les stupéfiants de 1961, telle que modifiée par le protocole de 1972, devrait être dénoncée, parce que la décision susvisée serait incompatible avec les engagements découlant des articles 2, paragraphes 1 et 5, 4, 36 et 49. Vu l'article 50, paragraphe 3, de cette convention, les possibilités d'en redevenir partie en faisant une réserve concernant la pénalisation de différents agissements liés au cannabis et aux produits du cannabis sont faibles; il est probable que les pays qui ne veulent pas faire de distinction formelle entre drogues dures et drogues douces s'opposeront à une telle réserve et que ces pays représenteront plus d'un tiers du nombre total des parties contractantes.

En prenant pareille décision, les Pays-Bas ne violeraient pas la convention de 1971 sur les substances psychotropes. Les Pays-Bas devraient dénoncer la convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, puisqu'une telle décision serait incompatible avec les engagements découlant de l'article 3. Contrairement à la convention unique de 1961, cette convention-ci ne contient pas de dispositions particulières relatives aux réserves, de sorte qu'à première vue il semble que la possibilité d'en redevenir partie en faisant une réserve rencontrerait moins d'obstacles juridiques. Dans la pratique toutefois, il faudra s'attendre à tout autant d'opposition de la part des autres États parties que dans le cas d'une réserve à la convention unique de 1961. En prenant pareille décision, les Pays-Bas ne violeraient pas l'accord de Schengen de 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes.

La convention d'application de l'accord de Schengen, de 1990, par contre, s'oppose à une telle décision, qui serait incompatible avec son article 71; celui-ci se fonde en effet sur le respect de la convention unique de 1961, telle que modifiée par le protocole de 1972, et de la convention des Nations Unies de 1988 contre le trafic illicite. La convention d'application qui, selon son article 137, ne peut faire l'objet de réserves (à l'exception de celles mentionnées à l'article 60, qui ne sont pas pertinentes ici) n'a pas de clause de dénonciation. Cela signifie que les dispositions de l'article 56 de la convention de Vienne sur le droit des traités s'appliquent à la dénonciation de la convention d'application. Le premier paragraphe de l'article 56 s'énonce: "Un traité qui ne contient pas de dispositions relatives à son extinction et ne prévoit pas qu'on puisse le dénoncer ou s'en retirer ne peut faire l'objet d'une dénonciation ou d'un retrait, à moins: a) qu'il ne soit établi qu'il entrait dans l'intention des parties d'admettre la possibilité d'une dénonciation ou d'un retrait; ou b) que le droit de dénonciation ou de retrait ne puisse être déduit de la nature du traité."

Rien ne permet de conclure que les parties contractantes aient eu l'intention de rendre possible la dénonciation de la convention ou le retrait d'une des parties, et la nature de la convention semble s'opposer à une telle possibilité. En effet, avec cette convention d'application, les parties contractantes ont voulu, comme il ressort de son préambule, poursuivre un but qui coïncide avec l'objectif du marché intérieur, formulé dans le traité instituant les Communautés Européennes. On n'a pas le droit de porter atteinte à cet objectif en dénonçant une convention qui met en oeuvre le principe de la libre circulation des personnes dans un espace sans frontières intérieures.

Force est donc de conclure que la convention d'application de l'accord de Schengen ne peut pas être dénoncée; elle peut tout au plus être amendée ou remplacée par le droit communautaire, le cas échéant par des conventions conclues entre tous les États membres de l'Union Européenne (cf. les articles 134, 141 et 142 de la convention d'application). L'accord du Conseil de l'Europe du 31 janvier 1995, mettant en oeuvre l'article 17 de la convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes (relatif au trafic illicite de drogue par mer), oblige ses parties contractantes à appliquer les dispositions à tous les faits punissables, visés à l'article 3, paragraphe 1, de cette convention des Nations Unies de 1988. Selon son article 31, paragraphe 1, l'accord ne prévoit de réserves que dans deux dispositions, qui ne sont pas pertinentes ici.

