Source : The Independent

Date : 30 mars 2004

URL : http://news.independent.co.uk/uk/crime/story.jsp?story=506403

ou http://www.johannhari.com/archive/article.php?id=371

Lire aussi http://www.newsweekly.com.au/articles/2003mar08_d2.html

(traduction perso)

Version originale

 

Mike Trace : comment j’ai perdu ma lutte anti drogue

 

Lorsqu’il était le député “tsar” anti-drogue de Tony Blair, sa politique éclairée a été copiée partout dans le monde. Pourquoi donc Mike Trace a été harcelé à son poste, et calomnié comme étant un dangereux extrémiste ? Il raconte son histoire extraordinaire pour la première fois à Johann Hari.

 

 

L’histoire de l’ascension et de la chute de Mike Trace est une parabole de la manière dont s’incarne la politique des drogues. Il est l’un des experts en stupéfiants les plus reconnus au monde actuellement. Il a travaillé aussi bien au plus bas niveau de la prohibition des drogues, avec des toxicomanes sans logement dans les rues de Londres, et au sommet du système, comme député britannique sur les drogues et à la tête de la réduction des risques aux Nations Unies.

Lorsqu’il en vint à parler politique, Trace fit une erreur fatale. Son discours était truffé de références à des études académiques et à des programmes-pilotes ; c’est un homme accro aux preuves et aux faits inconstestables. Et il n’y a pas de place pour un tel homme dans les couloirs froids où la prohibition des drogues est soutenue aujourd’hui.

Son histoire commence au Centrepoint de l’avenue Shaftesbury à Londres, au début des années 80. “Quand j’ai commencé à travailler ici, comme travailleur de nuit, Centerpoint était tout simplement le premier endroit où échouaient les SDF de Londres”, dit-il. “Nous avons juste essayé de les isoler des rues dangereuses pour une, deux, trois nuits. C’est vite devenu clair pour moi que la plupart d’entre-eux avaient subi des abus dans leur enfance, et que tous possédaient un passé classique de privations multiples. Ils tentaient d’échapper à leurs expériences terribles de n’importe quelle manière, souvent par les drogues.”

“Cette partie de ma vie m’a apporté une attitude à l’égard de l’usage de drogues qui m’est toujours restée. C’est le symptôme d’autres problèmes, notamment des privations sociales. Chaque fois que j’ai entendu des gens promouvoir le système en déclarant que l’usage de drogues est une défaillance morale, une preuve de dégénérescence, je savais qu’ils avaient tort. Une fois que vous avez vu ce qui se passe dans la rue, vous ne pouvez pas souscrire à ces attaques contre les usagers de drogues.”

Trace a initié des programmes de réhabilitation des drogues dans les prisons britanniques dans les années 80, et transforma l’institut de charité RAPT (Centre de réhabilitation pour prisonniers toxicomanes) en un sérieux lobby aussi bien équipé qu’un prescripteur de traitements. Durant les années 90, il était, selon ses propres mots, “le secteur bénévole type, en matière de traitement des drogues, de tous les comités gouvernementaux”. Lorsque le gouvernement Blair, toujours dans l’idée que “les choses ne peuvent qu’aller mieux”, décida en 1997 de nommer un “tsar” des drogues pour orchestrer cette politique, Trace fut le candidat évident pour le rôle.

“Nous savions tous que le Gouvernement devait désigner un policier pour plaire aux lecteurs du Daily Mail, mais à leur crédit, on a su qu’ils voulaient équilibrer ça avec un député qui soit expert de terrain”, déclare-t-il. “Ils m’ont nommé parce qu’ils ont clairement compris qu’ici le problème des drogues est compliqué et profond.”

Trace insiste sur le fait qu’au début, il était content de travailler aux côtés de Keith Hellawell, dont le temps passé comme tsar des drogues est aujourd’hui largement considéré comme un échec - une période de mesures inefficaces, draconiennes et mal pensées. Mais au commencement, il n’y avait pas de conflit entre les approches. “Nous nous considérions chacun comme des libéraux modérés sur les drogues”, dit-il. “Nous étions tous les deux très gestionnaires à ce sujet : nous pensions que le meilleur usage de l’impôt des contribuables n’était pas de chasser des centaines de milliers de consommateurs de cannabis, mais de se concentrer sur les interpellations liées aux problèmes d’addiction et d’offrir des traitements aux usagers.”

