Le Soleil (Canada) du mercredi 23 juillet 2003

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Québec passe de la seringue à la trousse gratuite

Une offensive pour freiner la propagation de l'hépatite C chez les utilisateurs de drogues dures

Ricard-Châtelain, Baptiste

 

Après les seringues, Québec fournira gratuitement dès septembre le "kit" du parfait utilisateur responsable de drogue par injection, afin de freiner l'épidémie d'hépatite C.

Ainsi, dans les quelque 700 centres d'accès aux seringues, les consommateurs d'héroïne et de cocaïne pourront se procurer des ampoules d'eau stérile, des contenants d'aluminium pour le mélange ou le chauffage de la substance et des filtres, détaille Richard Cloutier, le responsable du dossier au ministère de la Santé et des Services sociaux. Un modèle calqué sur ceux de la Suisse, de l'Australie, de la Colombie-Britannique ou d'Ottawa.

Dans les centres spécialisés en distribution-récupération de seringues, le tout sera disponible à la pièce, sans frais. Les pharmaciens participant au programme devraient, quant à eux, vendre des trousses, environ 3 $ ou 4 $. Celles-ci renfermeront tout ce qu'il faut pour quatre injections sécuritaires. En plus, des condoms et du lubrifiant seront inclus.

Pourquoi faciliter davantage l'utilisation de produits illégaux ? Parce que les dons de seringues ont permis de contenir la propagation du VIH-sida à plus ou moins 14 % des utilisateurs de drogue par injection (UDI). Mais, ils ont été un échec pour limiter celle de l'hépatite C, fait valoir M. Cloutier, agent de recherche et de planification au Service de lutte aux infections transmises sexuellement et par le sang (SLITSS).

Le problème, c'est que les consommateurs s'échangent moins les seringues, mais ne respectent pas les mesures d'hygiène pouvant assurer leur sécurité. Eau souillée provenant même des toilettes, contenant de mélange non stérile utilisé par plusieurs personnes... poursuit-il. "70 % à 80 % des UDI sont infectés par l'hépatite C à Montréal. C'est préoccupant."

Voilà qui justifie cette nouvelle dépense gouvernementale, selon lui. "Ça peut paraître un investissement pour des personnes qui choisissent de s'injecter de la drogue, une idée très répandue." Son équipe préfère penser que les UDI traversent une période difficile, "qu'ils ne sont pas des consommateurs à vie. Et quand ils s'en sortent, on essaie que ce ne soit pas avec le VIH ou l'hépatite C."

"L'idéal, ce serait que ces gens-là n'aient pas besoin de ces services", admet-il. Mais face à la réalité, mieux vaut utiliser tous les moyens à notre disposition afin de limiter les dommages, pense-t-il.

Voilà pourquoi M. Cloutier est en faveur de la création de piqueries officielles où les toxicomanes pourraient être conseillés, aidés. Il suivra d'ailleurs avec attention les résultats du projet-pilote qui sera mis en place cet automne à Vancouver. De la drogue pourrait même, à terme, être vendue dans ces centres.

À Québec, l'organisme Point de repères, prendra part au projet de trousses d'injection. Le directeur général par intérim, Mario Gagnon, insiste sur le fait que "ce sera un outil supplémentaire, mais pas une fin en soi." Une façon de plus de rejoindre les UDI, de leur enseigner des techniques hygiéniques et de faire de la prévention.

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