La décision de légaliser le cannabis impliquerait que le Royaume ne pourrait pas devenir ni rester partie à cet accord, sauf si elle ne s'appliquait pas aux actes extérieurs aux Pays- Bas. La décision susmentionnée ne constituerait pas pour les Pays-Bas une violation des autres conventions du Conseil de l'Europe relatives à l'entraide judiciaire en matière pénale. Pareille décision ne constituerait pas non plus pour les Pays-Bas une violation directe du traité sur l'Union Européenne. La directive 91/308/CEE relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux contient, dans son article 1er, une définition du blanchiment de capitaux empruntée aux définitions correspondantes de la convention des Nations Unies de 1988 et de la convention du Conseil de l'Europe du 8 novembre 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime. Cette définition décrit des agissements liés à des activités criminelles. La directive qualifie d'activité criminelle: "une infraction définie à l'article 3, paragraphe 1, point a) de la convention de Vienne (c.-à-d. la convention des Nations Unies de 1988), ainsi que toute autre activité criminelle définie comme telle pour les besoins de la présente directive par chaque État membre."

Ensuite, l'article 2 de la directive stipule que les États membres doivent veiller à ce que le blanchiment de capitaux, tel qu'il est défini dans la directive, soit interdit. Dans la législation néerlandaise, les délits de blanchiment sont punissables comme des délits de recel. Il s'agit d'agissements concernant des biens - y compris de l'argent - dont on sait ou dont on aurait dû supposer qu'ils proviennent du crime. En vertu de la directive, les actes de recel de capitaux provenant des délits visés à l'article 3, paragraphe 1, de la convention des Nations Unies de 1988 doivent être interdits. Ne plus considérer comme un délit certaines formes de production ou de vente de cannabis ou de produits du cannabis équivaudrait à ne plus considérer comme des actes de recel interdits certains agissements liés aux revenus de cette production ou de cette vente.

La question qui se pose est de savoir si cela crée une violation d'engagements communautaires. Il faut examiner cette question à la lumière de la déclaration des représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, qui fut adoptée en même temps que la directive et publiée au Journal Officiel des Communautés. Cette déclaration s'énonce: "Les représentants des gouvernements des États membres réunis au sein du Conseil, rappelant que les États membres ont signé la convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, adoptée le 19 décembre 1988 à Vienne, rappelant également que la plupart d'entre eux ont signé, le 8 novembre 1990, à Strasbourg, la convention du Conseil de l'Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, conscients que la description de blanchiment figurant à l'article 1er de la directive 91/308/CEE, dérive son libellé des dispositions correspondantes des conventions susmentionnées, s'engagent à prendre le 31 décembre 1992 au plus tard toute mesure nécessaire pour mettre en vigueur une législation pénale les mettamt en condition de remplir leurs obligations découlant desdits instruments."

La raison de cette déclaration doit être cherchée dans le fait que, de l'avis du Conseil, l'obligation de pénaliser le blanchiment d'argent ne peut pas être imposée par le droit communautaire, mais découle uniquement des engagements contractés par les États membres au titre des conventions citées des Nations Unies et du Conseil de l'Europe. Si cette interprétation est exacte, une décision en vue de légaliser certains agissements liés au cannabis et aux produits du cannabis ne constitue pas une violation des obligations découlant de la directive.

Une tout autre question est de savoir si la déclaration intergouvernementale jointe à la directive constitue un instrument assimilable à une convention et créant des obligations entre les États membres. Une chose est certaine, cette déclaration n'a pas été soumise aux Pays-Bas aux procédures constitutionnelles prescrites pour l'approbation des conventions et n'appartient pas non plus aux catégories de conventions pour lesquelles l'approbation parlementaire n'est pas exigée. C'est pourquoi il faut admettre que le gouvernement néerlandais en tout cas n'a considéré la déclaration que comme une déclaration politique, qui lie tout au plus le gouvernement de l'époque, mais pas le Royaume en tant que tel.