“Pendant la première année, c’était un plaisir de travailler avec Keith. On s’entendait bien”, dit-il. “Sur le difficile problème politique - que faire à propos du cannabis - Keith et moi étions d’accord. Il était très libéral, et moi aussi. Mais nous avons réalisé que la situation politique en 1998 faisait que le gouvernement ne voulait pas que nous allions trop vite sur le cannabis, parce qu’il craignait un revers de l’Angleterre moyenne. Nous nous sommes mis d’accord pour laisser le problème de côté pour les deux premières années, et nous nous sommes concentrés par contre sur les drogues les plus dangereuses.”

Ils ont élaboré ensemble un rapport général, “Tackling Drugs To Build A Better Britain” (“Se saisir du problème des drogues pour construire une Grande-Bretagne meilleure”), publié en 1998. Celui-ci prônait une “réduction des risques” en matière de toxicomanie, et il a permis d’accroître considérablement le nombre de prescriptions de méthadone en prison. Cette politique a enrayé le niveau de criminalité. “J’en suis fier”, déclare Trace. “C’est maintenant un modèle repris dans le monde entier. Certes, il est empreint de beaucoup de maternalisme, mais c’est un bon programme. C’était une bonne année. On accomplissait nos objectifs.”

Tout semblait évoluer pour le mieux, mais la politique d’Hellawell commença à changer. “Comme les années passaient, Keith suivait évidemment les arcanes de la politique et modifia son point de vue. Il était principalement motivé par les politiques, et non par la politique. Quelque part, il a décidé qu’il serait mieux pour lui d’être ferme sur le cannabis. Il a progressivement abandonné ces principes sur lesquels nous étions d’accord au départ, et j’ai commencé à être très sceptique quant à sa conception du métier.”

Trace estime que le changement de l'attitude du gouvernement envers les drogues a reflété la dérive du New Labour à droite sur de nombreux problèmes.”De 1997 à 1999, les discussions avec les sous-commissions du cabinet [de T. Blair] étaient tout à fait bonnes”, dit-il. “Elles étaient consacrées aux ressources que nous pourrions investir pour réduire les dommages liés aux drogues : un sujet sensible. L’enthousiasme du New Labour dans les premières années était authentique. Nous restions assis avec Gordon Brown et Tony Blair et ils demandaient franchement quelles pouvaient être les meilleures façons de réduire les risques et réduire la criminalité. C’étaient là de bonnes années pour être dans le gouvernement. Les gens étaient ouverts d’esprit.”

“Mais alors”, dit-il, buvant son café à petites gorgées rapides, “la politique des drogues a dérivé et le crime et la répression sont devenues une obsession, aux détriment de la réduction des risques. Ils ont perdu leur nerfs en 1999, et alors tout a dégringolé.”

Trace a perdu son travail quand l’expérience du tsar des drogues a été abandonnée en 2000. En quelques années il a été accusé de mener une obscure conspiration interne pour renverser la politique des drogues au plus haut niveau.

Alors, quelle est son attitude réelle vis-à-vis de la politique des drogues ? Il est sûr que la plupart des pro-légalisation que je connais ne me considèrent pas comme un des leurs. “Me dépeindre comme un ultra-libéral - à la manière du “Daily Mail” et autres journaux - c’est farfelu”, rit-il sous cape.

“Tout ce que je dis est que nous devons reconnaître un beau principe de base : ce n’est pas une bonne affaire pour le contribuable quand la police dépense des milliards de livres en essayant désespérément de faire appliquer la loi sur les drogues contre chaque utilisateur. Ce n’est simplement pas un bon retour sur investissement. Nous avons essayé cela pendant 40 ans, et de toute évidence cela ne fonctionne pas très bien. Je dois partir de ce constat.”

“Personne ne sait vraiment quelle est la meilleure manière de procéder, une fois admis cela”, dit-il, “mais je pense que la meilleure voie pour les démocraties occidentales - qui ont un niveau élevé d’usage de drogue - est d’admettre qu'il y a maintenant de très nombreuses preuves qui montrent que l’on ne réduira pas ces taux d'usage par des peines brutales. Et que ni l’éducation ni la prévention - qu’importe leur qualité - aboliront le problème. Nous devons seulement être honnêtes à ce sujet. Les preuves sont accablantes.”