Cela étant, on pourrait conclure qu'une décision de légalisation ne constituerait pas une violation des obligations de droit international découlant de la directive ou de la déclaration faite au moment de l'approbation de cette directive. Une décision de légaliser le cannabis et les produits du cannabis ne porterait apparemment pas atteinte directement aux obligations découlant des règlements et de la directive relatifs aux mesures à prendre afin d'empêcher le détournement de certaines substances pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes. Les précurseurs tombant sous le champ d'application de ces instruments communautaires sont repris sur les listes des annexes identiques, listes subdivisées en trois catégories. Quelques-unes des substances de la catégorie 3 peuvent jouer un rôle dans la fabrication de produits du cannabis, à savoir l'acétone, l'éther éthylique et le toluène. Elles jouent cependant aussi un rôle dans la fabrication de certaines drogues dures. Les substances de la catégorie 3 sont toutefois soumises aux règles les moins strictes. L'article 5 bis du règlement 900/92 modifiant le règlement 3677/90 contient quelques dispositions relatives à l'exportation de ces substances hors de la Communauté, mais il s'agit surtout, vu le texte du paragraphe 1, sous b), de la fabrication illicite d'héroïne ou de cocaïne dans certains pays tiers.

D'autre part, l'article 6, paragraphe 2, stipule que: "Sans préjudice des mesures prévues aux articles 4, 5 et 5 bis ainsi qu'au présent article paragraphe 1, les autorités compétentes de chaque État membre peuvent interdire l'introduction de substances classifiées sur le territoire douanier de la Communauté ou leur départ de ce dernier si elles ont de bonnes raisons de soupçonner que ces substances sont destinées à la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes." La seule disposition de la directive 92/109/CEE présentant (aussi) de l'intérêt pour les substances de la catégorie 3 est l'article 5 qui stipule: "Les États membres prennent les mesures nécessaires pour qu'une étroite coopération soit mise en oeuvre entre les autorités compétentes et les opérateurs afin que ceux-ci: notifient immédiatement aux autorités compétentes tous les éléments, tels que des commandes ou des transactions inhabituelles portant sur des substances classifiées, qui donnent à penser que ces substances devant être mises sur le marché ou fabriquées, selon le cas, peuvent être détournées pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes, fournissent aux autorités compétentes les informations de caractère global que ces autorités peuvent leur demander au sujet de leurs transactions sur des substances classifiées." Une décision de légalisation de la production de cannabis et de produits du cannabis aux Pays-Bas pourrait avoir pour conséquence que le règlement et la directive sont, dans la pratique, appliqués un peu différemment aux Pays-Bas que dans les autres États membres, mais il n'y aurait vraisemblablement pas violation de ces instruments.

Une telle décision ne serait pas non plus contraire aux engagements découlant du règlement portant création de l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies. Comme la notion de "trafic illicite de drogue" n'est pas définie dans l'acte communautaire relatif à l'Unité "Drogue" Europol, une décision éventuelle de légalisation comme visée plus haut ne met pas directement les Pays-Bas en infraction avec cet acte. La convention Europol n'oblige pas les États membres à pénaliser les faits à l'égard desquels Europol est ou sera compétent. Les définitions qui sont données des différentes catégories de criminalité, à l'article 2, paragraphe 5, ou dans l'annexe à l'article 2, visent à définir l'ampleur des compétences d'Europol ratione materiae. La disposition de la fin de l'annexe à l'article 2, qui s'énonce: "Les formes de criminalité énumérées à l'article 2 et dans la présente annexe sont jugées par les services nationaux compétents en vertu de la législation nationale de leurs États respectifs." (Traduction non officielle) a été écrite pour permettre l'existence dans les différents États membres de conceptions divergentes sur la nécessité et le mode de pénalisation des actes visés à l'article 2 et à son annexe.

Cela nous amène à conclure que, au sens strict, une décision de légalisation ne met pas les Pays-Bas en infraction avec les obligations découlant de la convention Europol. La même conclusion s'impose pour les différentes réglementations d'entraide administrative internationale en matière douanière. Si tant est que ces réglementations font expressément état du trafic (international) illicite de drogue, cette notion n'est pas définie plus avant. Les implications des dispositions relatives à la coopération dans le domaine de la lutte contre les stupéfiants, contenues dans les conventions conjointes conclues entre les Communautés Européennes et leurs États membres et des pays tiers, sont difficiles à évaluer. Ces dispositions sont en soi formulées en termes assez globaux et expriment davantage des principes généraux que des obligations concrètes. Il faut néanmoins tenir compte du fait que les conventions de ce genre instituent à chaque fois un organe d'exécution, sous la forme d'un conseil d'association ou sous un autre nom, composé d'une part des membres du Conseil de l'Union Européenne et de membres de la Commission des Communautés Européennes, et de l'autre, de membres du gouvernement du pays tiers.

Ces organes ont sur le papier des compétences très grandes. Ils sont en effet habilités à prendre, en vue de la réalisation des objectifs des conventions qui les ont institués, des décisions dans tous les cas où les conventions le prévoient. Ces décisions sont obligatoires pour les parties contractantes, qui sont tenues de les exécuter. Cela implique que ces organes sont aussi habilités à prendre, en vertu des dispositions spécifiques sur les stupéfiants, des décisions qui sont obligatoires pour les parties contractantes. Il importe de souligner dans ce contexte que les "parties" aux conventions de ce genre sont d'une part les Communautés et leurs États membres et d'autre part le pays tiers. Les États membres individuels de l'Union Européenne ne sont donc pas chacun partie contractante.

Cela ressort aussi du fait que la dénonciation n'est prévue que pour chacune des deux parties contractantes, à savoir les Communautés conjointement avec leurs États membres, ou le pays tiers. Les Pays-Bas ne peuvent pas se soustraire unilatéralement aux obligations éventuelles découlant de conventions de ce type. La position des Communautés et de leurs États membres en vue de l'élaboration des décisions au sein de ces organes est déterminée d'avance, selon les procédures s'appliquant dans l'Union aux décisions sur le domaine concerné. Dans la mesure où il s'agit de la lutte contre la toxicomanie et le trafic illicite de drogue, visée à l'article K.1 du Traité sur l'Union Européenne, la position commune est arrêtée à l'unanimité (cf. article K.4, paragraphe 3 du Traité). Les Pays-Bas pourraient donc recourir à leur droit de véto si les propositions introduites les obligeaient à prendre des mesures impossibles à réaliser sans une modification de la législation néerlandaise ou des principes sous-tendant la politique néerlandaise. Vu la date relativement récente des conventions conjointes contenant des dispositions spécifiques sur la coopération en matière de lutte contre les stupéfiants, il n'existe pas encore de décisions d'application sur ce point.

La convention bilatérale avec le Venezuela renvoie dans sa définition de "stupéfiants" à l'article I aux substances qui sont citées en tant que telles dans la convention unique sur les stupéfiants de 1961, telle que modifiée par le protocole de 1972. La définition englobe le cannabis et les produits du cannabis. L'article II contient l'obligation pour les parties contractantes de joindre leurs efforts pour réaliser certains programmes spécifiques contre l'abus et pour la prévention, le contrôle et la répression du trafic illicite et de la production des substances citées à l'article I. Si le Royaume devait, en raison d'une décision de légalisation, dénoncer la convention unique sur les stupéfiants de 1961, cela aurait des conséquences pour la portée de la convention avec le Venezuela, qui devrait être amendée à la lumière d'une telle décision. Si l'autre partie contractante s'y oppose, la convention peut être dénoncée sur la base de l'article XI, le cas échéant uniquement pour le Royaume en Europe.

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Tweede Kamer, vergaderjaar 1994-1995, 24077, nrs. 2-3

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