“Vous ne pouvez pas supprimer l’usage de drogue, ni l’instruire (éducate away?)”, conclut-il. “Si l'une ou l'autre de ces tactiques avait prouvé son efficacité je serais converti, mais elles ne fonctionnent pas. Ce que vous pouvez faire, en revanche, c’est de réduire les dommages occasionnés par les drogues. Nous devons donc sortir de la stricte application de lois répressives et nous tourner vers la réduction des risques. La meilleure utilisation de nos ressources limitées, c’est de faire des interventions ciblées sur les usages les plus problématiques.”

C’est avec cette vision des choses qu’il fut contacté en été 2002 par Antonio Maria Costa, le nouveau patron de l’Office sur les drogues et le crime des Nations Unies (UNODC). Costa voulait que Trace démarre son programme de réduction de la demande, une position qui aurait pu le placer au coeur même d’une stratégie globale vis-à-vis des drogues. Il semblerait, finalement, que Trace ait eu une véritable possibilité d’accomplir un changement radical.

L’UNODC a endossé un prohibitionnisme pur et dur pendant des décennies, en raison des fortes pressions exercées par les Etats-Unis. Les Nations Unies avaient l’obligation formelle de réduire la demande de drogues (et les risques pour les consommateurs) depuis la fin des années 80, mais en pratique tous ses efforts se sont concentrés sur le maintien de l’ordre, la lutte contre les réseaux criminels et la fumigation des champs des paysans très pauvres du Tiers monde.

La nomination de Trace semblait être un véritable tournant. Vantée par Costa comme un nouveau visage de la politique des drogues de l’ONU, elle apparaissait comme une petite brèche dans cette désastreuse stratégie d’une prohibition mondiale. “J’ai appliqué au niveau international les mêmes principes que ceux que j’ai utilisés pour la Grande-Bretagne”, dit-il. “En fait, c’était même plus complet aux Nations Unies. L’organisation a investi des centaines de milliards de dollars pendant plusieurs années pour tenter d’éradiquer le marché des drogues. Le marché était petit quand elle a commencé, et il est gigantesque aujourd’hui. Je n’ai pas besoin d’un expert pour établir qu’il est temps de réévaluer cette tactique. Pour moi, cela ne signifie pas que nous ayions besoin de démanteler complètement le système. Cela signifie simplement que nous avons besoin d’une réévaluation honnête.”

Alors qu’il semblait que ces arguments sensés progressaient, Trace fut anéanti - par le Daily Mail. Le journal publia des e-mails écrits l’année précédant son arrivée à l’ONU. Il les utilisa avec sa sobriété si caractéristique. “Est-ce une conspiration sinistre pour rendre le monde entier accro ?”, se demandait-il sérieusement en titre.

Trace, paraît-il, n’était pas un expert honnête et mondialement respecté en matière de réduction des risques. Non. Il “mettait sur les rails une énorme opération par laquelle les activistes du monde entier mènent une campagne secrète pour manipuler le gouvernement et l’opinion publique... [et dirigeait] une élite libérale sinistre, qui avait fait de Blunkett sa drogue et [désirait] renverser les lois de l’ONU.”

La vérité ne ressemble pas tout à fait à cette vision digne d’un roman policier. Après avoir quitté son travail pour celui de député tsar anti-drogues, Trace a été approché par le milliardaire philantrope George Soros pour élaborer ensemble un projet de campagnes internationales pour promouvoir une libéralisation des politiques des drogues.

“Le Daily Mail a sélectionné ce que j’ai dit pendant l’année ou j’ai discuté de ce sujet avec Soros, pour le présenter comme une sorte de conspiration visant à bouleverser l’ordre mondial”, explique-t-il. “Malheureusement mon style s’est retourné contre moi. Je disais en rigolant dans un e-mail adressé à un ami, lorsque j’essayais de me décider à accepter ce boulot à l’ONU, que je devrais y aller, pour ainsi passer comme membre d’une “cinquième colonne”. Cela a été rapporté par le Daily Mail comme si j’avais dit cela sérieusement, comme s’il existait véritablement une conspiration organisée. C’était complètement insensé”.

Trace est parti dans la semaine où cette histoire a été publiée par le Daily Mail. L’idée d’une élite libérale en train de manipuler la politique des drogues est absurde, et l’idée que Trace en est la tête pensante serait hilarante, aurait-elle eu des conséquences dévastatrices pour la poursuite de la “guerre contre les drogues”.

“En fait, la vérité est exactement à l’opposé”, affirme Trace avec une exaspération lasse. “J’étais l’exception. L’immense majorité des personnes qui s’affairent en coulisses sont intransigeants. Au sommet des Etats-Unis, au sommet de l’ONU, au coeur du gouvernement britannique... en réalité j’étais la seule personne à avoir jamais travaillé avec des usagers de drogues.”

“Lors d’une réunion-type de l’ONU, quatre personnes autour de la table devaient être des policiers spécialisés ou des officiers des douanes”, poursuit-il. “Les trois autres devaient être des diplomates. Sans surprise, si vous prenez de telles personnes pour conduire la politique, ceux-ci ne se consacreront pas en priorité à la réduction des risques pour les usagers de drogues et à l’amélioration de la santé publique. L’idée qu’ils étaient tous de mon côté, c’était de la science-fiction.”

Trace n’a pas été remplacé et l’UNODC a été “restructuré”. Le plan pour un nouveau monde de réduction des risques a été définitivement enterré. Le capital politique de Costa est dépensé. La politique est redevenue ce qu’elle était auparavant : agressive, la prohibition par tous les moyens. “Les personnes qui ne veulent pas de critiques et ne veulent aucune réévaluation des politiques ratées actuelles ont remporté la bataille diplomatique”, dit Trace. “Nous sommes revenus à la vieille mentalité : quiconque remet en cause la politique courante est un ami des trafiquants de drogue.”

Ces jours-ci, Trace a lancé le Projet Blenheim, un centre pour héroïnomanes dans l’ouest londonien. Bien qu’il croie que des améliorations progressives des politiques des drogues arriveront un jour, il semble vaincu.

La morale de l'histoire de Trace est rude : quiconque a un intérêt pour la preuve, par opposition au dogme prohibitionniste, quiconque croit en l’idée de protéger les usagers de drogue plutôt que de vociférer contre, est empêché d’exprimer sa conception d’une politique des drogues. S'il se rapproche trop près du pouvoir, il sera hué, battu et brimé. Il s'avère qu'il n'y a aucun endroit pour une pensée rationnelle dans le monde de la prohibition des drogues.

 


 

Mike Trace : How I lost my drugs war

The Independent, 30 March 2004

 

While serving as Tony Blair's deputy drugs tsar, his enlightened policies were copied around the world. So why was Mike Trace hounded from his job, and vilified as a dangerous extremist? He tells his extraordinary story for the first time to Johann Hari

 

30 March 2004

 

The story of Mike Trace's rise and fall is a parable of how drugs policy is formulated. He is one of the most widely respected narcotics experts in the world today. He has worked both at the Ground Zero of drug prohibition, with homeless addicts on the streets of London, and at the very top of the system, as Britain's deputy drugs tsar and as head of demand reduction at the United Nations.

 

When it came to formulating policy, Trace made a fatal error. His conversation is jammed with reference to academic studies and pilot programmes; he is a man addicted to evidence and hard facts. And there is no room for such a man in the distant corridors where drug prohibition is upheld today.

 

His story begins in Centrepoint on London's Shaftesbury Avenue in the early 1980s. "When I started working there, as a night worker, Centrepoint was basically the first place runaways to London ended up," he says. "We just tried to keep them out of harm's way for one, two, three nights. It quickly became clear to me that most of them were sufferers of abuse as children, and all of them came from classic multiply-deprived backgrounds. They were trying to escape their terrible experiences any way they could, usually with drugs.

 

"That time of my life gave me an attitude towards drug use that has always stayed with me. It's the symptom of other problems, especially social deprivation. Whenever I would hear people further up the system saying that drug use was a moral failing, evidence of degeneracy of some kind, I knew they were wrong. Once you've seen what happens on the streets, you aren't going to sign up to attacks on drug users."

 

Trace pioneered drug rehabilitation in British prisons in the 1980s, and turned the charity RAPT (Rehabilitation for Addicted Prisoners Trust) into a serious lobbying outfit as well as a provider of treatment. By the 1990s he was, in his own words, "the drug treatment, voluntary-sector type on all the government committees". When the Blair government, still humming "Things Can Only Get Better", decided in 1997 to appoint a drugs tsar to co-ordinate policy, Trace was an obvious candidate for the role.

 

"We all knew the Government had to appoint a policeman to please the Daily Mail readers, but to their credit the word went out that they wanted to balance that out with a deputy who was an expert from the field," he says. "They appointed me because they clearly understood that there is depth and complexity to the drugs issue."

 

At first, Trace insists, he was happy to work alongside Keith Hellawell, whose time as drugs tsar is now widely regarded as a failure - a period of ineffective, Draconian measures that were poorly thought through. But in the beginning, there was no clash of philosophies. "We both saw ourselves then as moderate liberals on drugs," he says. "We were both quite managerial about it: we believed that the best use of taxpayers' money wasn't to chase hundreds of thousands of cannabis users but to concentrate on addressing addiction problems and to offer treatment to users."

 

"During that first year, Keith was a pleasure to work with. We got on well," he says. "On the tricky political issue - what to do about cannabis - Keith and I were in agreement. He was quite liberal, and so was I. But we realised that the political situation in 1998 meant that the government didn't want us to move too fast on cannabis, because they were worried about a Middle England backlash. We agreed to put the issue on the back-burner for the first couple of years and concentrate instead on the drugs that do most harm."

 

Together they put together a broad policy document, "Tackling Drugs To Build a Better Britain", which was published in 1998. It advocates a "harm reduction" approach to addiction, and led to a considerable increase in the number of NHS prescriptions of methadone. The policy slashed crime rates. "I'm proud of that," Trace says. "It's now used around the world as a model. OK, there's a lot of mothering and apple pie in it, but it was a good plan. That was a good year. We were achieving things."

 

Everything seemed to be progressing well, but Hellawell's politics began to shift. "As the years went by, Keith obviously read the political runes and changed his mind. He was primarily motivated by politics, not policy. Somewhere along the line he decided that it would be better if he became a cannabis hardliner. He was gradually giving up on the principles we'd agreed to when we started, and I began to get quite cynical about his approach to the job."

 

Trace feels the change in government attitude towards drugs mirrored New Labour's drift to the right on a number of issues. "From 1997 to 1999, the discussions around the Cabinet sub-committee were quite good," he says. "They were about what resources we could invest to reduce the harm caused by drugs: sensible stuff. The New Labour enthusiasm in the early years was pretty genuine. We were sitting around with Gordon Brown and Tony Blair, and they were genuinely asking what the best way to reduce harm and reduce crime might be. Those were good years to be in government. People were open-minded."

 

"But then," he says, sipping hard on his coffee, "drugs policy drifted off and crime and punishment became an obsession, at the expense of harm reduction. They lost their nerve in 1999, and from then on it was all downhill."

 

Trace lost his job when the drugs tsar experiment was scrapped in 2000. Within a few years he was being accused of leading a dark internal conspiracy to subvert drugs policy at the very highest levels.

 

So what is his real attitude to drugs policy? Certainly, most legalisers I know do not regard him as one of their own. "To paint me as an extreme liberaliser - the way that the Daily Mail and other papers have - is just bizarre," he chuckles.

 

"All I say is we need to acknowledge a pretty basic fact: that it is not a good deal for the taxpayer when the police spend billions of pounds trying desperately to enforce the drugs laws against every last user. It's just not a good return on that investment. We've been trying that for 40 years, and it's clearly not working very well. I have to start from that premise."

 

"Nobody really knows what the best way to proceed is once you admit that," he says, "but I think the best route for Western democracies - who have high levels of drug use - is to admit that there is now a very large body of evidence that shows you aren't going to bring rates of use down through harsh penalties. Nor can education and prevention - no matter how good it is - end the problem. We just have to be honest about that. The evidence is overwhelming."

 

"You can't end drug use and you can't educate it away," he concludes. "If either of those tactics had a proven track record I would be a convert, but they don't work. What you can do, though, is reduce the harm that drugs do. So we need to move our investment away from enforcement and into harm reduction. The best use for our limited resources is targeted interventions on the most problematic use."

 

With this in mind he was approached in summer 2002 by Antonio Maria Costa, the new head of the United Nations Office on Drugs and Crime (UNODC). Costa wanted Trace to run his demand reduction programme, a position that would put him at the very heart of global drug strategy. It seemed, finally, that Trace had a real chance to effect radical change.

 

UNDOC had been a hardline prohibitionist outfit for decades, thanks to heavy pressure from America. The UN has had a formal commitment to reducing demand for drugs (and harm to users) since the late 1980s, but in practice all its efforts have been focused on policing, attacking criminal gangs and fumigating the drugs crops of very poor farmers in the Third World.

 

Trace's appointment seemed like a real turning point. Lauded by Costa as the new face of UN drugs policy, it seemed as though a small crack had appeared in the disastrous strategy of global prohibition. "I applied the same principles to the international scene that I applied at the British level," he says. "Indeed, it was even more stark at the UN. The organisation has invested hundreds of billions of dollars over the years in an attempt to eradicate a market in drugs. The market was small when it started and it's massive now. It didn't take a genius to figure out that it was time to reassess those tactics. To me, that didn't mean that we needed to dismantle the system entirely. It just meant that we needed an honest reassessment."

 

Just as it seemed that these sensible arguments were making headway, Trace was annihilated - by the Daily Mail. The newspaper published e-mails from the year before he started at the UN. It used them with characteristic sobriety. "Is This A Sinister Conspiracy To Get The World Hooked?", an entirely sane headline asked.

 

Trace, it seemed, was not an honest and internationally-respected expert concerned with reducing harm. No - he "was pulling the strings of a huge operation in which international activists were agitating covertly to manipulate government and public opinion... [and leading] a sinister liberal elite that has made a dope of Blunkett and [wants to] subvert UN laws".

 

The truth does not quite so closely resemble a Freddie Forsyth novel. After losing his job as deputy drugs tsar, Trace had been approached by billionaire philanthropist George Soros to put together plans for an international campaigning group which would lobby for the liberalisation of drugs policies.

 

"The Mail selectively quoted what I had said over the year I had been discussing this with Soros, to present it as some kind of conspiracy to undermine world order," he says. "Unfortunately my style gives ammunition to fire against me. I said jokingly in one e-mail to a friend - when I was trying to decide whether to take the UN job - that I might go for it so I could be a 'fifth columnist'. That was then quoted by the Mail as if it had been said seriously, as if there really was some organised conspiracy. It was completely insane."

 

Trace was gone within a week of the Mail's story being published. The idea that there is a liberal elite manipulating drugs policy is preposterous, the idea that Trace was masterminding it would be hilarious had it not had such devastating consequences for the war on drugs.

 

"Basically, the truth is exactly the opposite," Trace says with weary exasperation. "I was a total exception. The vast majority of people behind the scenes are hardliners. At the top of the EU, at the top of the UN, at the heart of British government, I was the only person who had ever actually worked with drug users.

 

"At a typical UN meeting, four of the people round the table would be professional supply-side policemen or customs officials," he continues. "The other three would be diplomats. Not surprisingly, if you get people like that running the policy, they won't prioritise minimising harm for drug users and enhancing public health. The idea that they were all on side with me is science fiction."

 

Trace has not been replaced, and UNODC has been "restructured". The plan for a new world of harm reduction has been indefinitely shelved. Costa's political capital is spent. The politics have reverted to what they were before: aggressive, all-out prohibition. "The people who don't want a review and don't want any reassessment of the current failing policies have won the diplomatic battle," Trace says. "We're back to the old mindset: anybody who questions the current policy is a friend of the drug dealer."

 

These days, Trace runs the Blenheim Project, a west-London centre for heroin addicts. Although he believes that incremental improvements in drugs policy will happen one day, he looks defeated.

 

The moral of Trace's story is stark: anybody with an interest in evidence as opposed to prohibitionist dogma, anybody with an belief in protecting drug users rather than screaming at them, is barred from formulating drug policy. If they get too close to power, they will be howled and beaten and bullied away. It appears that there is no place for rational thinking in the world of drug prohibition.